L'Ukraine a réclamé mardi l'aide de la communauté internationale pour l'élection présidentielle du 25 mai, dont la tenue apparaît de plus en plus menacée par la spirale de violences séparatistes qui a saisi le pays.

«Le gouvernement ukrainien est engagé à tenir l'élection présidentielle à la date prévue», a déclaré le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Andriï Dechtchitsa à l'issue d'une réunion du Conseil de l'Europe à Vienne.

Les autorités de Kiev ont requis l'envoi «d'observateurs internationaux en Ukraine pour surveiller les élections». Elles demandent aussi à leurs partenaires de faire «tout ce qui est possible pour éliminer les menaces et provocations extérieures soutenues par la Russie en Ukraine, pour que ces élections puissent se dérouler de façon libre et démocratique», a-t-il ajouté.

De son côté, le président de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), Didier Burkhalter, qui doit rencontrer mercredi à Moscou le président russe Vladimir Poutine, a appelé à «un cessez-le-feu pour les élections».

Ce scrutin doit permettre l'élection du successeur du président Viktor Ianoukovitch, un proche de Moscou renversé en février.

La Russie, qui refuse de reconnaître les autorités provisoires mises en place depuis à Kiev, a déjà fait savoir qu'elle jugeait «absurde» de tenir des élections dans le contexte actuel de violences.

Par ailleurs, le secrétaire d'État américain John Kerry a dénoncé l'organisation annoncée par des séparatistes pro-russes dans l'Est de l'Ukraine d'un référendum le 11 mai.

«Nous n'allons pas rester les bras ballants pendant que des éléments russes attisent les flammes de l'instabilité», a déclaré John Kerry, dénonçant un «simulacre» de référendum à Donetsk et Lougansk.

«Nous rejetons tout simplement toute cette tentative illégale de diviser davantage l'Ukraine. La poursuite de cette initiative va encore plus contrarier les efforts de désescalade», a-t-il déclaré aux journalistes.

Le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov s'est en outre montré réticent à une proposition allemande de conférence de «Genève II» en vue d'une désescalade. «Se réunir à nouveau dans ce format (...) n'apporterait pas grand-chose», a-t-il jugé à Vienne.

Risque pour la sécurité de l'Europe

Les Occidentaux se montrent de plus en plus alarmés par la tournure prise ces derniers jours par les événements en Ukraine, où des dizaines de personnes ont péri dans des violences depuis vendredi.

«Si (l'élection présidentielle) ne se tenait pas, ce serait le chaos et le risque de guerre civile», a estimé le président français François Hollande mardi.

«Les images qui nous parviennent sont effrayantes et nous ne sommes plus très éloignés d'une confrontation militaire en Ukraine», a estimé le ministre allemand des affaires étrangères Frank-Walter Steinmeier.

«Personne ne devrait se méprendre et croire qu'il n'y a un risque et une menace que pour l'Ukraine. À travers ce conflit, c'est toute l'architecture de la sécurité de l'Europe qui pourrait être détruite», a-t-il mis en garde.

Le professeur Michael Clarke, directeur général de l'Institut Royal United Services Institute à Londres, estime lui aussi que l'Ukraine entre dans «une période très dangereuse» à l'approche du 25 mai.

«Il est dans l'intérêt de Moscou de diminuer la crédibilité de ces élections et aussi de mettre en place des élections et référendums fantômes dans les territoires séparatistes d'Ukraine», commente-t-il.

La Russie répète de son côté que l'Ukraine est en proie à des «forces ultranationalistes, extrémistes et néonazies» et réfute toute implication directe.

Les services de sécurité (SBU) ont conseillé mardi aux Ukrainiens d'être sur leurs gardes et ont mis en garde Ioulia Timochenko, ex-chef du gouvernement et candidate à la présidentielle, sur «une sérieuse menace contre sa vie», a indiqué son avocat, Serguiï Vlasenko.

Blocs de béton

Le bassin minier du Donbass, frontalier de la Russie, est actuellement la zone la plus touchée par les troubles séparatistes, mais Odessa (sud) a également été affectée ces derniers jours avec un incendie criminel qui a coûté la vie, vendredi, à une quarantaine de militants pro-russes.

À Slaviansk même, épicentre des affrontements qui opposent les pro-russes aux forces régulières ukrainiennes, quelques rafales ont retenti mardi alors que les rebelles renforçaient leurs défenses avec des blocs de béton. La ville voisine de Kramatorsk en revanche paraissait calme, ont rapporté des correspondants de l'AFP.

Lundi, d'intenses combats à l'arme lourde s'étaient déroulés à la périphérie de Slaviansk, faisant quatre morts et 20 blessés du côté de l'armée qui a également perdu son quatrième hélicoptère, selon des sources officielles. Dans le camp adverse, «plus de 30 terroristes ont été tués et des dizaines blessés», a indiqué le ministre de l'Intérieur, Arsen Avakov.

Les insurgés ont pris ces dernières semaines le contrôle de bâtiments publics dans une douzaine de villes, y compris dans les chefs-lieux régionaux de Donetsk et Lougansk, et les manifestations et incidents violents s'y sont multipliés.

Washington dénonce un projet de référendum «bidon» dans l'est

Les États-Unis se sont dits mardi «inquiets des efforts déployés par des groupes pro-russes» pour organiser «un référendum bidon» le 11 mai dans l'est de l'Ukraine.

La porte-parole de la diplomatie américaine Jennifer Psaki a fait allusion mardi au référendum en Crimée qui avait abouti le 16 mars au rattachement de cette péninsule à la Russie: «On est en train de répéter le scénario de la Crimée», a-t-elle alerté.

«Les États-Unis sont inquiets des efforts déployés par des groupes séparatistes à Donetsk et Lougansk pour organiser un référendum bidon», a-t-elle déclaré lors de son point de presse quotidien.

Le chef indépendantiste de la république autoproclamée de Donetsk, Denis Pouchiline, a affiché fin avril son intention d'organiser un référendum le 11 mai portant «sur la déclaration d'indépendance» de ce territoire situé au sud-est de l'Ukraine.

«À l'issue de ce vote», avait-il expliqué sans douter de l'issue de ce scrutin dénoncé comme illégal par Kiev et la communauté internationale, «il y aura des élections libres pour décider qui dirigera cette République populaire».

L'Ukraine a réclamé mardi l'aide de la communauté internationale pour l'élection présidentielle du 25 mai, dont la tenue apparaît de plus en plus menacée par la spirale de violences séparatistes qui secoue le pays.

La secrétaire d'État adjointe pour l'Europe Victoria Nuland a expliqué que la présidentielle sera «l'élection la plus pluraliste jamais organisée en Ukraine».

Cette élection sera «bien plus pluraliste qu'en Russie», a-t-elle ajouté lors d'une conférence devant l'Institut américain de la paix, un groupe de réflexion installé à Washington.

La responsable américaine a fait part de son inquiétude sur la possibilité pour les gens vivant dans l'Est de l'Ukraine de «voter pour leur candidat» au vu des tensions avec les milices pro-russes qui ont pris la tête de plusieurs villes.

La Russie, qui refuse de reconnaître les autorités provisoires mises en place à Kiev, a déjà fait savoir qu'elle jugeait «absurde» de tenir des élections dans le contexte actuel de violences en Ukraine.

«Si la Russie passe à la prochaine étape» et entre dans l'est de l'Ukraine pour l'annexer, «de sévères sanctions européennes et américaines suivront», a une nouvelle fois mis en garde Jennifer Psaki.