La fin de la course visant à mettre au point un vaccin contre l'Ebola pourrait bien arriver trop tard pour enrayer l'épidémie qui sévit actuellement en Afrique de l'Ouest.

Malgré les débuts des essais cliniques de deux vaccins ces dernières semaines, il n'est pas dit que la population d'Afrique de l'Ouest pourra recevoir le vaccin en 2015.

«Le plan est qu'au cours du premier trimestre 2015 nous puissions avoir un vaccin très avancé qui a franchi la phase 2, que nous avons assez de données et que nous pouvons utiliser ce vaccin pour protéger le personnel de santé ou le personnel en première ligne», affirme à La Presse le Dr Mandy Kader Kondé, spécialiste des fièvres hémorragiques qui travaille à l'élaboration d'un plan de développement des vaccins à l'Organisation mondiale de la santé.

Mais la population, elle, devra se montrer un peu plus patiente.

«Une fois que nous aurons tous les données et les homologations nécessaires dans les différentes agences de régulation, le reste suivra. Mais est-ce que la vaccination des populations se fera en 2015? On n'a pas encore un calendrier très précis», poursuit le médecin, de passage à Montréal vendredi.

Pas avant la fin 2015

La société pharmaceutique britannique GlaxoSmithKline, qui a commencé des essais cliniques de son vaccin il y a quelques semaines au Mali, au Royaume-Uni et aux États-Unis, a confirmé au réseau BBC vendredi que le vaccin arriverait «trop tard» pour l'épidémie actuelle, puisque les données complètes sur l'efficacité et l'innocuité ne seront pas prêtes avant la fin de l'année 2015.

De son côté, le Laboratoire national de microbiologie de santé publique du Canada à Winnipeg a donné le coup d'envoi à ses essais cliniques aux États-Unis, dimanche dernier. Le vaccin expérimental sera également envoyé à l'OMS lundi prochain pour d'autres essais auprès de 250 personnes en Europe et en Afrique.

«Je pense que le vaccin va permettre de réduire la mortalité d'une couche ciblée, c'est-à-dire sur le personnel de première ligne, mais je ne pense pas que fondamentalement, ça va changer les choses, parce qu'on ne peut pas utiliser un vaccin ou un médicament à grande échelle sans avoir obtenu toutes les données ou les autorisations nécessaires», souligne le docteur Kondé.

Et lorsqu'un sérum sera prêt à distribuer à grande échelle, un important travail de communication restera à faire pour convaincre les populations méfiantes de recevoir le vaccin.

«Les gens ont peur d'être des cobayes, tout va très vite, mais la population n'est pas rendue au même point que les scientifiques. Il faudra donc instaurer un dialogue, demander leur avis», estime le médecin qui est à la tête du Centre de formation et de recherche sur l'Ebola, notamment en Guinée.

Des mesures concrètes

Ces délais ne découragent pas le spécialiste, qui souligne que plusieurs mesures peuvent déjà être prises rapidement afin de juguler l'épidémie.

«Le renforcement de la surveillance épidémiologique, l'envoi de laboratoires mobiles, les études, la formation de travailleurs volontaires ou la création d'un corps d'épidémiologistes, ce sont des mesures concrètes que le Canada peut nous aider à mettre sur pied», a-t-il ajouté.

La ministre canadienne de la Santé a d'ailleurs annoncé vendredi une aide supplémentaire de 30 millions à la Mission des Nations unies pour l'action d'urgence contre Ebola pour répondre aux besoins immédiats dans cette épidémie. Cette aide s'ajoute aux 35 millions déjà promis pour lutter contre le virus.