La chancelière allemande Angela Merkel recevra vendredi le secrétaire d'État américain John Kerry, ont annoncé mercredi les deux gouvernements, sur fond de tensions entre les deux pays sur les activités de l'agence américaine de renseignement NSA.

Mme Merkel a critiqué les méthodes des États-Unis en matière d'espionnage, estimant que les puissances occidentales qui sacrifient la liberté au nom de la sécurité envoyaient un mauvais signal à «des milliards de personnes vivant dans des États non démocratiques», dans un discours de politique générale devant les députés du Bundestag.

«Des actions pour lesquelles la fin justifie les moyens, dans lesquelles tout ce qui est techniquement possible est mis en oeuvre, violent la confiance, sèment la méfiance», a-t-elle déclaré, ajoutant que «le résultat final n'est pas plus de sécurité, mais moins» de sécurité.

Dans un bref communiqué, le département d'État américain a confirmé ce voyage à Berlin pour «discuter avec de hauts responsables allemands de notre coopération bilatérale et de dossiers internationaux importants».

Mme Merkel et M. Kerry doivent s'exprimer devant la presse vendredi à 13H00 GMT, avant un entretien.

La Syrie et l'Ukraine devraient occuper une place de choix lors de l'entrevue de la chancelière avec M. Kerry. Mais Mme Merkel devrait aussi aborder le différend entre les deux pays au sujet des activités de la NSA, lors de cette première rencontre avec un haut responsable américain depuis des révélations fin octobre sur l'espionnage d'un des téléphones portables de la chancelière par l'agence de surveillance américaine.

Revenant sur ces révélations s'appuyant sur des documents de l'ancien consultant de la NSA Edward Snowden, la chancelière a déclaré jeudi: «Aucune personne assumant des responsabilités politiques ne peut contester sérieusement que ce que nous avons appris à l'époque pose des questions fondamentales».

«L'Allemagne ne peut s'imaginer meilleur partenaire que les États-Unis», a-t-elle affirmé, mais «la question de l'équilibre des moyens que l'on se donne pour contrer une menace, par rapport à cette menace, est posée».

Elle a notamment reproché aux États-Unis et à la Grande-Bretagne d'avoir outrepassé les nécessités de la lutte anti-terroriste, en se servant de leurs systèmes d'écoutes et d'interception à des fins politiques, économiques ou diplomatiques.

«Cela ne peut être acceptable. Car cela touche au coeur de ce qui fait la coopération entre amis et alliés: la confiance», a dénoncé Mme Merkel.

Elle a ajouté espérer qu'un accord soit toujours possible avec Washington sur des standards communs pour la lutte contre les menaces, même si «les positions sont à ce jour très éloignées», référence aux négociations difficiles sur un traité souhaité par l'Allemagne interdisant tout espionnage réciproque.

John Kerry se rendra ensuite, avec son collègue de la Défense Chuck Hagel, à la Conférence sur la sécurité de Munich qui réunit le gratin de la défense et de la diplomatie internationale, jusqu'à dimanche dans le sud de l'Allemagne.

M. Kerry aura plusieurs entretiens bilatéraux en marge de ce forum auquel doivent assister le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon et les ministres russe et iranien des Affaires étrangères Sergueï Lavrov et Mohammad Javad Zarif.