La fébrilité a vite fait place à la déception à La Motte, en Abitibi, après la nomination du nouveau pape argentin.

Un insoutenable suspense flottait pourtant sur le village natal du cardinal et papabili Marc Ouellet, après l'apparition de la fumée blanche au Vatican. «Je suis nerveux, je suis nerveux», répétait le maire René Martineau, en faisant les cent pas dans la salle de presse aménagée au sous-sol de l'église du village pour la durée du conclave.

Les Lamottois ont ensuite convergé en grand nombre vers l'église pour suivre les évènements. «Disons que je n'ai pas été fébrile comme ça depuis le jour de mes noces!» a lancé Gabriel Gourde, qui allumait des lampions dans la salle au rez-de-chaussée, où des membres de la famille Ouellet avaient annoncé un point de presse, peu importe le nom du pape.

Lise Breault piaffait aussi d'impatience dans son magasin de l'autre côté de la rue, pris d'assaut par les nombreux médias de passage au cours des dernières semaines.

Au moment de connaître le nom du pape, journalistes et citoyens retenaient leur souffle autour des deux téléviseurs installés dans la salle de presse. Une scène cocasse, puisque la plupart des yeux étaient rivés sur la chaîne francophone, même si l'autre, anglophone, avait dévoilé le nom du pape argentin deux minutes plus tôt, dans l'indifférence générale.

Plusieurs villageois ont ensuite eu du mal à cacher leur déception. «Je suis déçue. Beaucoup. Mais il y a toujours une très belle place pour lui [Marc Ouellet] à Rome», a dit en soupirant Marthe Béliveau, 81 ans, paroissienne très active qui était venue à l'église remplie d'espoir. «Ma seule consolation est de savoir qu'on va le voir plus souvent», a ajouté l'ancienne directrice de la chorale.

D'un positivisme olympien, Lise Breault a vite refoulé sa déception. «La prochaine fois sera la bonne!» croit celle qui a enchaîné les entrevues par dizaines au cours des derniers jours.

Le maire René Martineau a évoqué le tourbillon médiatique qui a déferlé sur sa municipalité de 439 âmes. «La vie va pouvoir reprendre son cours normal», a-t-il dit, en remerciant ces citoyens honoraires des derniers jours.

Deux des frères du cardinal ont aussi brièvement accepté de partager les états d'âme de leur famille. Moins diplomates que le maire, ils n'ont pas caché qu'ils avaient hâte d'en finir avec cette invasion médiatique. «On a hâte de retrouver notre frère, loin des médias», a souligné Roch Ouellet, flanqué de son frère Louis.

Tous les membres de la famille étaient réunis autour de leur mère en attendant l'issue du vote. «On attendait comme des millions de gens, mais avec une plus grande nervosité et beaucoup d'émoi. Notre mère a hâte de parler de vive voix à Marc et le revoir», a confié Roch Ouellet.

En effet, si La Motte n'a pas eu son pape, la mère du cardinal, âgée de 91 ans, serait quant à elle bien soulagée de retrouver un fils.