Un premier corps d'une victime de l'accident du vol Rio-Paris d'Air France, qui s'est abîmé au large du Brésil en juin 2009 avec 228 personnes à bord, a été remonté jeudi du fond de l'océan Atlantique au cours d'une opération «inédite» dont l'issue reste très incertaine.

Quelques jours après avoir récupéré les boîtes noires de l'Airbus A330 d'Air France, vitales pour déterminer les causes de la catastrophe, les enquêteurs avaient commencé mercredi l'opération de repêchage des corps qui gisent avec les débris de l'appareil.

«Après une tentative infructueuse, la dépouille d'une des victimes» du vol «a pu être remontée avec succès à bord du navire l'Ile de Sein» ce jeudi «en début de matinée», a annoncé la direction de la gendarmerie française, dont les hommes travaillent sur la partie judiciaire de l'enquête.

«Restée immergée pendant deux années environ à une profondeur de 3 900 mètres, la dépouille, toujours attachée sur un siège de l'aéronef, apparaît dégradée», indique la gendarmerie.

«Des prélèvements ont été effectués par les enquêteurs de la gendarmerie sur place et vont être transmis la semaine prochaine en même temps que les enregistreurs de bord, à un laboratoire d'analyse afin de déterminer la possibilité d'une identification des victimes par l'ADN», précise la même source.

Malgré ce succès, la gendarmerie a tout de suite exprimé des réserves sur la possibilité de remonter d'autres victimes du vol AF447, qui transportait ce jour-là, outre l'équipage, 216 passagers de 32 nationalités, dont 73 Français, 58 Brésiliens et 26 Allemands.

«Les tentatives de relevage (des corps) sont effectuées dans des conditions particulièrement complexes et jusque-là inédites», explique-t-elle, ajoutant : «De fortes incertitudes subsistent quant à la faisabilité technique de la remontée des corps».

A Paris, les familles des victimes ont réagi en estimant que le repêchage d'un premier corps ouvrait une nouvelle phase «très difficile» pour elles, voire «traumatisante» pour celles qui y sont opposées, selon Jean-Baptiste Audousset, président de l'association Entraide et Solidarité AF447.

«On n'arrivera pas à retrouver les 228 victimes» et «il y a beaucoup de familles auxquelles on ne rendra pas le corps», a-t-il ajouté.

Au Brésil, les familles des victimes avaient demandé dès mercredi que tous les corps soient remontés à la surface, mais aussi que les boîtes noires soient décryptées hors de France.

Ces deux enregistreurs, qui contiennent les données du vol et les conversations des pilotes, ont été repêchés dimanche et lundi au milieu des débris de l'avion, localisés début avril à 3 900 mètres de profondeur, sur une zone de 600 mètres sur 200.

Le Bureau enquêtes et analyses (BEA) doit les décrypter à Paris dans les jours à venir.

Après leur découverte, la ministre française de l'Ecologie, chargée des Transports, Nathalie Kosciusko-Morizet, avait annoncé que «la phase de remontée de l'avion pourrait être lancée d'ici à trois semaines, un mois», ainsi que celle de «la remontée des corps».

Des spécialistes ont indiqué à l'AFP que le froid et l'absence d'oxygène des grandes profondeurs ont pu favoriser une bonne conservation des corps même si une dégradation rapide peut survenir dès leur sortie de l'eau.

La gendarmerie a dépêché sur place huit spécialistes, dont un médecin.

Ces gendarmes travaillent sous la houlette des deux juges parisiens. Dans ce volet judiciaire de l'enquête, Airbus et Air France ont été récemment mis en examen pour homicides involontaires.

A Rio, un tribunal a rejeté en seconde instance un recours d'Air France, poursuivi par la famille d'une victime brésilienne. La compagnie devra lui verser près de 600 000 euros au titre de dommages moraux.