Les bonnes nouvelles sont rares dans l'actuelle épidémie de fièvre Ebola qui afflige l'Afrique de l'Ouest. Mais hier, alors qu'on apprenait que l'épidémie avait atteint un cinquième pays de la région, le Sénégal, un chercheur originaire de Québec a dévoilé des résultats scientifiques prometteurs en vue d'un nouveau médicament.

Chef du département des agents pathogènes du Laboratoire national de microbiologie de l'Agence de la santé publique du Canada, le docteur Gary Kobinger et ses collègues ont testé un nouveau médicament, le ZMapp, sur 18 macaques infectés par le virus Ebola.

Tous les primates ont survécu à la maladie, apprend-on dans un article publié dans la revue Nature.

Un pas en avant

Le ZMapp est né de la combinaison d'un médicament expérimental conçu dans le laboratoire du Dr Kobinger à Winnipeg et d'un autre mis au point aux États-Unis à l'Institut de recherche médicale sur les maladies infectieuses de l'armée américaine (USAMRIID).

«En combinant les deux, on espérait une amélioration, mais on n'était sûrs de rien. L'amélioration dans les résultats est au-delà de mes espérances. Nous sommes allés jusqu'à administrer le ZMapp à un animal malade depuis cinq jours et nous avons été capables de réchapper tous les animaux», a dit le Dr Kobinger hier lors d'une conférence téléphonique avec des journalistes du monde entier.

«C'est un pas en avant important dans la lutte contre le virus Ebola», a ajouté le chercheur qui s'intéresse à la maladie depuis plus d'une décennie.

De l'aveu de l'expert, les récents tests se sont déroulés très rapidement. À peine huit mois se sont écoulés entre la création du ZMapp et le dévoilement des résultats des tests sur 18 macaques. Le même laps de temps devrait être nécessaire pour effectuer des tests sur des humains. «À l'été 2015, on pourrait avoir assez de données pour que le médicament soit produit» selon les normes canadiennes, a dit le docteur hier.

Le médicament ZMapp, bien qu'il soit à l'étape expérimentale, a récemment été administré à sept personnes atteintes du virus Ebola pour des raisons humanitaires. De ce nombre, un prêtre espagnol et un médecin libérien ont néanmoins succombé à la maladie.

Le docteur Kobinger estimait hier que ces essais sur des humains ne faciliteraient pas vraiment la tâche des chercheurs puisque le médicament n'a pas été administré dans le cadre d'essais cliniques contrôlés.

Expansion géographique

Les bonnes nouvelles concernant le ZMapp ont coïncidé avec la détection d'un nouveau cas d'infection au virus Ebola au Sénégal. Un étudiant guinéen infecté a réussi à franchir la frontière guinéo-sénégalaise - fermée depuis le 21 août - et s'est présenté dans un hôpital de Dakar où il a été mis en quarantaine.

Ce cas porte à cinq le nombre de pays touchés par l'épidémie qui a pris naissance en Guinée au début de l'année, avant de gagner le Liberia, la Sierra Leone et le Nigeria. Cette semaine, on apprenait aussi qu'une autre souche de la maladie sévit en République démocratique du Congo, pays où la maladie a été découverte en 1976.

Cette semaine, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a sonné l'alarme. Rappelant qu'au 26 août, le virus Ebola avait fait plus de 1500 morts et infecté plus de 3050 personnes, l'organisation onusienne a affirmé que 20 000 personnes pourraient être infectées par la maladie. Appelant la communauté internationale à l'aide, l'OMS estime qu'elle pourrait freiner la progression meurtrière du virus d'ici neuf mois, mais cela nécessitera 489 millions, ainsi que la collaboration de 750 acteurs internationaux et 12 000 locaux.

Le laboratoire de l'Agence de la santé publique du Canada auquel est rattachée l'équipe du Dr Kobinger est déjà au centre de ces efforts. Cette semaine, trois de ses membres qui se trouvaient en Sierra Leone ont été évacués par les autorités canadiennes.

Détenteur d'un baccalauréat de l'Université Laval et d'un doctorat de l'Université de Montréal, le Dr Kobinger a fait de la recherche sur le virus Ebola aux États-Unis pendant plusieurs années avant de rentrer au Canada en 2005.