Les pays africains touchés par Ebola, Liberia en tête, espéraient mercredi que l'aide militaire promise par les États-Unis marquerait un tournant dans la bataille contre l'épidémie, aux conséquences économiques potentiellement catastrophiques.

A plus long terme, les perspectives de découvrir un vaccin efficace paraissaient prometteuses, les premiers essais cliniques n'ayant pas révélé de réactions néfastes.

«L'annonce hier (mardi, NDLR) par le gouvernement des États-Unis d'une aide militaire directe est un moment significatif dans la bataille contre Ebola», a affirmé la présidente du Liberia Ellen Johnson Sirleaf dans un communiqué, rappelant les liens historiques entre les deux pays.

«Nous espérons que cette décision des États-Unis incitera le reste de la communauté internationale à agir. Nos partenaires américains se rendent compte que le Liberia ne peut pas vaincre Ebola seul», a ajouté Mme Sirleaf, dont le pays est de loin le plus touché.

Le président américain Barack Obama a appelé mardi «à agir vite» pour éviter que des «centaines de milliers» de personnes ne soient contaminées par Ebola, contre lequel l'ONU entend mobiliser un milliard de dollars.

Il a annoncé la création d'un centre de commandement militaire au Liberia pour soutenir la lutte contre l'épidémie à travers la région et la mise en place de 1000 lits.

Le Conseil de sécurité de l'ONU, saisi en urgence par les États-Unis, doit se prononcer jeudi sur un projet de résolution américain destiné à mobiliser les gouvernements contre la propagation de l'épidémie, une initiative rarissime dans le domaine de la santé.

L'ONU a en outre demandé 987,8 millions de dollars pour les trois pays principalement touchés, Guinée, Liberia et Sierra Leone, «au bord de l'effondrement», selon Valérie Amos, responsable des opérations humanitaires des Nations unies.

«Maintenant que l'ONU annonce environ un milliard dont la moitié pour le Liberia je ne peux que dire "Alléluia, Dieu répond à nos prières"», a déclaré à l'AFP Alex Gborlee, responsable de l'ONG Compassion Funds International Liberia.

«Si la communauté internationale avait régi plus fortement, nous ne pleurerions pas aujourd'hui des centaines de Libériens. Nous disons un grand merci à l'ONU», a-t-il néanmoins ajouté.

«Facteur peur»

Les États membres de l'Union européenne (UE) ont de leur côté promis 78 millions d'euros supplémentaires, outre les quelque 150 millions d'euros déjà prévus, pour aider à la lutte contre Ebola, a annoncé mercredi la commissaire européenne à l'Aide humanitaire, Kristalina Georgieva.

Sur le terrain, une volontaire française de Médecins sans Frontières (MSF), en mission à Monrovia, la capitale du Liberia, a été contaminée par Ebola, a annoncé mercredi l'ONG. Elle va être rapatriée en France par avion spécial, a indiqué le ministère français de la Santé. Ce sera la première fois qu'un patient atteint d'Ebola sera hospitalisé en France.

En Sierra Leone, où les autorités ont décrété un confinement général de la population pendant trois jours, de vendredi à dimanche, les habitants de la capitale, Freetown, se pressaient pour faire des provisions de denrées de base: huile, riz, pommes de terre et manioc, provoquant des embouteillages.

L'économie était touchée dans la plupart des secteurs, le ministère du Tourisme faisant état d'une «chute de 50% à 10% du taux de  fréquentation hôtelière depuis l'épidémie».

La Banque mondiale s'inquiète du «facteur peur» provoqué par Ebola, soulignant que «l'impact économique le plus important de la crise ne résulte pas de ses coûts directs (mortalité, morbidité, soins de santé, pertes des jours de travail) mais de réactions de répulsion alimentées par la peur de la contagion».

«Si le virus continue de se propager dans les trois pays les plus durement affectés, son impact économique pourrait être multiplié par huit, infligeant un choc catastrophique à des États déjà fragiles», indique un rapport de l'institution.

Dans ce scénario catastrophe, la croissance économique chuterait l'année prochaine de 11,7 points de pourcentage au Liberia et de 8,9 points en Sierra Leone, au risque de faire plonger ces deux pays pauvres en récession.

Dans ce contexte sombre, la principale lueur d'espoir venait de la recherche médicale, dont les efforts en vue d'un vaccin opérationnel d'ici la fin de l'année, à destination initialement des professionnels de santé, semblaient progresser.

Une équipe de chercheurs de l'université britannique d'Oxford a lancé mercredi un essai clinique sur 60 personnes de ce vaccin également testé aux États-Unis sur une poignée de volontaires, qui n'ont pas présenté de réaction négative.

Selon l'un de ces chercheurs, Edward Wright, de l'Université de Westminster, «le virus se reproduit si rapidement que le corps n'est pas en mesure de générer suffisamment d'anticorps pour bloquer ou inhiber l'infection avant qu'elle ne prenne racine».

«En administrant ce vaccin, nous espérons pouvoir stimuler la production des anticorps avant qu'ils soient infectés, afin qu'ils puissent se défendre», a-t-il expliqué sur la radio BBC.