Le chef des Nations unies en Afrique de l'Ouest, Saïd Djinnit, s'est déclaré jeudi «surpris» par un rapport d'Amnesty International critiquant l'ONU en Côte d'Ivoire pour son «inaction» afin d'empêcher des tueries commises fin mars à Duékoué dans l'ouest du pays.

«Je suis surpris de cette déclaration», a affirmé M. Djinnit lors d'une rencontre avec la presse étrangère à Dakar, car, selon lui, l'Opération de l'ONU en Côte d'Ivoire (Onuci) «a déployé toutes les dispositions pour assurer la protection des citoyens» ivoiriens.

Dans son rapport publié mercredi sur les crimes commis en Côte d'Ivoire pendant six mois par les partisans du président Alassane Ouattara et de son rival déchu Laurent Gbagbo, Amnesty a critiqué «l'inaction» de l'Onuci, «basée à seulement un kilomètre du principal lieu des tueries commises à Duékoué».

L'organisation a fait état du meurtre de centaines d'hommes à Duékoué par les forces pro-Ouattara après la prise de la ville.

M. Djinnit, représentant spécial du secrétaire général de l'ONU pour l'Afrique de l'Ouest, s'est également inquiété «du mouvement de groupes armés entre la Côte d'Ivoire et le Liberia au moment où ce pays entre dans une phase sensible» avant les élections générales prévues en octobre.

Le gouvernement libérien a fait état de l'arrestation récente sur son territoire de plusieurs de ses ressortissants, accusés d'être des mercenaires ayant participé aux violences post-électorales en Côte d'Ivoire.

Avant des scrutins prévus de 2011 à 2013 dans plusieurs Etats d'Afrique de l'Ouest, M. Djinnit a estimé que «les leçons doivent être tirées» de l'expérience ivoirienne, car «des dérapages sont possibles dans tous les pays».

«Les leaders doivent accepter la défaite. Il faut travailler sur la gouvernance et le leadership, s'assurer du consensus des parties prenantes à chaque étape» du processus électoral, a-t-il dit, rappelant que, selon lui, en Côte d'Ivoire, «Gbagbo n'a pas accepté le jeu de la certification» des résultats par l'Onuci en dépit d'un «accord» en ce sens.

Il s'est néanmoins réjoui que «la tendance» des chefs d'Etat de l'Afrique de l'Ouest «à se maintenir au pouvoir» soit «battue en brèche par les mouvements sociaux et démocratiques».

À propos de la Guinée où l'opposant Alpha Condé est devenu en novembre 2010 le premier président démocratiqument élu après 50 ans de régimes dictatoriaux ou autoritaires, M. Djinnit a souhaité «un espace de dialogue» entre le pouvoir et l'opposition «pour que les choses se passent plus paisiblement».

L'adversaire d'Alpha Condé, Cellou Dalein Diallo, qui avait reconnu sa défaite, a, depuis, dénoncé une dérive autoritaire du nouveau président, ce dont ce dernier se défend.

La Guinée «sort de 50 ans de dictature», a rappelé Saïd Djinnit. «Il ne faut pas espérer que tout se fasse de façon irréprochable», a-t-il dit, estimant que le président Condé «est animé par un désir de rupture avec le passé».

Les chefs de mission de paix de l'ONU en Afrique de l'Ouest (Côte d'Ivoire, Liberia, Sierra leone et Guinée Bissau) doivent se réunir samedi à Dakar.