La Sierra Leone, un des pays les plus touchés par l'épidémie d'Ebola, a annoncé samedi une mesure extrême et controversée: le confinement à domicile de toute sa population pendant trois jours, du 19 au 21 septembre, que MSF juge inapproprié.

La Sierra Leone (5,7 millions d'habitants) figure parmi les trois pays (avec la Guinée et le Liberia) les plus touchés par la fièvre hémorragique. 491 personnes y sont mortes de cette maladie.

Cette mesure de confinement vise à faciliter la détection de malades cachés par leurs proches, alors que le bilan de l'épidémie ne cesse de s'alourdir: plus de 2000 morts depuis le début de l'année, sur 3944 cas dans ces trois pays, selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS).

Médecins sans frontières (MSF), organisation internationale la plus impliquée dans la lutte contre la maladie, a promptement exprimé ses doutes dans un communiqué, disant «craindre que le confinement proposé ne soit pas la réponse appropriée».

«Des mesures coercitives à une large échelle comme les placements en isolement forcés et les confinements» peuvent «compromettre la confiance entre la population et les professionnels de santé», «conduire à une dissimulation de cas (de maladie) et pousser les malades à se faire traiter en dehors du système de santé», prévient MSF.

Dans le pays, la mesure était diversement appréciée. «Mon seul espoir est que le confinement nous aide à stopper la maladie qui progresse», a confié un importateur de produits textiles, Sam Smith.

Pour un vendeur de légumes, la situation «peut empirer» avec le confinement. «Nous devons réduire nos livraisons ou nos produits vont pourrir» faute d'acheteurs, s'est-il plaint.

«La situation économique du pays n'est pas bonne et un confinement de trois jours va l'aggraver», a renchéri un homme d'affaires turc, également sous couvert d'anonymat.

«Le confinement signifie que personne, encore moins un véhicule à l'exception de ceux qui sont essentiels pour le service, ne sera autorisé à circuler», a expliqué le porte-parole du gouvernement, Abdulai Barratay.

«Le personnel de santé et celui des organisations non gouvernementales feront du porte-à-porte pour détecter des cas probables de maladie d'Ebola cachés par leurs parents dans les maisons», a-t-il ajouté. «La mesure sera soutenue par l'arrivée de plusieurs ambulances et quelque 30 véhicules utilitaires. C'est une opération que nous allons organiser périodiquement jusqu'à ce que la maladie d'Ebola soit vaincue».

Pour MSF, «il sera extrêmement difficile aux agents de santé d'identifier présentement les cas à travers le porte-à-porte» car «cela nécessite une certaine expertise».

Cette opération va impliquer «quelque 7000 équipes de patrouille composées d'agents de santé, de militants de la société civile et d'un membre de la communauté» qui sera passée au crible, a précisé un communiqué de la présidence.

«Mobiliser toute la population»

«La décision a été prise de mobiliser toute la population dès le 18 septembre», veille du début de l'application de la mesure, «pour la préparer au confinement», selon la présidence.

Face à une épidémie qui ne faiblit pas, la Côte d'Ivoire, craignant la contagion, a d'abord refusé d'accueillir le match de qualification pour la Coupe d'Afrique des nations 2015 qui devait l'opposer samedi à la Sierra Leone.

La tenue de la rencontre a finalement été autorisée par le gouvernement ivoirien. La Côte d'Ivoire, malgré des frontières avec le Liberia et la Sierra Leone, n'a signalé aucun cas d'Ebola à ce jour.

La Sierra Leone, pays parmi les plus pauvres au monde malgré ses énormes richesses minières dont le diamant, se remet d'une guerre civile ayant fait des dizaines de milliers de morts de 1991 à 2002.

48 tonnes de médicaments ont été acheminées vendredi dans le pays, ont annoncé la Banque mondiale et l'Unicef. Ce don comprend notamment des gants en latex, des antibiotiques et des équipements de protection.

La République démocratique du Congo (RDC) est elle aussi touchée par une épidémie d'Ebola, distincte de celle frappant l'Afrique de l'Ouest, selon l'OMS et les autorités congolaises. Ces dernières ont annoncé samedi que le bilan atteignait désormais 32 morts, avec 59 cas confirmés, possibles ou probables.

Il n'existe pas à l'heure actuelle de vaccin homologué contre la maladie ni de traitement spécifique.

Ebola en République démocratique du Congo : 32 morts

L'épidémie d'Ebola qui sévit dans une région reculée du nord-ouest de la République démocratique du Congo (RDC) a tué 32 personnes, selon un nouveau bilan présenté par les autorités samedi à Kinshasa.

«Nous avons enregistré 32 décès», soit un mort de plus que lors du bilan précédent présenté mardi, a déclaré le ministre de la Santé Félix Kabange Numbi au cours d'une conférence de presse.

On décompte «59 cas» confirmés, possibles ou probables d'Ebola, soit un de plus que mardi, a ajouté M. Kabange, précisant que «336 personnes ayant été en contact avec les personnes malades ou décédées (étaient) suivies», contre 285 mardi.

De retour d'une tournée dans la zone de la province de l'Équateur touchée par Ebola, M. Kabange a indiqué que l'épidémie, qui s'est déclarée le 11 août, «reste contenue» à une partie de la zone de santé de Boende, ville située à 800 km au nord-est de Kinshasa.

Pour le ministre de la Santé, le nombre des cas suspects est un «grand défi», alors que la RDC s'est donné 45 jours pour rompre la chaîne de transmission de l'épidémie.

Pour ce faire, les autorités ont décidé entre autres de procéder à des «enterrements sécurisés pour tout cas de décès», des suites d'Ebola ou pas, dans les 23 villages touchés par l'épidémie.

M. Kabange a souligné «les difficultés d'accès à la région touchée par Ebola» où les humanitaires viennent d'établir «un pont aérien pour faire parvenir le matériel médical». Cependant, l'enclavement de cette région est aussi une chance pour la RDC: il limite de façon considérable la progression de la maladie.

Pour les autorités congolaises et l'Organisation mondiale de la santé (OMS), l'épidémie qui sévit en RDC est distincte de celle qui frappe l'Afrique de l'Ouest et a déjà tué plus de 2000 personnes depuis le début de l'année.