Au moins deux personnes ont été tuées dimanche dans une explosion lors d'une marche pro-Kiev à Kharkiv, une région voisine de la zone de guerre dans l'Est de l'Ukraine où l'armée et les rebelles prorusses ont annoncé le prochain début du retrait des armes lourdes.

La tension montait aussi autour de Marioupol, dernière grande ville de l'Est sous contrôle de Kiev située dans le sud de la ligne du front qui pourrait devenir la prochaine cible d'une offensive rebelle, après la prise par ceux-ci cette semaine du noeud ferroviaire de Debaltseve.

Grande ville industrielle et universitaire avec presque 1,5 million d'habitants, Kharkiv était en état de choc après l'explosion, qui s'est produite lors d'une marche patriotique et a été aussitôt qualifiée d'«attentat terroriste» par la police.

L'explosion d'un engin artisanal rempli de pièces de métal et dissimulé dans la neige au bord de l'avenue Joukov y a fait au moins deux morts - un policier et un militant pro-européen - et une dizaine de blessés, selon les chiffres officiels.

L'explosion s'est produite peu après 11 h GMT, au moment où commençait à Kiev une autre marche de solidarité avec l'Ukraine avec la participation de dirigeants ukrainiens et européens dont le président du Conseil européen Donald Tusk, les présidents allemand, polonais, lituanien, slovaque, géorgien et moldave.

Beaucoup ont vu dans la tragédie de Kharkiv une tentative d'intimider les forces pro-Kiev dans cette ville russophone située à quelque 200 kilomètres de la zone des combats et à seulement une trentaine de kilomètres de la frontière russe.

Cet incident intervient alors que l'Ukraine et les séparatistes prorusses semblaient avancer légèrement dans l'application du plan de paix pour le conflit dans l'Est qui a fait plus de 5.700 morts en dix mois.

Après avoir procédé à l'échange de prisonniers de guerre le plus massif depuis le début de l'année - 139 soldats ukrainiens et 52 combattants rebelles - Kiev et les rebelles ont annoncé pour dimanche le début du retrait des armes lourdes de la ligne du front, en conformité au plan de paix Minsk 2 signé il y a dix jours dans la capitale bélarusse.

Deux attaques de chars près de Marioupol

Aucune information sur l'heure ni sur le lieu où le retrait commencera n'a cependant été dévoilée.

Selon les accords Minsk 2, les deux parties doivent retirer «toutes les armes lourdes» afin d'établir une zone tampon d'une profondeur de 50 à 140 km en fonction du type d'armes.

Ces premiers progrès dans l'application du plan de paix ont toutefois été ternis par de nouveaux combats près de Marioupol très convoité par les rebelles auxquels sa prise permettrait de créer un pont terrestre avec la péninsule ukrainienne de Crimée annexée en mars dernier par la Russie.

«Ce matin, il y a eu deux attaques de chars près de Marioupol» et «les combats continuent», a déclaré à la mi-journée un porte-parole militaire ukrainien Andriï Lyssenko.

Il a également affirmé qu'un convoi militaire de l'armée russe -- 50 camions chargés notamment de munitions selon lui -- avait pénétré en Ukraine et se dirigeait vers Novoazovsk, base rebelle à une trentaine de kilomètres de Marioupol.

Kiev et les Occidentaux accusent la Russie de soutenir les séparatistes en leur fournissant armes et troupes, ce que Moscou nie farouchement.

Le ministre des Affaires étrangères allemand, Frank-Walter Steinmeier, a mis en garde contre une avancée des séparatistes sur Marioupol, jugeant qu'elle constituerait une «violation claire des accords» de Minsk, dans un entretien au journal allemand Bild.

Si l'intensité de combats a globalement baissé depuis samedi dans l'Est de l'Ukraine, un soldat ukrainien a été tué et trois autres blessés en dernières 24 heures, a indiqué M. Lyssenko.

À Donetsk, fief séparatiste, des journalistes de l'AFP basés dans le centre-ville ont entendu dans la matinée des tirs d'artillerie intenses, qui semblaient partir des positions rebelles, au nord de cette ville.

Les violations du cessez-le-feu notamment par les rebelles ont provoqué les foudres de Washington qui a déclaré samedi réfléchir à des sanctions «graves» contre la Russie pour son soutien présumé aux séparatistes.

Un haut responsable français qui a participé avec d'autres responsables européens dimanche à la «marche de dignité» à Kiev a également admis la possibilité de sanctions européennes supplémentaires contre Moscou.

«Si les accords de Minsk n'étaient pas respectés, comme cela avait déjà été décidé avant, les sanctions seraient maintenues par l'UE et pourraient même être renforcées», a déclaré à des journalistes le secrétaire d'État français chargé des Affaires européennes Harlem Désir.

L'application de ces accords permettrait par contre d'arriver à «une paix durable entre l'Ukraine et la Russie», a-t-il souligné.