Barack Obama, pressé par le Brésil de s'expliquer sur des accusations d'espionnage américain visant la présidente Dilma Rousseff, s'est engagé auprès d'elle à « assumer sa responsabilité » et à lui répondre d'ici mercredi.

Au cours d'une rencontre improvisée entre les deux chefs d'État jeudi soir avant le dîner de travail du G20, à Saint-Pétersbourg (Russie), le président américain « a dit qu'il assumerait la responsabilité directe et personnelle de l'enquête sur ces accusations d'espionnage », a annoncé Mme Rousseff dans une déclaration à la presse diffusée vendredi sur le blogue de la présidence.

« Face à mon scepticisme en raison du manque de résultats de la rencontre de la semaine dernière (le 28 août à Washington, ndlr) entre le ministre de la Justice, Jose Eduardo Cardozo, et du vice-président (américain Joe) Biden, le président Obama m'a réitéré qu'il assumait la responsabilité (...) aussi bien sur l'éclaircissement des accusations que sur la proposition de mesures que le gouvernement brésilien jugera adéquates », a ajouté la présidente.

Le chef de la diplomatie brésilienne, Luiz Alberto Figueiredo, doit rencontrer mercredi la conseillère à la sécurité nationale des États-Unis, Susan Rice, pour traiter de l'affaire, a ajouté Mme Rousseff. Un porte-parole du ministère brésilien des Affaires étrangères a indiqué à l'AFP que cette rencontre pourrait avoir lieu à New York.

Jeudi, la présidence brésilienne avait annoncé le report du voyage de l'équipe qui devait préparer la visite d'État de Mme Rousseff aux États-Unis, prévue le 23 octobre. Son gouvernement a annoncé qu'il attendait des explications sur ces accusations selon lesquelles les services secrets américains avaient intercepté des communications Internet de Mme Rousseff et de ses proches collaborateurs, ainsi que celles de millions de Brésiliens.

Mme Rousseff a confirmé que ce voyage était en suspens, avertissant sur le site d'informations brésilien G1 qu'il « dépendrait des conditions politiques établies par M. Obama ». Son gouvernement avait auparavant qualifié ces faits d'« inadmissibles et d'inacceptables ».

L'ex-président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva (2003-2010), mentor politique de Mme Rousseff, est même sorti de son habituelle réserve jeudi pour appeler M. Obama « à présenter humblement des excuses à la présidente (...) et au Brésil ».

Ces accusations d'espionnage proviennent de documents de l'Agence nationale de sécurité américaine (NSA) détenus par l'ex-informaticien du renseignement Edward Snowden. Ce dernier est inculpé d'espionnage aux États-Unis pour avoir révélé l'ampleur de la surveillance électronique américaine dans le monde. Il se trouve actuellement en Russie, pays qui lui a accordé un asile temporaire. Edward Snowden avait remis les documents au journaliste américain Glenn Greenwald vivant actuellement au Brésil.

L'affaire empoisonne depuis deux mois des relations qui se veulent cordiales entre le Brésil et les États-Unis. En juillet, Brasilia avait déjà demandé à Washington de s'expliquer sur des révélations du quotidien O Globo qui - sur la base des mêmes documents - affirmait que le Brésil faisait partie d'un réseau de 16 bases d'espionnage des services secrets américains.

Le Brésil avait ensuite indiqué ne pas être satisfait des explications de Washington indiquant que ces bases constituaient un moyen de lutter contre le terrorisme et qu'aucune communication n'avait été interceptée.

Du côté du Mexique, dont le président Enrique Peña Nieto a été écouté par les services secrets américains avant son élection en 2012 - selon les révélations de Snowden - le problème semble avoir été surmonté lors d'une rencontre entre les deux chefs d'État en marge du sommet du G20 à Saint-Pétersbourg.

Le président américain « a fait part de son engagement personnel et de sa volonté d'ouvrir une enquête » et « d'imposer des sanctions » à ceux qui auraient agi « en dehors du cadre de la loi », a déclaré M. Peña Nieto à la presse. Les relations entre ces deux proches alliés ne doivent pas pâtir de cette affaire, selon lui ajoutant que M. Obama « sait très bien » que ce dossier ne doit pas entraver la coopération entre Washington et Mexico.

Vendredi le président américain a déclaré à la presse qu'il prenait « très au sérieux » les « inquiétudes » du Brésil et du Mexique sur ces affaires d'espionnage présumées.

De son côté, la présidente brésilienne a affirmé qu'elle proposerait à l'Assemblée générale des Nations unies le 24 septembre des propositions de nouvelle gouvernance contre la violation des communications privées.