La Pologne va devoir renouveler une grande partie de sa classe politique et militaire après la mort du président Lech Kaczynski et de nombreux membres des élites du pays, mais la stabilité de ce pays de l'OTAN et de l'UE n'est pas en danger, selon les experts.

«C'est une situation dramatique, traumatisante et qui change de jour en jour mais il est absolument certain que la stabilité institutionnelle de la Pologne est assurée par des procédures constitutionnelles bien établies», a déclaré à l'AFP le professeur Edmund Wnuk-Lipinski, politologue reconnu.

Tant le président que les responsables militaires et le gouverneur de la banque centrale disparus dans l'accident ont été immédiatement remplacés, suivant les procédures légales en place.

«Le vrai problème se posera au Parlement», explique-t-il. «L'opposition conservatrice a été décimée par cette tragédie dont l'impact sur les élections parlementaires de l'année prochaine est encore inconnu».

Plusieurs hauts responsables du parti conservateur d'opposition Droit et Justice (PiS) dirigé par le frère jumeau du président Kaczynski, Jaroslaw, ont péri dans l'accident de l'avion présidentiel.

«J'espère que cette tragédie permettra à la politique en Pologne de se concentrer plus sur les questions de fond et moins sur la politique de partis, négative et émotionnelle», a déclaré M. Wnuk-Lipinski.

La rivalité entre le parti de droite PiS et le parti libéral Plateforme civique (PO) du premier ministre Donald Tusk a souvent divisé le pays.

Les Polonais vont devoir se rendre dans les bureaux de vote avant la fin juin pour une élection présidentielle anticipée.

Le président du Parlement Bronislaw Komorowski, qui assure la présidence par interim dispose d'un délai de 14 jours pour fixer la date de l'élection anticipée «en choisissant un jour férié dans les 60 jours à compter de la date de l'annonce du scrutin», en vertu de la Constitution polonaise.

L'élection présidentielle était prévue en Pologne en octobre. Elle aurait probablement opposé le conservateur Lech Kaczynski à M. Komorowski, candidat officiel du parti libéral de M. Tusk.

Les experts ne s'attendent pas à voir des conséquences économiques de cet accident qui a emporté le gouverneur de la banque centrale Slawomir Skrzypek.

«C'est une situation dramatique mais pas une véritable crise» pour l'économie polonaise, a dit à l'AFP Andrzej Sadowski, un économiste du centre de recherche libéral Adam Smith.

«La situation économique de la Pologne est stable, nous sommes bien loin de la situation de la Grèce», a-t-il ajouté.

La Pologne a bien résisté à la crise économique mondiale et est le seul des 27 pays de l'Union européenne à avoir conservé la croissance en 2009, avec une expansion de son Produit intérieur brut de 1,7%.

Les chefs des quatre grands états-majors de l'armée polonaise (terre, air, mer, forces spéciales) ont péri dans l'accident du Tu-154 qui emmenait le président samedi à Katyn, en Russie.

«Un changement de générations interviendra dans l'armée polonaise. C'est un processus qui a déjà commencé, mais le sort le fait se précipiter», a souligné la politologue Lena Kolarska Bobinska.

La catastrophe aérienne s'est produite samedi matin près de Smolensk, à plus de 400 kilomètres à l'ouest de Moscou. Les 96 occupants de l'avion qui ont péri se rendaient en Russie pour rendre hommage à la mémoire de 22 000 officiers polonais tués en 1940 par la police secrète de Staline.