Le gouvernement britannique, en pleine campagne électorale, s'est mobilisé lundi pour rapatrier par tous les moyens -trains, autobus, ferries et même navires de guerre- quelque 150 000 ressortissants, empêchés de regagner leur île à la suite de l'éruption volcanique islandaise.

Le premier ministre travailliste Gordon Brown, distancé dans les sondages à 18 jours des législatives du 6 mai, a convoqué une réunion d'urgence du groupe interministériel Cobra sur la sécurité intérieure, avant d'informer du branle-bas de combat les chefs des partis d'opposition.

Plusieurs centaines de milliers de Britanniques et résidents britanniques avaient choisi de passer à l'étranger les vacances pascales qui s'achevaient ce week-end.

La prolongation jusqu'à «au moins mardi 00H00 GMT» de la fermeture de l'espace aérien du Royaume-Uni a conduit à envisager un plan B de rapatriement.

La mesure la plus spectaculaire est sans conteste la réquisition de trois bâtiments de guerre. Le navire d'assaut amphibie HMS Ocean et le porte-aéronefs léger HMS Ark Royal sont attendus en Manche pour une mission à définir. Le HMS Albion devrait rapatrier d'Espagne des touristes en même temps que des troupes de retour d'Afghanistan.

Les opérateurs de ferries Britanny Ferries et P and O se sont immédiatement étonnés de l'initiative, assurant disposer de capacités suffisantes pour mener à bien l'opération.

M. Brown a aussi précisé que des train Eurostar et car-ferries supplémentaires avaient permis d'acheminer quelque 80.000 personnes, et fait état de multiples contacts avec les autorités de l'aviation civile et ses partenaires européens pour évaluer la possibilité d'une reprise des vols.

Il projette notamment de diriger des milliers de Britanniques vers les aéroports d'Espagne, parmi les rares à rester ouverts, d'où ils embarqueront à bord de trains, de bus ou de navires.

Le premier ministre a emprunté des accents à la Winston Churchill pour saluer lundi «l'esprit de résistance porté au plus haut niveau» dont ont fait preuve ses compatriotes. «Je suis fier de ce que les Britanniques ont accompli dans ces circonstances très difficiles».

La presse célébrait quant à elle «l'esprit de Dunkerque», en référence à l'immense flottille qui a rapatrié les troupes alliées menacées par l'avancée allemande dans le nord de la France, en mai 1940.

Les naufragés du volcan islandais ont été filmés, photographiés, interviewés dans à peu près tous les aéroports et ports du monde, à l'exemple de Thom Noble, un homme d'affaires de Highgate qui a fièrement expliqué avoir acheté un vélo rouillé pour effectuer en qualité de cycliste la traversée en ferry Calais-Douvres, fermée aux piétons.

Nick Clegg, le leader libéral-démocrate propulsé de la troisième à la première position selon un sondage pour le Sun, avec 33% d'intentions de vote, à dit «soutenir sans réserve les actions du gouvernement».

«Je ne crois pas que ce genre de situation devrait être exploitée par les hommes politiques pour marquer des points les uns contre les autres», a-t-il dit, alors que ses trois fils sont bloqués en Espagne.

«Le gouvernement doit faire tout ce qui est en son pouvoir, aussi j'accueille favorablement cette annonce» du recours à la Navy, a déclaré le leader conservateur David Cameron, tout en s'empressant d'assurer que son parti était à l'origine de l'idée.

En commentant l'apparente union sacrée, les analystes ont relevé que la cote de popularité de Gordon Brown avait grandement bénéficié dans le passé de sa gestion de crise, après son accession au pouvoir en juin 2007, qu'il s'agisse de tentatives d'attentats à Londres, d'innondations sans précédent et d'une épidémie de fièvre aphteuse.