Trois cents camions d'aide humanitaire russe sont arrivés vendredi soir dans le bastion rebelle de Lougansk dans l'est de l'Ukraine, selon la télévision d'État russe, suscitant de vives condamnations en Occident, Kiev parlant d'«invasion».

L'OTAN a dénoncé «une violation flagrante» par la Russie de ses engagements internationaux et de la «souveraineté» de l'Ukraine. Washington a exigé que Moscou retire «immédiatement» son convoi humanitaire, sous peine de nouvelles sanctions.

L'envoi de ces 300 camions «constitue une violation de la souveraineté et de l'intégrité territoriale de l'Ukraine par la Russie», a déclaré le contre-amiral John Kirby, le porte-parole du Pentagone.

L'Union européenne a «déploré» la décision de Moscou, qui après une semaine d'attente, a unilatéralement décidé d'envoyer en Ukraine les camions blancs, chargés selon elle de 1800 tonnes d'aide humanitaire destinée à la population civile de l'Est de l'Ukraine. Mais selon Kiev ces camions seraient quasi vite.

Le Conseil de sécurité de l'ONU s'est réuni en urgence, à la demande de la Lituanie. À l'issue de ces consultations à huis clos, l'ambassadeur britannique Lyall Grant, en tant que président du Conseil, a fait état d'une «vaste inquiétude sur ce que beaucoup ont qualifié d'action illégale et unilatérale de la Fédération de Russie», pouvant conduire à une escalade.

«Il s'agit d'une invasion directe», avait plus tôt réagi le chef des services de sécurité ukrainiens Valentin Nalivaïtchenko, en promettant cependant que l'aviation ne bombarderait pas le convoi russe. «Nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour que cela n'ait pas de conséquences plus graves», a assuré le président ukrainien Petro Porochenko.

Kiev craint que ce convoi, qui se déplace en territoire rebelle en proie à des combats intenses, ne fasse l'objet d'une «provocation» qui pourrait servir de prétexte à une intervention militaire russe.

Le président russe Vladimir Poutine a expliqué que tout nouveau retard du convoi aurait été «inacceptable», dans un entretien téléphonique avec la chancelière allemande Angela Merkel.

Mme Merkel doit se rendre samedi à Kiev, où elle sera reçue par le président ukrainien Porochenko pour une visite hautement symbolique à la veille de la fête de l'indépendance de l'Ukraine qui donnera lieu à un défilé militaire dans la capitale.

Des véhicules vides selon Kiev

Après une semaine d'attente du côté russe de la frontière, les 300 camions blancs sont arrivés vendredi soir dans le fief rebelle de Lougansk, a annoncé la télévision d'État russe.

Les autorités de la ville ont à plusieurs reprises dénoncé une situation humanitaire «critique», car elle est sans eau courante, sans électricité et sans réseau téléphonique depuis bientôt trois semaines.

Les autorités ukrainiennes, dont les gardes-frontières n'ont pu inspecter que 34 des 300 camions, ont évoqué des «véhicules vides».

«Dans l'un des (camions) KamAZ qui peuvent transporter 25 tonnes, nous avons trouvé 800 kilogrammes de thé. Les 33 autres camions étaient chargés au maximum de huit tonnes» d'aide, a assuré le premier ministre ukrainien Arseni Iatseniouk.

La Croix-Rouge, qui devait se charger de la distribution de l'aide à Lougansk, n'a finalement pas accompagné le convoi, disant ne pas disposer de garanties suffisantes concernant sa sécurité.

L'offensive des forces ukrainiennes se poursuivait vendredi dans plusieurs localités autour des fiefs des insurgés de Donetsk et Lougansk, notamment pour le contrôle de la localité stratégique d'Ilovaïsk.

Un porte-parole militaire ukrainien a affirmé que deux colonnes d'équipements militaires lourds russes avaient été aperçues sur la route de Lougansk, dans les localités de Molodogardiïsk et de Davydo-Mykilske.

Consul honoraire tué

Le chef de la diplomatie lituanienne en visite à Kiev a annoncé, sur son compte Twitter, que le consul honoraire de son pays à Lougansk avait été «kidnappé et tué» par les rebelles prorusses, sans préciser quand.

Des centaines de personnes ont été enlevées par les séparatistes parmi lesquelles journalistes, militants pro-ukrainiens et observateurs internationaux depuis le début du conflit dans l'Est à la mi-avril, selon des associations de défense des droits de l'homme. Le conflit a fait plus de 2000 morts et 400 000 réfugiés et déplacés, selon l'ONU.

Sur le front diplomatique, le président ukrainien Petro Porochenko espère convaincre lors d'un sommet régional à Minsk mardi son homologue russe Vladimir Poutine de «retirer les combattants» rebelles de l'est du pays.

Le contrôle de la frontière russe est l'un des objectifs prioritaires de l'armée ukrainienne, par laquelle transitent, selon Kiev et certains pays occidentaux, armes et mercenaires qui vont renforcer les rangs des insurgés.