L'état-major de l'armée ukrainienne dans l'est de l'Ukraine a été bombardé mardi pour la première fois depuis le début de la guerre à la veille d'un sommet crucial à Minsk où les dirigeants européens, russe et ukrainien, doivent négocier un plan de paix.

Alors que les diplomates mandatés par Vladimir Poutine, François Hollande, Angela Merkel et Petro Porochenko négocient d'arrache-pied pour accoucher d'un texte qui serve de matrice à un plan de paix, les combats et bombardements ont fauché de nouvelles vies dans l'est de l'Ukraine, théâtre depuis dix mois d'un conflit qui a fait plus de 5500 morts.

Au moins vingt personnes ont trouvé la mort, l'armée ukrainienne, en mauvaise posture depuis des semaines, et les rebelles prorusses cherchant à s'accaparer d'un maximum de terrain pour arriver en position de force à la table des négociations.

Le président ukrainien a dû interrompre une séance parlementaire pour annoncer que le quartier général commandant les soldats engagés dans des combats dans les régions séparatistes de Donetsk et de Lougansk avait été touché par des roquettes.

Cet état-major situé à Kramatorsk, à 70 km au nord du fief rebelle de Donetsk, se trouve à au moins 45 km de la zone rebelle la plus proche. Au moins six civils ont été tués dans cette attaque aux lance-roquettes multiples Tornado.

Auparavant, sept soldats et six civils avaient été tués au cours des dernières 24 heures, selon les bilans établis séparément par les autorités rebelles et ukrainiennes.

Parallèlement, au sud de la ligne de front, les troupes ukrainiennes ont annoncé avoir lancé une contre-offensive et repris le contrôle de trois villages à l'est du port de Marioupol, dernière grande ville de la région sous contrôle ukrainien. «De violents combats sont en cours», dans deux autres villages, a précisé le porte-parole militaire ukrainien, Zoryan Shkiryak.

Dans le fief séparatiste de Donetsk, les tirs d'artillerie se sont poursuivis une bonne partie de la nuit et ont repris mardi matin, a constaté un journaliste de l'AFP sur place.

Sommet de la dernière chance

Malgré les combats, les 24 prochaines heures seront cruciales sur le plan diplomatique, à la suite de l'initiative de François Hollande et d'Angela Merkel de prendre au mot Vladimir Poutine et de venir à Moscou lui présenter un plan de paix, après l'avoir exposé au chef de l'État ukrainien Petro Porochenko.

Depuis, les quatre dirigeants ont eu des entretiens téléphoniques et font travailler d'arrache-pied leurs conseillers pour parvenir à un compromis permettant l'organisation d'un sommet inédit, à Minsk, la capitale du Bélarus, encore qualifié jusqu'à récemment par les Américains de «dernière dictature d'Europe».

La tenue du sommet dépendra notamment des résultats de la réunion du Groupe de contact sur l'Ukraine, qui réunissait à partir de 13 h (8 h à Montréal) mardi à Minsk les représentants ukrainiens, russes ainsi que celui de l'OSCE (organisation pour la sécurité et la coopération en Europe). Les émissaires séparatistes y participeront également, a annoncé Denis Pouchiline, représentant de la République populaire autoproclamée de Donetsk (DNR), à l'agence officielle séparatiste.

Mais avant la réunion diplomatique de «la dernière chance» entre les présidents russe Vladimir Poutine, ukrainien Petro Porochenko, français François Hollande et la chancelière allemande Angela Merkel, cette dernière était lundi à Washington et à Ottawa pour présenter au président Obama et au premier ministre Harper ce plan de paix européen.

Ce plan, qui n'a pas été dévoilé, vise à faire appliquer les accords de paix conclus en septembre à Minsk. Mais l'Ukraine insiste sur le respect de la ligne de front établie en septembre alors que les séparatistes occupent 500 km2 supplémentaires depuis.

Une autre question litigieuse concerne le «statut des territoires» conquis par les séparatistes. Moscou insiste sur la constitution d'une fédération quand l'Ukraine ne parle que de «décentralisation», craignant une tentative du Kremlin de s'assurer un droit de veto sur les décisions de Kiev.

Est également âprement discutée la question du contrôle de la frontière ukraino-russe dans les territoires aux mains des rebelles. Kiev réclame son contrôle conjoint avec l'OSCE, mais «Moscou refuse d'en parler» et réclame que l'Ukraine se mette d'accord avec les rebelles sur ce point, selon une source gouvernementale ukrainienne.

D'après la même source, l'idée d'un contingent de maintien de la paix a été évoquée mais les négociations bloquent sur la nationalité de ses soldats. Lundi, les séparatistes s'étaient dits ouverts à cette idée si les soldats étaient biélorusses ou russes, une option rejetée par Kiev.

Pour autant, une source diplomatique française s'est dite lundi confiante sur la tenue de ce sommet. «Il y a huit jours, ils (Ukrainiens et Russes, NDLR) ne se parlaient pas. Là, on les met autour d'une table», a-t-elle déclaré à l'AFP.

«L'idée est d'avoir un accord global», a ajouté cette source, qui a reconnu que les négociations étaient «très compliquées».