Confrontés à l'offensive militaire de Kiev et au tarissement des volontaires venus de Russie, les séparatistes de Donetsk recrutent pêle-mêle étrangers, femmes et même mineurs.

Donetsk, Ukraine - «Nous acceptons tous ceux qui viennent nous voir avec le désir de défendre leur patrie», explique Sergueï Mozg, l'un des dirigeants de la «brigade Vostok», un groupe séparatiste prorusse.

La Presse a pu vérifier que plusieurs adolescents ont été entraînés par la brigade au maniement d'armes de guerre, en particulier au tir à la Kalachnikov. Un combattant volontaire de Vostok confirme la présence d'adolescents dans la brigade.

«Andreï a 15 ans. Il porte effectivement une Kalachnikov», indique l'homme, qui préfère taire son nom. «Andreï faisait partie d'un club d'éducation patriotique et militaire et il est venu chez nous avec son professeur. Son père aussi combat parmi nous.»

Malgré son jeune âge, le garçon a déjà l'expérience du feu. «La semaine dernière, Andreï est monté au front avec nous en tant que renfort sur une mission de combat, mais n'a pas eu à se battre. Il a tout de même essuyé un bombardement et découvert la peur», ajoute le combattant deVostok.

Jusqu'ici connue sous le nom de «bataillon Vostok», cette organisation armée dirigée par l'ancien patron régional du commando d'élite ukrainien «Alfa» Alexandre Khodakovski, compte désormais 1200 combattants. Sergueï Mozg ne cache pas qu'une partie des volontaires viennent de Russie.

«Nous avons aussi parmi nous des Occidentaux. En ce moment, ce sont des Espagnols. Mais nous avons aussi eu des Belges, des Canadiens, des Italiens, des Cubains et des Vénézuéliens durant la première rotation en juin, dit-il, refusant de donner des chiffres précis. La plupart son repartis. Ils étaient parmi nous durant la première rotation en juin. Où sont-ils maintenant? Je ne saurais le dire.»

La pression monte sur les séparatistes

Donetsk attend un assaut imminent des forces loyales à Kiev. Dos au mur, les rebelles prorusses ont promis de ne reculer devant aucun sacrifice pour conserver le contrôle de cette ville de 1 million d'habitants, désormais encerclée par l'armée ukrainienne. Le hic: les renforts de combattants venus de Russie se sont taris depuis l'offensive ukrainienne de la semaine dernière et les pertes en combattants - dont le chiffre est tenu secret - doivent être compensées.

Les différentes formations armées défendant la «République populaire de Donetsk» (RPD) sont donc de moins en moins regardantes sur les méthodes de recrutement. Femmes, étrangers, même des adolescents, tout est bon à prendre, car les habitants de Donetsk sont loin de se précipiter pour défendre la RPD. Selon diverses estimations, de 30 à 60% de la population a fui la guerre. Restent principalement ceux qui n'ont pas assez d'argent pour partir, ou veulent conserver leur travail. Les hommes en âge de combattre qui ne se sont pas déjà engagés chez les séparatistes rasent les murs et craignent d'être enrôlés de force. Beaucoup de rebelles ne cachent plus leur hostilité envers des civils qu'ils prétendent protéger au prix de leur vie contre la «junte fasciste de Kiev».

Kiev aussi se dépêche de renforcer son armée. La menace d'une intervention russe et le désir d'étouffer l'insurrection avant l'hiver poussent le gouvernement à mobiliser massivement. Selon Andriï Paroubiï, qui dirige le Conseil national pour la sécurité et la défense, la Russie a massé 40 000 soldats et 150 chars à la frontière avec l'Ukraine.

Kiev dénonce des bombardements de l'artillerie russe sur les positions ukrainiennes chargées de contrôler la frontière, ainsi que des incursions illégales de l'aviation militaire russe dans son espace aérien. Les séparatistes totaliseraient 15 000 hommes, contre 40 000 pour les forces loyales à Kiev, selon le ministre de la Défense ukrainien Valeri Gueleteï.

Photo ZURAB DZHAVAKHADZE, AFP