ONG et sociétés de la Croix-Rouge insistaient vendredi sur la nécessité de se mobiliser davantage face à une épidémie de fièvre hémorragique Ebola «largement sous-évaluée» qui se propage trop vite pour que les moyens actuellement mis en oeuvre puissent y faire face.

«Le personnel présent dans les zones d'épidémie relève des preuves montrant que le nombre de cas rapportés et le nombre de morts ne reflètent pas l'ampleur de l'épidémie», affirme un communiqué de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) publié jeudi soir.

La Dre Joanne Liu, directrice de Médecins sans frontières (MSF), qui rentre d'une visite de dix jours en Afrique de l'Ouest, est allée plus loin vendredi, lançant un cri d'alarme en parlant d'une épidémie qui se propage plus rapidement que prévu et d'une situation qui «se détériore plus vite que notre capacité à y faire face».

Nos infrastructures ne sont pas du tout à la hauteur, a-t-elle déclaré, jugeant que «si on ne stabilise pas la situation au Liberia, on ne parviendra jamais à stabiliser la région».

«Et il ne s'agit que de la partie émergée de l'iceberg», a mis en garde la responsable de l'ONG.

Joanne Liu a lancé un appel à une coordination internationale renforcée sous la houlette de l'OMS. «Tous les gouvernements doivent se mobiliser. Il faut le faire maintenant si nous voulons contenir cette épidémie», a-t-elle déclaré, parlant d'un engagement d'au moins six mois.

Un climat de peur générale

«Nous n'avions jamais vu cela auparavant. Il faut élaborer une nouvelle stratégie, l'épidémie d'Ebola n'est plus confinée seulement dans quelques villages, elle se propage dans Monrovia, une ville d'1,3 million d'habitants», a expliqué la directrice de MSF, au cours d'une conférence de presse à Genève.

Elle a estimé qu'il régnait actuellement un «climat de peur général, comme en temps de guerre» dans la région touchée aux frontières de la Guinée, de la Sierra Leone et du Liberia. «La peur n'est pas une réaction souhaitable», dans une telle situation, a dit Joanne Liu.

«Les gens se méfient maintenant des centres de santé. Le suivi des malades est insuffisant», a-t-elle dit.

L'OMS souligne qu'elle «coordonne une augmentation massive de la réponse internationale».

Le Programme alimentaire mondial de l'ONU, à la demande de l'OMS, va étendre ses interventions à un million de personnes en Sierra Leone, au Liberia et en Guinée pour empêcher une crise alimentaire, a déclaré vendredi le bureau régional du PAM à Dakar.

Seules quelques milliers de personnes recevaient jusqu'ici l'aide du PAM.

L'OMS relève que les centres américains de contrôle et de prévention des maladies vont équiper les pays touchés avec des ordinateurs pour pouvoir suivre en temps réel l'évolution de l'épidémie. Il faut aussi être en mesure de mettre à jour en permanence une carte des zones touchées et de leurs besoins logistiques.

Le président sierra-léonais Ernest Koroma a annoncé vendredi la construction de plusieurs centres de traitement d'Ebola dans le pays, en plus des deux existants. Ces centres seront notamment construits par la Croix-Rouge et MSF, a-t-il dit.

En cinq mois, cette épidémie d'Ebola, la plus grave depuis l'apparition de cette fièvre hémorragique en 1976, a fait 1.145 morts, selon le dernier bilan de l'OMS arrêté au 13 août : 380 en Guinée, 413 au Liberia, 348 en Sierra Leone et quatre au Nigeria.

Pour le nouveau secrétaire général de Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR), le Sénégalais Elhadj As Sy, qui vient de rentrer d'une tournée en Guinée et en Sierra Leone, la communauté internationale doit apporter un plus grand  soutien. Il a annoncé que la FICR allait établir à Conakry (Guinée), une plateforme régionale pour coordonner ses efforts et aussi mettre en oeuvre des mesures de prévention dans les pays voisins.

Des athlètes africains privés de compétition 

Certains athlètes en provenance de pays d'Afrique de l'Ouest touchés par l'épidémie ne pourront pas participer à la 2e édition des jeux Olympiques de la Jeunesse qui commencent samedi à Nankin (Chine), ont annoncé le CIO (Comité international olympique) et le comité organisateur des Jeux.

Il a été décidé que «les athlètes venant des régions infectées ne pourraient pas participer aux sports de combat (deux athlètes) ni aux sports de natation (une personne)», indiquent-ils dans un communiqué.

Les organisateurs ont en outre indiqué que les athlètes en provenance des régions contaminées seraient soumis à des «prises de température régulières, ainsi qu'à des examens physiques», pendant les deux semaines des jeux.

Selon le site internet de ces jeux, 25 participants des quatre pays les plus touchés par le virus Ebola -- la Sierra Leone, le Liberia, la Guinée et le Nigeria -- sont attendus à Nankin (est).