Julius et Ethel Rosenberg étaient bel et bien des espions soviétiques.

Les deux New-Yorkais, qui ont été exécutés en 1953 en plein maccarthysme pour avoir livré les secrets de la bombe atomique à l'URSS, sont devenus des martyrs de l'extrême gauche. Ils ont soutenu leur innocence jusqu'à leur dernier souffle, et leurs deux fils ont toujours soutenu leur cause.

Du moins jusqu'à mardi dernier. Les fils ont admis, sur la base de nouvelles révélations d'un ami de leurs parents lui aussi condamné pour espionnage, que leurs parents avaient bel et bien passé des secrets militaires américains au KGB.

 

Tout a commencé le 11 septembre dernier. Des documents du procès Rosenberg ont été rendus publics après une guérilla judiciaire de 30 ans des deux fils et d'historiens. Un journaliste du New York Times qui a écrit un livre sur le sujet, Sam Roberts, a appelé Morton Sobell pour avoir des commentaires. M. Sobell, ami des Rosenberg, avait été accusé en même temps qu'eux et condamné à cinq ans de prison pour espionnage. Il a fait un aveu inattendu: les Rosenberg et lui étaient bel et bien des espions. Même s'ils n'avaient pas transmis de secrets atomiques, ils avaient envoyé en URSS des renseignements militaires encore plus importants.

«Disons que je ne suis pas surpris», a déclaré le fils aîné des Rosenberg, Robert Meeropol (il a pris le nom de sa famille adoptive), en entrevue avec La Presse. «Quand j'ai fait mes études de droit, dans les années 70, je me suis rendu compte qu'on savait bien peu de choses sur ce procès. Alors, je me suis préparé à ce que la vérité aille d'un côté comme de l'autre.»

M. Meeropol estime tout de même que ses parents ont été injustement traités. «Mon père a été un bouc émissaire. S'il avait été établi qu'il n'était pas responsable de l'acquisition de la bombe A par les Russes, il n'aurait jamais été exécuté. Et ma mère a été victime de parjure, comme le montrent les documents dévoilés le 11 septembre. Tout ce que le gouvernement avait contre elle, c'était qu'elle avait tapé le procès-verbal d'une rencontre où les secrets atomiques auraient été discutés. Et ça semble être faux.» M. Meeropol estime que les documents ont été rendus publics le 11 septembre pour qu'ils soient noyés dans le flot de reportages sur l'anniversaire des attaques contre les tours jumelles à New York en 2001.

Les accusations contre Ethel Rosenberg servaient à faire pression sur Julius. Ces pressions ont fonctionné dans le cas du frère d'Ethel, David Greenglass, mécanicien militaire qui a travaillé au site nucléaire de Los Alamos, dont le témoignage a constitué l'assise des accusations contre sa soeur et son beau-frère. «Je n'ai jamais reparlé à mon oncle ou à sa famille, dit M. Meeropol. Il vit sous un nom d'emprunt depuis. Avec mon frère Michael, nous disons souvent en blague qu'être un Greenglass est probablement plus infamant aujourd'hui qu'être un Rosenberg.» Dans un de ses films, le cinéaste Woody Allen met en scène un personnage qui dit sarcastiquement, à propos de quelqu'un qu'il déteste: «Je l'aime comme un frère - David Greenglass.»