Après sept mois de crise sans précédent avec Moscou, l'Ukraine entre en campagne pour élire un nouveau Parlement, un scrutin qui devrait se cristalliser autour de la politique d'apaisement du président proeuropéen Petro Porochenko, alors que des combats se poursuivent mardi dans l'Est.

Partis et candidats ont jusqu'à minuit pour s'enregistrer devant la commission électorale en vue des législatives du 26 octobre. Dans un pays en guerre, le scrutin ne pourra se dérouler dans les zones sous contrôle de la rébellion prorusse de l'est du pays (environ 3% du territoire ukrainien, mais 9% de la population) ni dans la péninsule de Crimée, annexée à la Russie au printemps.

Malgré une trêve consolidée le 20 septembre lors de négociations à Minsk entre Kiev, Moscou, les rebelles et l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), des combats intenses se poursuivaient mardi matin à l'arme lourde autour de l'aéroport de Donetsk, la principale ville aux mains des rebelles, ont rapporté des journalistes de l'AFP.

À Popasna, dans la région de Lougansk, des tirs de lance-roquettes multiples Grad par les rebelles ont touché une ambulance, faisant «des morts et des blessés», a déclaré le gouverneur de la région, Guénnadi Moskal.

La journée de lundi a été la plus meurtrière depuis le cessez-le-feu du 5 septembre, avec neuf morts dans les rangs de l'armée ukrainienne et quatre civils tués. Depuis le cessez-le-feu, au moins 57 personnes ont perdu la vie dans l'est de l'Ukraine, un chiffre à mettre en rapport avec plus de 3200 morts dénombrés depuis le début des affrontements en avril.

Après une contre-offensive prorusse en août, le président Porochenko s'est résigné à une trêve et à tendre la main aux indépendantistes qui rêvent de rattachement à la Russie. À son initiative, le Parlement ukrainien a offert mi-septembre un «statut spécial» aux régions prorusses, que les rebelles ont rejeté.

Ils ont par ailleurs refusé de participer au scrutin du 26 octobre, annonçant l'organisation de leurs propres élections législatives et présidentielles le 2 novembre.

Vis-à-vis de Moscou, Kiev et l'Union européenne ont fait une autre concession de taille en acceptant de repousser à fin 2015 l'entrée en vigueur de l'accord de libre-échange entre l'Ukraine et les Vingt-Huit.

Les ouvertures du président Porochenko lui valent d'acerbes critiques sept mois après la destitution de son prédécesseur prorusse Viktor Ianoukovitch.

Le «Bloc Porochenko» en tête

Mais le Parti des régions de l'ex-président, qui dominait le Parlement monocaméral sortant, a décidé de boycotter le scrutin, qui devrait donc donner lieu à un important renouvellement de la législature ukrainienne.

Selon un sondage effectué du 12 au 21 septembre par l'Institut international de sociologie de Kiev et la fondation Initiatives démocratiques, près de 40% des électeurs certains d'aller voter choisiraient le «Bloc Porochenko», créé pour soutenir le président, un ancien magnat du chocolat élu fin mai avec 55% des voix.

Plus de trente partis devraient présenter des candidats, mais seules les listes ayant obtenu 5% des voix peuvent participer au partage des 450 sièges parlementaires. L'autre moitié des députés sont élus au scrutin majoritaire à un tour.

En deuxième position, le sondage accorde 10% des voix au Parti radical du populiste Oleg Liachko, arrivé troisième à la présidentielle. L'égérie de la Révolution orange de 2004, Ioulia Timochenko, arriverait troisième avec moins de 8% des voix pour son parti.

L'actuel Premier ministre, Arseni Iatseniouk, dépasserait tout juste la barre des 5%, de même qu'un parti prorusse, Ukraine forte. Les communistes, prorusses également, resteraient en revanche sous les 5%.

Petro Porochenko a présenté la semaine dernière un programme de 60 réformes économiques et sociales pour permettre au pays, encore marqué par la corruption et les lourdeurs administratives héritées de l'ère soviétique, de déposer sa candidature à l'Union européenne à partir de 2020.