Une réunion de crise entre les ministres des Affaires étrangères russe et ukrainien a débuté dimanche soir à Berlin, pour éviter «une confrontation directe» entre les armées ukrainienne et russe, selon son hôte, alors que les combats se poursuivaient en Ukraine.

«Si nous ne faisons pas très attention (...) nous allons déraper toujours plus vers une confrontation directe entre forces armées ukrainiennes et russes», a déclaré le ministre allemand des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier, alors qu'il accueillait ses homologues russe Sergueï Lavrov, ukrainien, Pavlo Klimkine, et français, Laurent Fabius à Berlin. «Cela doit être évité à tout prix».

La réunion commencée vers 12h30 (heure de Montréal), doit «tenter de rendre possibles des avancées vers un cessez-le-feu», a ajouté le ministre allemand. Mais il n'y a «pas de garantie» de succès et les parties sont «loin d'une solution politique», selon lui.

«La priorité doit aller au respect de l'intégrité territoriale de l'Ukraine, à la fin des violences et à la relance du processus politique», a twitté M. Fabius en amont de la rencontre.

Sur place les combats intenses se poursuivaient. Dans la région de Lougansk, un avion de chasse ukrainien MiG-29 a été abattu par les séparatistes, a indiqué à l'AFP Léonid Matioukhine, porte-parole militaire ukrainien.

L'aide humanitaire russe destinée à l'Est de l'Ukraine, qui doit arriver précisément aux abords de Lougansk, était toujours bloquée dimanche. En dépit d'un accord trouvé samedi entre Kiev et Moscou sur ses modalités, l'inspection du convoi russe, qui doit être menée par le Comité international de la Croix-Rouge, peinait à démarrer.

À Donetsk, également le théâtre de violents combats, dix civils ont été tués en 24 heures, selon la mairie. Dans ce bastion séparatiste, l'eau courante doit être «entièrement coupée» à partir de dimanche 14h00 (heure de Montréal), a averti la mairie, incriminant des dégâts sur une ligne électrique.

Livraison d'armes et arrivée de mercenaires

Ces développements ne contribuaient pas à apaiser les tensions, très fortes depuis que Kiev avait affirmé vendredi avoir en partie «détruit» une colonne de blindés russes.

L'incursion de cette colonne, vue par des journalistes britanniques et confirmée par Kiev, a provoqué une vague de réactions indignées en Occident.

«Il est extrêmement important d'arrêter les flux d'armes et de mercenaires en provenance de Russie», a appelé dans un message sur Twitter dans la journée, M. Klimkine.

Dans un entretien téléphonique samedi, le vice-président américain, Joe Biden, et le président ukrainien, Petro Porochenko, ont estimé que l'envoi de blindés russes et d'armes sophistiquées aux forces séparatistes n'était pas compatible avec le souci humanitaire affiché.

Mais Moscou accuse Kiev de «détruire des fantômes». «Nous avons répété à plusieurs reprises que nous ne livrons aucun équipement militaire là-bas», a de nouveau affirmé dimanche le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.

Le «premier ministre» séparatiste, Alexandre Zakhartchenko, s'est pourtant vanté dans une vidéo diffusée vendredi d'avoir reçu matériel et personnel militaires à foison, ajoutant qu'ils arrivaient «au moment le plus crucial». L'armée ukrainienne a aussi dénoncé dimanche des arrivées en Ukraine de lance-roquettes venus de Russie et des violations de l'espace aérien.

Mouvement du convoi russe

La saga du convoi humanitaire russe soupçonné par Kiev et l'Occident d'être envoyé pour servir de prétexte à une intervention russe était loin d'un dénouement dimanche.

L'inspection officielle du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) qui devrait lui permettre de franchir la frontière ukrainienne n'a pas commencé, ont expliqué à l'AFP des porte-parole du CICR. Ce sera le cas «peut-être demain ou après-demain», a précisé à l'AFP Paul Picard, responsable de l'OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe) présent à la frontière.

Seize des quelque 300 camions russes bloqués depuis jeudi à une trentaine de kilomètres de la frontière, dans la localité russe de Kamensk-Chakhtinski, sont arrivés dimanche au poste-frontière russe de Donetsk.

«C'est sûrement une façon de faire pression», a critiqué une source occidentale proche du dossier interrogée par l'AFP.

«Il serait bon que l'aide humanitaire arrive là où l'on a besoin d'elle», a estimé à Berlin M. Steinmeier, mais selon lui «le vrai drame» est ailleurs, à savoir qu'«aucun des accords trouvés jusqu'ici (...) n'a été respecté».

PHOTO DMITRY SEREBRYAKOV, AFP

L'aide humanitaire russe destinée aux populations de l'est de l'Ukraine ravagé par les combats était toujours bloquée dimanche à la frontière.

Photo TOBIAS SCHWARZ, AFP

Le ministre allemand des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier (2e à partir de la droite) accueillait ses homologues russe Sergueï Lavrov, ukrainien, Pavlo Klimkine, et français, Laurent Fabius à Berlin.