Brian et Shannon Engel se sont recueillis avec le président des États-Unis, Barack Obama. Depuis vendredi, ils sont murés chez eux, n'écoutent pas les informations, ne lisent pas les journaux, ne vont pas sur l'internet.

C'était leur première sortie depuis le drame.

Ce jour-là, leur monde s'est effondré. Comme tous les parents, à 9h55, ils ont reçu un appel automatisé qui leur annonçait qu'un drame s'était produit à l'école primaire du village, que fréquentait leur fille Olivia Rose, 6 ans.

«Bonjour, ici le surintendant des écoles publiques de Newtown. En raison d'informations au sujet d'une fusillade, qui ne sont pas confirmées pour l'instant, toutes les écoles sont verrouillées jusqu'à ce que nous nous soyons assurés de la sécurité de tous nos élèves. Merci», disait le message enregistré.

À 11h24, les parents des élèves de l'école Sandy Hook ont reçu un autre message.

«Si vous ne l'avez pas encore fait, vous devez vous rendre au poste des pompiers de Sandy Hook immédiatement pour récupérer votre enfant. Toutes les autres écoles demeurent verrouillées», disait ce message.

Ils se sont donc rendus au poste. Ils y ont passé la journée.

«Ils ont attendu jusqu'à 20h. Sans nouvelles, ils ont dû se rendre à l'évidence», a expliqué John Engel, cousin de Brian.

«C'est une famille très discrète. Toute leur attention est portée sur leur fille et son petit frère de 3 ans, qui est toujours bien en vie. Ils n'ont pas du tout parlé de l'incident encore. Ce qui s'est passé, ce qui se passait dans la tête du tueur, c'est le souci de la nation, pas le leur», a ajouté M. Engel.

Brian Engel est enfant unique. Il est donc très proche de ses cousins. Sa cousine Gretchen Geartsen a passé le week-end auprès de la famille. Elle non plus ne lit pas les journaux depuis vendredi. On y parle beaucoup de contrôle des armes à feu, comme après chaque tuerie du genre.

«On peut spéculer sur les causes, ce qui aurait pu prévenir ça, mais il est trop tard pour ces enfants. La question du contrôle des armes n'est pas la première qui me vient à l'esprit. Oui, il faut en parler, mais rien ne peut arrêter une personne dérangée qui a quelque chose en tête. S'il n'a pas de fusil, ce sera autre chose. C'est une question de santé mentale», croit-elle.

Tout ce qu'il lui reste d'Olivia, ce sont de beaux souvenirs. «C'était une petite fille délicate et enthousiaste. Si on était généreux avec elle, elle faisait plus que nous remercier, elle était reconnaissante pour toujours. Elle était un modèle parfait pour son petit frère.»

Les proches de la famille Engel ont mis sur pied un fonds d'aide pour la famille et les victimes de la tuerie afin de les aider à préparer les funérailles. Celles d'Olivia Rose auront lieu vendredi prochain à l'église catholique Sainte-Rose-de-Lima, à Newtown, où ont eu lieu les plus importantes cérémonies depuis le drame.

Sur la page Facebook du fonds d'aide, on a publié une longue description d'Olivia Rose.

«Olivia Rose Engel était une petite fille de 6 ans précoce et attachante. Elle adorait son école, excellait en mathématiques et en lecture. Elle était créative et aimait les cours d'art, pratiquait plusieurs sports et activités comme le tennis, la natation, le ballet, le soccer (...). Rien n'était un obstacle pour cette fillette qui adorait les couleurs rose et violet, et l'agneau farci. Elle adorait faire des balades en bateau sur le lac ou sur la baleinière de son grand-père. Elle était patiente et une merveilleuse grande soeur pour son petit frère de 3 ans, Brayden. Olivia était intelligente, pétillante, et incroyablement divertissante. Sa perte physique sera perceptible chaque jour, mais son esprit brillant nous accompagnera.»

La majorité des enfants qui sont tombés sous les balles habitaient dans le même secteur, au sud-ouest de l'autoroute 84 et du village de Sandy Hook. Un quartier densément boisé aux demeures très cossues dans la plupart des cas, où l'on dirait que la vie enfantine vient tout juste de s'arrêter.

D'imposants modules de jeu, qui ont vu s'amuser les petites victimes, trônent près de chacune d'elles. Des jouets y traînent encore négligemment sur le gazon.

La Presse s'est entretenue avec des proches de presque tous les petits disparus. Ils ont tous préféré ne pas donner d'entrevue à la caméra. Mais, au cours de quelques échanges, pour la plupart courtois, ils ont remercié le public pour le soutien qui leur est adressé. Certains se sont toutefois plaints du travail de reporters trop insistants.

«Il est trop tôt pour ça. La douleur est vive, nous ne sommes pas prêts», a dit la mère du petit Daniel Barden, 7 ans.

Samedi, le père d'Emilie Parker, Robert, a donné un bref point de presse improvisé.

«Le monde est aujourd'hui un meilleur endroit parce qu'elle y a vécu, a-t-il dit avant d'ajouter un mot pour la famille d'Adam Lanza. Je ne peux imaginer à quel point cette expérience doit être dure pour eux, et je veux que vous sachiez que notre amour et notre soutien vous sont adressés aussi.»