Le Congrès américain devait voter lundi sur un plan de sauvetage bancaire historique de 700 milliards de dollars, une décision très attendue censée aider à juguler la crise financière qui s'étend à l'Europe, conduisant à la nationalisation de plusieurs banques.

À l'issue d'une semaine d'âpres négociations, les chefs de file du Congrès et l'administration du président George W. Bush sont parvenus à un compromis dimanche sur les dispositions du plan de sauvetage destiné à renflouer le secteur bancaire qui est soumis lundi au vote de la Chambre des représentants, puis du Sénat.

Mais depuis dimanche les annonces de nationalisations et de rachats se multiplient.

«Nous savions que nous devions éviter l'effondrement du secteur financier américain mais ce qui nous préoccupe maintenant, ce sont les mauvaises nouvelles qui nous parviennent d'autres régions» du monde, a déclaré Motomi Hiratsuka, un opérateur chez BNP Paribas.

La banque britannique Bradford and Bingley va être nationalisée. Au Royaume-Uni, c'est la quatrième institution qui se retrouve le dos au mur cette année, après Northern Rock, Alliance & Leicester et HBOS, qui va être achetée par sa rivale Lloyds TSB.

Dimanche soir, la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg ont annoncé à l'issue d'une réunion de crise la nationalisation partielle du bancassureur Fortis en apportant 11,2 milliards d'euros.

Au Danemark, la banque Roskilde Bank a été rachetée par trois instituts financiers et Bonus Bank par Vestjysk Bank qui fusionne avec un autre institut régional.

La banque allemande Hypo Real Estate (HRE) a décroché in extremis une ligne de crédit de «plusieurs milliards d'euros» auprès d'un consortium de banques allemandes qui lui permet d'éviter la faillite.

L'Etat belge est prêt à soutenir également la banque franco-belge Dexia, comme elle l'a fait avec Fortis, en cas de difficultés, a indiqué lundi le ministre belge des Finances Didier Reynders, alors que le cours en Bourse de Dexia chutait (de plus de 29%).

Selon le Figaro de lundi, Dexia s'apprêterait à lancer une augmentation de capital.

La Banque centrale européenne (BCE) continue d'abreuver les marchés monétaires de liquidités permettant ainsi aux banques de se refinancer et évitant une pénurie du crédit préjudiciable à l'économie: elle prévoit d'allouer 30 milliards de dollars sur le marché monétaire dans le cadre de ses opérations concertées avec la Réserve fédérale américaine.

Les trois principales places boursières européennes, Paris, Londres et Francfort, évoluaient en forte baisse lundi matin.

A 07H55 GMT, le Footsie cédait 2,22% à Londres, le Dax abandonnait 2,31% à Francfort, et le CAC 40 lâchait 3,11% à Paris. Les valeurs bancaires étaient particulièrement chahutées.

En Asie, les Bourses étaient circonspectes sur l'efficacité du plan américain pour enrayer la pire crise financière depuis les années 1930. La Bourse de Tokyo a perdu 1,26% et celle de Hong Kong 4,3%.

Le président américain a souhaité que le Congrès parvienne à un accord avant l'ouverture lundi des places financières mondiales, afin de calmer les marchés et stabiliser le système financier.

M. Bush, qui devrait faire une déclaration lundi avant l'ouverture de Wall Street, a déclaré que le plan «envo(yait) un fort message aux marchés mondiaux montrant que les Etats-Unis s'attachent à ramener la confiance et la stabilité dans notre système financier».

Si le texte est adopté dès le début de la semaine, les autorités et le Congrès américain seront parvenus à forger, en une semaine, une intervention massive de l'Etat dans le secteur privé, sans précédent dans l'histoire américaine et à six semaines d'une élection présidentielle.

Selon le texte de l'accord, la manne des 700 milliards sera versée en plusieurs fois aux banques qui pourront céder à l'Etat les créances douteuses qu'elles ont accumulées dans l'immobilier. Le plan donnera la priorité au remboursement de l'Etat, après une dépense initiale très lourde pour les finances publiques.

Il assurera un contrôle public étroit des rachats aux banques d'actifs invendables, et limitera les «parachutes dorés» pour les dirigeants des banques concernées.

Les démocrates, majoritaires au Congrès, soulignent que le projet de loi, de plus d'une centaine de pages, améliore le texte original de trois pages présenté par la Maison Blanche.

La crise financière a éclaté il y a un peu plus d'un an dans le secteur du «subprime» --crédits hypothécaires à hauts risques à taux de remboursement élevés et variables-- aux Etats-Unis. Elle a provoqué ces dernières semaines la débâcle de grands noms de la finance américaine dont Lehman Brothers et Washington Mutual.