Le pouvoir ukrainien espère recevoir des armes des États-Unis, qui réfléchissent à cette hypothèse, deux jours avant la visite du secrétaire d'État américain John Kerry à Kiev alors que plusieurs ONG s'alarment de l'augmentation du nombre de victimes civiles dans l'est de l'Ukraine.

Au moins 24 personnes, dont 19 civils, ont encore été tuées au cours des dernières 24 heures selon des bilans annoncés mardi séparément par les autorités ukrainiennes et les rebelles.

Concernant d'éventuelles livraisons d'équipement militaire, «l'Ukraine est en dialogue permanent avec ses partenaires» et espère y voir plus clair vers la fin de la semaine, après une série de rencontres avec des dirigeants américains, a déclaré mardi à l'AFP une source diplomatique ukrainienne haut placée ayant requis l'anonymat.

«Nous espérons obtenir plus de détails après la visite cette semaine à Kiev de John Kerry», puis une rencontre entre le président Petro Porochenko et le vice-président américain Joe Biden en marge de la Conférence internationale de Munich sur la sécurité, a ajouté cette source.

Les discussions ne porteront que sur des armes défensives, a-t-elle encore dit, le quotidien The Wall Street Journal écrivant pour sa part que Washington étudie la possibilité de fournir à Kiev de puissants missiles antichar Javelin, des armes légères et des munitions.

Dimanche, le New York Times avait pour la première fois affirmé que le gouvernement américain envisageait de livrer des armes à l'Ukraine, alors qu'il s'y était jusqu'à présent refusé.

«La situation empire chaque jour»

Les opinions sur le sujet au sein du gouvernement américain «ont mûri», compte tenu de l'appui qu'apporte la Russie aux séparatistes et des violations répétées des accords de cessez-le-feu de septembre dernier, a argumenté un responsable militaire américain.

Sur le terrain, les séparatistes prorusses tentent toujours d'encercler les soldats ukrainiens retranchés dans la ville stratégique de Debaltseve, important noeud ferroviaire situé à une cinquantaine de kilomètres au nord-est du fief rebelle de Donetsk.

Mais l'armée ukrainienne et les rebelles se livrent aussi à des duels d'artillerie tout au long de la ligne de front, faisant plusieurs dizaines de victimes civiles chaque jour.

À Donetsk, les tirs ont duré jusque tard lundi soir, avant de reprendre dans la matinée. Des journalistes de l'AFP sur place ont vu plusieurs maisons en flammes, touchées par des tirs de mortiers dans un quartier situé à trois kilomètres du centre-ville.

Elena Goura était dans sa maison quand un obus en a transpercé le toit, réduisant sa demeure en cendres. «Je ne sais pas ce que je vais faire. Je ne possède plus que ce que je porte sur moi», a-t-elle déclaré à l'AFP.

L'ONU a décompté 224 civils tués et 545 blessés durant les seules trois dernières semaines, condamnant mardi dans un communiqué «les bombardements aveugles sur les zones résidentielles, tant dans les zones contrôlées par le gouvernement que (dans celles contrôlées) par les groupes armés».

«Les civils sont pris dans des tirs croisés (...) et la situation empire chaque jour», a déclaré le Comité international de la Croix rouge (CICR) dans un communiqué publié mardi.

«Arrêter Poutine»

«Les habitants doivent se cacher dans les sous-sols pendant des jours et ceux qui tentent de leur venir en aide risquent leur vie», a déclaré le chef de la délégation du CICR en Ukraine, Michel Masson, cité dans le communiqué.

Selon Amnesty International, la population de Debaltseve est passée de 25 000 à 7000 personnes en quelques jours, ses habitants fuyant des conditions humanitaires «catastrophiques».

Au total, le conflit a fait plus de 5300 morts en dix mois. Les négociations de paix organisées samedi à Minsk ont échoué.

Si certains experts craignent que des livraisons d'armes américaines n'augmentent les risques d'une guerre totale entre l'Occident et la Russie, d'autres y voient le seul moyen d'arrêter l'extension du conflit.

«Cela va renforcer la puissance de l'armée ukrainienne et réduire la force de frappe des rebelles, permettant ainsi de réduire le nombre des victimes parmi les militaires et civils», a déclaré à l'AFP l'expert militaire ukrainien Olexi Melnik, du Centre Razoumkov de Kiev.

«La seule chose qui peut arrêter Poutine, c'est la force. Les sanctions économiques aident, mais leur effet se fera sentir sur le long terme», a-t-il poursuivi.