Le président russe Vladimir Poutine, très attendu à Milan où il doit participer à un sommet Asie-Europe, a jeté un froid avant même son arrivée en menaçant les Européens, déjà transis par la débâcle boursière, de couper le robinet du gaz cet hiver.

Les dirigeants de l'Union européenne, rassemblés jeudi à Milan avec leurs homologues asiatiques, n'en espèrent pas moins des avancées sur l'Ukraine à l'occasion d'une rencontre entre les présidents russe et ukrainien vendredi matin, en marge du 10e sommet de l'Asem.

Ce forum entre l'Europe et l'Asie rassemble quelque 50 pays autour de la coopération économique et des échanges commerciaux. Mais cette année, le climat est loin d'être serein.

Les bourses européennes se sont effondrées jeudi, minées par les craintes liées à la Grèce et au marasme persistant de la zone euro. La Bourse de Milan a perdu jusqu'à près de 4% dans la matinée, avant de clôturer en baisse de 1,21%.

Le président François Hollande a mis cette nouvelle crise boursière en Europe sur le compte de la «stagnation en Europe» et des «incertitudes internationales». «D'où mon combat» pour renforcer la croissance et assurer les conditions de son retour, a-t-il expliqué.

Il faut davantage «investir sur la croissance et moins sur l'austérité», lui a fait écho le chef du gouvernement italien Matteo Renzi.

Mais en marge du sommet, c'est surtout la venue du président russe à Milan et les rencontres qu'il doit y faire qui attirent tous les regards, alors que les combats continuent à faire rage dans l'Est de l'Ukraine en dépit d'un cessez-le-feu conclu en septembre.

«Grands risques»

Vladimir Poutine devait avoir un entretien bilatéral avec la chancelière allemande Angela Merkel dès jeudi soir. Mais, selon une source gouvernementale allemande, ce rendez-vous pourrait être reporté compte tenu de l'arrivée tardive du président russe à Milan, en provenance de Belgrade.

La Russie veut évoquer à cette occasion l'Ukraine mais aussi la question de «l'approvisionnement sans interruption du gaz en Europe avant l'automne et l'hiver», a déclaré Iouri Iouchakov, conseiller du président russe.

Et sur ce point, le maître du Kremlin a refroidi l'atmosphère en avertissant depuis Belgrade que cet approvisionnement était loin d'être garanti. De «grands risques» de perturbations des livraisons de gaz cet hiver sont à craindre, faute d'accord dans le conflit gazier entre la Russie et l'Ukraine, a-t-il prévenu.

Les Européens espèrent régler ce problème mardi à Bruxelles, lors de négociations avec les Russes et les Ukrainiens.

Vladimir Poutine doit également s'entretenir avec son homologue ukrainien Petro Porochenko vendredi matin à la préfecture de Milan.

«C'est à la Russie de fournir la contribution décisive pour une désescalade» de la situation en Ukraine, a prévenu jeudi Mme Merkel.

Cette rencontre entre les présidents russe et ukrainien, qui ne se sont pas vus depuis fin août à Minsk, aura lieu en présence de plusieurs dirigeants européens dont Mme Merkel, M. Hollande, le premier ministre britannique David Cameron, le chef du gouvernement italien et les dirigeants de l'Union européenne Juan Manuel Barroso et Herman Van Rompuy.

La Russie veut y discuter des «raisons et des origines du conflit» en Ukraine et des «perspectives de processus de paix», a indiqué le conseiller de M. Poutine.

Outre l'Ukraine, d'autres sujets sont susceptibles de créer des frictions entre les Européens et certains pays asiatiques.

Le Japon, l'un des rares pays asiatiques à avoir décidé des sanctions contre la Russie, connaît toujours de fortes tensions avec la Chine, qui reste un des grands alliés de la Russie.

Les pays de l'Association des nations du sud-est asiatique (Asean) ont en revanche plusieurs conflits territoriaux avec la Chine qui empoisonnent leurs relations depuis des années.

La Thaïlande, membre de l'Asean, va profiter de ce sommet pour faire sa rentrée sur la scène internationale depuis le coup d'État militaire de Prayut Chan-O-Cha, le chef de la junte militaire thaïlandaise, le 22 mai dernier.

Cette première visite officielle en Occident depuis son coup d'État a provoqué la colère de plusieurs centaines de manifestants, qui se sont rassemblés jeudi dans le centre de Milan pour dénoncer sa présence.