Une trêve fragile semblait se maintenir en Ukraine vendredi matin (jeudi soir à Montréal) malgré la mort de trois soldats ukrainiens tandis que le président Petro Porochenko a salué un «réel» cessez-le-feu ces dernières 24 heures.

«J'ai des informations positives. Aujourd'hui marque les premières 24 heures depuis sept mois (...) pendant lesquelles nous avons eu un réel cessez-le-feu en Ukraine», a-t-il déclaré au cours d'une visite officielle en Australie.

«Vous ne pouvez pas imaginer à quel point c'est important pour moi. C'est la première fois qu'on ne m'annonce pas qu'un soldat ukrainien a été tué ou blessé pendant la nuit», a-t-il ajouté.

Les pays proches de la Russie s'inquiétaient parallèlement d'une activité militaire russe «sans précédent» à leurs frontières.

Le premier ministre Arseni Iatseniouk a par ailleurs appelé à une conférence internationale de donateurs pour éviter un défaut de paiement du pays, dont l'économie est en très grande difficulté.

Le Fonds monétaire international (FMI) avait chiffré en novembre à 19 milliards de dollars les fonds supplémentaires nécessaires en 2015, en plus des 27 milliards de dollars d'aide internationale déjà promis, et a appelé les donateurs à accorder des fonds supplémentaires.

Signe des tensions dans la région, la Suède a réintroduit jeudi la possibilité d'appeler ses anciens conscrits à des exercices militaires, inquiète du «réarmement de la Russie», tandis que la Pologne a dénoncé une activité militaire russe «sans précédent» dans la Baltique.

Jeudi matin, un porte-parole militaire ukrainien avait annoncé que trois soldats avaient été tués et huit blessés en 24 heures. Il s'agissait des premières victimes depuis le début mardi de la nouvelle trêve qui avait été jusque là globalement respectée par l'armée et les rebelles.

Selon Kiev, les séparatistes prorusses ont aussi intensifié leurs attaques contre les positions ukrainiennes.

«Les rebelles ont violé la trêve à 22 reprises en 24 heures», avait indiqué le porte-parole. «Des chars et l'artillerie ont été utilisés. Nos forces n'ont pas répondu», a-t-il affirmé.

Des journalistes de l'AFP ont observé jeudi plusieurs bombardements près de Donetsk, principal fief rebelle, sans qu'il soit possible de déterminer quel camp tirait.

Plusieurs salves d'artillerie provenant du quartier de l'aéroport de Donetsk, théâtre de violents combats disputé par les belligérants depuis des mois, ont été audibles dans cette ville dans la matinée.

Quelques heures plus tard, un autre journaliste de l'AFP, situé dans le village de Pisky, qui sert de base aux Ukrainiens combattant à l'aéroport, a entendu des tirs d'armes lourdes.

À l'aéroport, presque totalement détruit par les combats, les positions ukrainiennes essuyaient des tirs à l'arme à feu. Les soldats ukrainiens ne ripostaient pas.

Les tirs d'artillerie rebelle sur l'aéroport «ont cessé complètement», a déclaré à l'AFP le commandant des forces ukrainiennes combattant à l'aéroport, se présentant sous le nom de guerre Coupol.

Ces incidents renforçaient les doutes sur la durabilité de cette nouvelle trêve - la quatrième en huit mois.

Une tendance «positive»

Les rebelles de leur côté ont affiché un certain optimisme. Un responsable séparatiste, Denis Pouchiline, a affirmé que les forces ukrainiennes avaient violé la trêve à cinq reprises en 24 heures et qu'il s'agissait uniquement d'armes à feu et non plus de bombardements.

«C'est une tendance positive par rapport à ce qu'on avait avant», s'est-il félicité.

Dans plusieurs localités hors Donetsk, la situation semblait plus calme qu'avant le cessez-le-feu.

La ville de Schastie dans la région voisine de Lougansk, souvent visée par des tirs des rebelles qui cherchent à obtenir le contrôle de sa centrale électrique, a passé la nuit de mercredi à jeudi paisiblement.

«Chez nous, la nuit comme le matin c'est un silence absolu», s'est réjoui un responsable de la mairie, Volodymyr Tiourine, contacté par téléphone.

Le président du «Parlement» de la République autoproclamée de Donetsk Andreï Pourguine a affirmé à l'AFP que les rebelles avaient commencé à retirer leurs armes lourdes de la ligne du front.

Pas de date pour la rencontre de Minsk

Sur le plan diplomatique, le suspense régnait toujours sur la date de nouvelles négociations de paix, initialement attendues cette semaine à Minsk pour trouver un apaisement plus durable au conflit, qui a fait plus de 4300 morts depuis avril.

«Pour l'instant, on ne sait pas quand la rencontre à Minsk aura lieu», a déclaré M. Pourguine.

Un porte-parole de la diplomatie russe Alexandre Loukachevitch a déclaré que les parties n'arrivaient pas à se mettre d'accord sur l'agenda des pourparlers.

M. Pouchiline avait déclaré mardi que les rebelles souhaitaient inclure à l'agenda un point sur la «levée du blocus économique» des régions de l'est.

Le gouvernement ne reprendra le financement de ces territoires qu'après en avoir repris le contrôle, a cependant averti jeudi le premier ministre Arseni Iatseniouk.

M. Iatseniouk doit se rendre lundi à Bruxelles pour rencontrer des responsables de l'Union européenne et de l'Otan.