La Russie a dénoncé mardi un retour de la politique du «Rideau de fer» après les sanctions que lui a infligées l'Occident pour son rôle dans la crise en Ukraine, alors que l'est du pays restait sous haute tension mardi après une série de violences.

Le Journal officiel de l'UE a dévoilé mardi la liste des personnes considérées comme étant «responsables d'actions qui compromettent ou menacent l'intégrité territoriale, la souveraineté et l'indépendance de l'Ukraine», dans laquelle figurent les chefs de groupes séparatistes dans l'est de l'Ukraine.

Le chef d'état-major de l'armée russe et le patron du renseignement militaire en font partie.

Les Américains avaient déjà annoncé lundi des sanctions touchant sept responsables russes et 17 sociétés, jugés proches du président Poutine.

Washington va également revoir les conditions d'autorisation à l'exportation en Russie de certains équipements de haute technologie qui pourraient avoir un usage militaire, a indiqué la Maison-Blanche.

Le Canada, de son côté, a annoncé une nouvelle série de sanctions visant deux banques et neuf hauts dirigeants accusés d'être impliqués dans la crise ukrainienne.

La Russie a dénoncé mardi ces mesures. Les États-Unis ressuscitent la politique occidentale du «Rideau de fer» à l'égard de la Russie, s'est indigné mardi le vice-ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Riabkov.

«Cela frappe nos entreprises et nos secteurs de hautes technologies. C'est le retour du système créé en 1949, quand les pays occidentaux avaient abaissé le Rideau de fer sur les livraisons de hautes technologies à l'URSS et à d'autres pays», a-t-il déclaré.

Il est surprenant de voir Moscou reprendre l'expression «rideau de fer», utilisée pendant des décennies par les Occidentaux pour dénoncer la séparation entre l'Est et l'Ouest de l'Europe instaurée par l'URSS.

Les Occidentaux accusent Moscou de jeter de l'huile sur le feu en Ukraine et de procéder à des mouvements de troupes suspects à sa frontière occidentale. Selon l'OTAN, elle aurait massé jusqu'à 40 000 troupes à la frontière ukrainienne.

Lundi, tout en promettant de répliquer à son tour par des mesures «douloureuses» pour Washington, le ministre de la Défense Sergueï Choïgou avait cependant assuré son homologue américain Chuck Hagel lundi soir que «les forces russes n'envahiraient pas l'Ukraine».

«La Russie a été contrainte de lancer des manoeuvres d'envergure près de la frontière avec l'Ukraine face à la perspective d'une action militaire (ukrainienne) contre les civils. (...) Dès que les autorités ukrainiennes ont déclaré qu'elles n'allaient pas utiliser les unités militaires régulières contre la population non armée, les troupes russes sont rentrées dans leurs casernes», a déclaré le ministre russe.

M. Choïgou a également «catégoriquement démenti la présence de groupes de sabotage russes dans le sud-est de l'Ukraine».

«Nous n'avons pour l'instant aucun signe indiquant qu'il y ait un risque imminent d'invasion de la Russie en Ukraine», a estimé lundi à Oslo le chef de la diplomatie allemande, Frank-Walter Steinmeier, même s'il a indiqué y voir «une menace évidemment».

«Mais comment la situation va-t-elle se développer? C'est très difficile à dire. Je ne sais même pas ce qui va se passer dans les jours qui viennent, sans parler des prochaines semaines», a-t-il ajouté.

Le maire de Kharkiv évacué

Dans l'est de l'Ukraine, la situation restait tendue après les violences et les incidents de la veille et alors que le sort des observateurs de l'OSCE détenus par des pro-russes n'est toujours pas réglé.

Le maire pro-russe de Kharkiv Guennadi Kernes, gravement blessé dans un attentat lundi dans sa ville, a été évacué en Israël pour des soins, a indiqué un représentant de la municipalité sur sa page Facebook.

Jugé «transportable» par les médecins, il a été conduit à l'aéroport dans la nuit, a-t-il indiqué. Il est à présent soigné à l'hôpital de Elisha à Haïfa. «Il semble qu'il n'aura pas besoin de nouvelles opérations chirurgicales», a indiqué l'établissement dans un communiqué.

À Slaviansk, bastion rebelle de l'Est qui échappe depuis plus de deux semaines au contrôle de Kiev, de nouvelles négociations pour la libération des sept observateurs étrangers de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et de leurs 4 accompagnateurs ukrainiens détenus par des insurgés pro-russes étaient attendues.

«Tous sont vivants et en bonne santé», avait affirmé lundi le maire autoproclamé de Slaviansk, Viatcheslav Ponomarev. L'OSCE s'est réunie lundi en session extraordinaire et le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a exigé leur libération immédiate.

Les rebelles de Slaviansk détiennent également depuis dimanche trois officiers ukrainiens, qu'ils accusent d'espionnage.

Les tensions entre pro-russes et pro-ukrainiens sont également vives dans d'autres villes de la partie orientale du pays. Lundi, des militants pro-russes s'étaient emparés de la mairie de la ville de Kostiantynivka où ils ont hissé le drapeau de la «république de Donetsk».

Au total, les forces pro-russes occupent des bâtiments officiels (mairie, siège de la police et des services de sécurité) dans une douzaine de villes.

Lundi soir, une manifestation en soutien à l'unité de l'Ukraine à Donetsk a été attaquée par des militants pro-russes armés de matraques et de couteaux. Une quinzaine de personnes ont été blessées. La police a libéré dans la nuit cinq manifestants qui étaient retenus par des militants pro-russes, a indiqué le service de presse de la région de Donetsk.