Barack Obama l'a promis durant la campagne: la prison de Guantánamo Bay, à Cuba, doit fermer. Qu'arrivera-t-il des prisonniers? Selon certaines sources, leur procès se tiendra aux États-Unis devant un nouveau tribunal qu'il reste à définir. La nouvelle réjouit autant qu'elle inquiète les militants des droits civils.

L'agence de presse Associated Press a révélé hier que les conseillers juridiques du président désigné Barack Obama étudient divers scénarios pour juger les détenus de la base militaire de Guantánamo Bay. Ceux contre qui aucune charge n'est retenue seraient libérés. D'autres seraient poursuivis en Cour fédérale américaine.

Mais un troisième groupe de détenus, dont le détail des crimes allégués relève des services secrets, pourraient être jugés devant une nouvelle cour créée spécialement pour eux, selon des conseillers et des sources du Parti démocrate consultées par l'Associated Press.

  Comme un compromis

  Ce nouveau tribunal de sécurité nationale inquiète les groupes de militants des droits civils comme Human Rights Watch. «Nous sommes évidemment très heureux que Barack Obama ferme Guantánamo Bay», dit Stacy Sullivan, porte-parole de l'organisme, jointe hier à New York. «Mais nous sommes contre la création de tout tribunal qui offrirait moins de protection que les tribunaux actuels.»

«Nous devons relâcher les gens qui ne présentent pas une menace et poursuivre ceux qui ont commis un crime, dit Ben Wizner, avocat pour l'Association américaine pour les libertés civiles. On ne détient pas des gens parce qu'ils peuvent présenter une menace sans avoir commis de crime.»

Les militants craignent, par exemple, que le nouveau tribunal accepte les dépositions obtenues sous la torture, dit Mme Sullivan. Human Rights Watch estime que la Cour fédérale américaine peut juger tous les prisonniers de Guantanamo Bay. Mais la divulgation obligatoire en Cour fédérale d'informations collectées par les services secrets ou avec l'interrogatoire militaire, ainsi que la confrontation des témoins par la défense (comme des agents doubles de la CIA ou d'anciens terroristes devenus délateurs) hérisse les partisans de la prison cubaine. Le nouveau tribunal est perçu comme un compromis pour permettre la fermeture du pénitencier controversé.

  Où sera jugé Omar Khadr?

  Le premier ministre canadien Stephen Harper a encore refusé la semaine dernière de rapatrier Omar Khadr, ce jeune Canadien capturé en Afghanistan à l'âge de 15 ans en 2002. Khadr est accusé d'avoir tué un militaire américain. Son procès doit commencer le 26 janvier, six jours après l'assermentation de Barack Obama à la Maison-Blanche.

Le nouveau président américain pourrait donc décider de faire juger Khadr par un nouveau tribunal, ou encore de le renvoyer au Canada.

La fermeture de la prison de Guantanamo signifie que les Américains devront garder sur leur territoire des prisonniers perçus comme très dangereux pour la sécurité nationale. Stacy Sullivan reconnaît qu'une partie de la population pourrait mal supporter cette idée, mais croit que les prisons américaines sont «tout à fait capables de garder ces prisonniers».

Le professeur et conseiller juridique du nouveau président élu Laurence Tribe, de l'Université Harvard, a ajouté que «nous ne pouvons mettre les gens dans un donjon indéfiniment sans nous demander s'ils méritent d'y être», selon l'Associated Press. C'est pourquoi, selon le professeur Tribe, le président Obama agira rapidement.