Larmes aux yeux, abattus, les Polonais étaient traumatisés samedi par la nouvelle de la mort du chef de l'Etat Lech Kaczynski et de hauts responsables polonais dans l'accident de l'avion présidentiel qui s'est écrasé le matin à Smolensk, dans l'ouest de la Russie.

«C'est invraisemblable. Je n'arrive pas à y croire. Je suis sous le choc» - la voix faible de Katarzyna, 32 ans, tremble un peu, ses yeux sont humides.

Comme des milliers de Varsoviens, elle est venue, accompagnée de ses amis, devant le siège de la présidence, dans le centre la capitale, pour rendre hommage au président Lech Kaczynski, mort à 60 ans.

Le chef de l'Etat était accompagné par son épouse, ainsi que par les principaux chefs de l'armée et des personnalités politiques de premier plan. Au total, 97 personnes ont péri dans cet accident sans précédent dans l'histoire de la Pologne.

Comme des centaines de personnes, Katarzyna a apporté une gerbe de roses blanches et rouges, aux couleurs nationales de la Pologne. D'autres y ont allumé des bougies.

«J'étais sur le marché, en train de faire mes courses, lorsque mon fils m'a appelée. Ca m'a coupé les jambes. Les gens autour de moi pensaient que j'allais tomber», explique Janina Sebastinow, 78 ans. «C'est une immense perte que l'on ne pourra pas combler. Ce sont des gens bien qui sont morts», a-t-elle ajouté.

«C'est mon coeur qui m'a dit de venir, il fallait que je sois là», déclare Anna Ciostek, traductrice de 45 ans. Elle est venue à la présidence avec sa fille et sa mère. Toutes trois s'interrogent sur les causes de l'accident. «On ne sait pas ce qui s'est passé exactement, et il y a trop de gens ou de pays à qui ça profite», dit Anna.

Mais les théories de complot restent pour l'instant marginales. C'est la douleur qui prévaut.

«Le monde contemporain n'a pas connu de telle tragédie», a déclaré le Premier ministre polonais Donald Tusk.

«Il faut que tous les Polonais soient aujourd'hui ensemble, indépendamment de leurs opinions politiques», pense un chauffeur de taxi de 50 ans, Jan Szczepanski. «Je n'étais pas partisan de Lech Kaczynski, mais cela n'a aucune importance aujourd'hui», dit-il.

Tous ensemble, ni droite, ni gauche

«Face à cette énorme tragédie, nous sommes tous ensemble. Il n'y a ni droite, ni gauche. Il n'y a ni clivages ni différences. Tous ensemble, nous exprimons nos sentiments de compassion envers les familles des personnes qui ont péri près de l'aéroport de Smolensk», a déclaré le président de la Diète (chambre basse du parlement) Bronislaw Komorowski, 57 ans.

Selon la Constitution polonaise, c'est lui qui remplace le président décédé jusqu'à l'élection présidentielle anticipée, qui doit intervenir avant la fin juin. Ironie du sort, il est lui-même candidat favori pour cette élection.

Dans sa brève allocution à la presse, il a annoncé un deuil national d'une semaine. Le Premier ministre polonais a quant à lui annoncé deux minutes de silence dimanche à midi.

A travers tout le pays, des prières étaient dites et des messes célébrées.

«Nous prions pour notre patrie. Nous sommes confiants que le sacrifice de nos frères et soeurs portera de bons fruits, qu'il apportera la paix et la réconciliation de tous les Polonais», a déclaré le cardinal Stanislaw Dziwisz, lors d'une messe célébrée dans la cathédrale de Wawel, à Cracovie (sud).

Dans la soirée, le centre historique de Varsovie où est située le palais présidentiel était noir de monde; des milliers de gens priaient dans les églises.

Ils se donnaient également rendez-vous par SMS sur la place Pilsudski, lieu habituel de grands rassemblements, dont des messes papales. «Rencontrons-nous en silence sur la place Pilsudski à 20H30. Soyons tous ensemble. Faites suivre ce sms», indique ce message.