Un journaliste ukrainien prorusse connu, Oles Bouzina, a été tué jeudi à Kiev, deuxième meurtre par balle d'une personnalité prorusse dans la capitale ukrainienne en 24 heures.

«Le journaliste Oles Bouzina vient d'être tué au 58, rue Degtiarivska», non loin du centre-ville, a écrit sur sa page Facebook le conseiller du ministère de l'Intérieur, Anton Guerachtchenko. Contacté par l'AFP, le service de presse du ministère a confirmé cette information.

Des chaînes de télévisions ukrainiennes montraient le corps ensanglanté de la victime à même le sol, en bas d'un immeuble près d'une aire de jeu. De nombreux policiers étaient présents sur le lieu du drame.

Oles Bouzina, 45 ans, était chroniqueur avant de devenir le rédacteur en chef du quotidien Segodnia. Ce journal est financé par l'homme le plus riche du pays, Rinat Akhmetov, qui fut également le principal commanditaire du Parti des régions, ex-formation du président prorusse Viktor Ianoukovitch destitué en février 2014 après la répression sanglante de manifestations pro-européennes sur le Maïdan à Kiev.

Avant sa mort, le journaliste commentait souvent la crise ukrainienne sur les chaînes publiques russes.

Fils d'un lieutenant-colonel du KGB, Oles Bouzina, qui écrivait sur son propre site que Russes, Ukrainiens et Bélarusses sont «un seul et unique peuple», accusait les Ukrainiens de «vouloir détruire la culture russe».

Il se disait partisan de la «fédéralisation» de l'Ukraine prônée par la Russie et fondateur d'une communauté de «Chevtchenko-phobes», qui disaient détester le poète et héros national de l'Ukraine, Taras Chevtchenko.

Mercredi soir, une autre personnalité de l'ancien gouvernement, l'ex-député du Parti des régions Oleg Kalachnikov avait été retrouvé mort, tué par balle. La police a ouvert une enquête pour «meurtre avec préméditation».

Oleg Kalachnikov était connu pour avoir mobilisé de gros bras, soupçonnés d'être payés par les autorités, pour participer à des manifestations pro-Ianoukovitch afin de faire contrepoids à celles de l'opposition sur le Maïdan.

Son meurtre et celui d'Oles Bouzina fait suite à une série de suicides présumés d'anciens hauts responsables du régime prorusse.

Olexandre Peklouchenko, ex-gouverneur et membre du Parti des régions, se serait suicidé à la mi-mars dans sa maison dans le sud de l'Ukraine.

Peu avant, Stanislav Melnik, un autre ex-député du Parti des régions, avait été retrouvé mort à son domicile dans la région de Kiev après un apparent suicide.

Fin février, c'est Mikhaïlo Tchetchetov, encore un ancien haut responsable parlementaire du Parti des régions, qui s'était défenestré du 17e étage à Kiev.

Enfin, le fils cadet de l'ex-président Ianoukovitch est décédé fin mars dans un accident en Russie, au volant d'un minibus qu'il avait engagé sur la glace du lac Baïkal, qui a cédé. Qualifiée d'accidentelle par des proches de Ianoukovitch, sa mort a été jugée suspecte par certains observateurs en Ukraine.

Viktor Ianoukovitch a été destitué par le Parlement après sa fuite en Russie en février 2014, à la suite de trois mois de contestation pro-européenne au Maïdan dans le centre de Kiev, qui se sont terminés en bain de sang.

Le Parti des régions, de loin le plus puissant en Ukraine sous la présidence de M. Ianoukovitch, a pratiquement disparu de la scène politique depuis sa chute.

PHOTO ARCHIVES REUTERS/STRINGER

Oles Bouzina, 45 ans, était chroniqueur avant de devenir le rédacteur en chef du quotidien Segodnia.

Des meurtres profitables aux ennemis, selon Porochenko

Les meurtres de deux figures prorusses en 24 heures à Kiev sont une «provocation» profitable aux «ennemis» de l'Ukraine, a déclaré le président ukrainien Petro Porochenko en appelant à une enquête «transparente».

«Il est évident que ces deux crimes sont du même genre. Leur nature et sens politiques sont clairs - c'est une provocation délibérée qui apporte de l'eau au moulin de nos ennemis, déstabilise la situation en Ukraine», a déclaré le président après les meurtres par balle du journaliste prorusse Oles Bouzina jeudi et celui de l'ex-député Oleg Kalachnikov la veille.