La colère gronde dans le monde contre les séparatistes prorusses qui se sont précipités pour enlever les corps de victimes de l'accident dans l'est de l'Ukraine, Washington accusant les Russes de leur avoir fourni le missile qui a abattu l'avion malaisien.

Paris, Londres et Berlin ont menacé la Russie de nouvelles «sanctions» si le président Vladimir Poutine n'obtient pas des rebelles un accès «libre et total» au site où s'est écrasé le Boeing 777 qui assurait la liaison Amsterdam-Kuala Lumpur avec 298 personnes à bord.

Le secrétaire d'État américain John Kerry a pour sa part déclaré dimanche qu'il existait «des preuves circonstancielles extraordinaires» de la responsabilité de la Russie et des séparatistes prorusses sans toutefois les accuser directement d'avoir lancé le missile.

Sur les lieux du drame gardés par les rebelles armés, qui en empêchent l'accès depuis trois jours, les corps ont disparu dimanche matin.

Corps dans un train réfrigéré 

Quelques heures plus tard, un chef rebelle, Alexandre Borodaï a expliqué que ce déplacement des dépouilles mortelles avait pour but de les protéger de la chaleur et des animaux sauvages.

«Cent cinquante-six corps ont été déplacés à Torez (une ville proche du site de l'écrasement - ndlr) dans des wagons réfrigérés» et «ils ne vont nulle part, ils restent à Torez en attendant que les experts arrivent», a-t-il ajouté sans donner de renseignements sur les autres corps.

Un journaliste de l'AFP a constaté dimanche après-midi que le convoi comprenant cinq wagons réfrigérés sans fenêtres stationnait à Torez, le moteur de la locomotive tournant pour alimenter le système de refroidissement. Aucune garde n'était visible aux alentours.

John Kerry a dénoncé une situation «grotesque» en citant les cas «de soldats séparatistes en état d'ébriété empilant des corps dans des camions, soustrayant des corps et des indices du site».

«La Russie se doit de faire quelque chose», a-t-il plaidé en parlant «d'un moment de vérité» pour Vladimir Poutine.

Dans un entretien téléphonique avec Angela Merkel, le président ukrainien Petro Porochenko a aussi dénoncé des cas «de pillage et de vol de cartes de crédit» que la chancelière allemande a jugés «inacceptables», selon la présidence ukrainienne.

Mme Merkel, le président français François Hollande et le premier ministre britannique David Cameron ont exigé auprès de Vladimir Poutine «qu'il obtienne des séparatistes ukrainiens que les secours et les enquêteurs aient enfin libre et total accès à la zone de la catastrophe».

«Si la Russie ne prend pas immédiatement les mesures nécessaires, les conséquences en seront tirées par l'Union Européenne à l'occasion du Conseil des Affaires étrangères qui aura lieu mardi», mettent-ils en garde.

«Les Russes tentent de s'en laver les mains»

La veille, plusieurs pays ont exprimé leur «indignation» face à la gestion du site, craignant une falsification de preuves.

Mark Rutte, premier ministre des Pays-Bas dont 193 citoyens ont péri dans l'accident, a sommé le président Poutine de «prendre ses responsabilités à l'égard des rebelles» soutenus par Moscou alors qu'un ministre malaisien a dénoncé «une trahison» à l'égard des victimes de la tragédie.

Tony Abbott, le premier ministre d'Australie dont 28 ressortissants étaient à bord du MH17 a accusé la Russie de vouloir «s'en laver les mains». «Mais il leur est impossible de s'en laver les mains alors que quelque chose est arrivé en territoire contrôlé par les Russes, et était provoqué visiblement par des individus soutenus par les Russes, avec vraisemblablement un armement fourni par les Russes».

Il a laissé entendre que Vladimir Poutine ne serait pas le bienvenu au sommet du G20 en Australie en novembre s'il ne coopérait pour favoriser un bon déroulement de l'enquête.

La participation de la Russie aux réunions du G8 avait déjà été suspendue après l'annexion de la péninsule ukrainienne de la Crimée en mars.

«Lockerbie ukrainien»

Dimanche, un dirigeant séparatiste a conditionné le travail d'experts internationaux sur le site à un cessez-le-feu conclu entre les autorités de Kiev et la république séparatiste de Donetsk autoproclamée (DNR).

Cet appel risque de ne pas être suivi d'effet, le président ukrainien Petro Porochenko ayant demandé la veille à plusieurs dirigeants occidentaux de reconnaître la DNR comme «organisation terroriste».

«Nous ne voyons pas de différence entre les événements en Ukraine et le 11 Septembre aux États-Unis ou la tragédie de Lockerbie» lorsqu'un avion assurant la liaison Londres-New York explosa en vol et causa la mort de 270 personnes en 1988, un attentat dont a été accusée la Libye de Mouammar Kadhafi, a-t-il souligné dans un entretien téléphonique avec le président français François Hollande.

Il a assuré disposer de «preuves irréfutables» de la responsabilité des rebelles dans le drame, dont des images satellitaires.

Un des chefs des insurgés, Alexandre Borodaï, a déclaré dimanche qu'ils avaient trouvé «certains matériels qui pourraient être les boîtes noires» et a dit être prêt à les remettre aux experts internationaux.

Photo MAXIM ZMEYEV, REUTERS

Des prorusses pourraient avoir trouvé les «boîtes noires»

Les rebelles prorusses ont trouvé «certains matériels qui pourraient être les boîtes noires» de l'avion malaisien probablement abattu par un missile jeudi dans l'est de l'Ukraine, a annoncé dimanche un de leurs chefs, Alexandre Borodaï.

Il a affirmé être prêt à les remettre aux experts internationaux chargés d'élucider les causes de l'écrasement, expliquant que les rebelles «n'avaient pas de spécialistes pour les analyser» et ne faisaient «pas confiance» aux experts ukrainiens. «Ces éléments sont à Donetsk et entre mes mains», a-t-il précisé.

Auparavant, les rebelles avaient affiché leur intention d'envoyer les boîtes noires à Moscou pour qu'elles soient décryptées par des experts russes.

L'un des deux enregistreurs de vol permet de réentendre les conversations de l'équipage et l'autre contient toutes les données techniques du vol. Cependant, il est peu probable qu'ils puissent contenir des renseignements permettant de déterminer l'origine du tir qui a vraisemblablement détruit le Boeing malaisien, tuant tous ses 298 occupants.

Les États-Unis ont déclaré que selon les renseignements en leur possession, le missile est parti de la zone contrôlée «par les rebelles appuyés par la Russie».