Le G29, groupe des autorités européennes chargées de l'informatique et des libertés, a saisi la Commission européenne et entamé une évaluation indépendante du programme américain de surveillance des données personnelles Prism, a annoncé lundi l'instance française chargée des libertés sur internet.

Par AFP Emmanuelle TRECOLLE

PARIS - Dix semaines après les révélations de l'ex-consultant de la NSA Edward Snowden, les instances européennes de protection des libertés informatiques sont montées au créneau lundi pour réclamer des explications sur l'impact des activités d'espionnage électronique des États-Unis dans le monde.

Le G29, regroupement d'autorités européennes chargées de l'informatique et des libertés, a annoncé avoir saisi la Commission européenne et entamé une évaluation indépendante du programme américain de surveillance des données personnelles baptisé Prism.

L'Agence nationale de sécurité américaine (NSA), qui supervise Prism, est accusée d'espionner les communications électroniques mondiales échangées sur les services en ligne comme Facebook, Google, Skype dans le cadre de ce programme, selon les révélations de l'ancien consultant américain de la NSA, Edward Snowden, qui a depuis trouvé asile en Russie.

Les données personnelles des citoyens européens sont ainsi transférées et utilisées aux États-Unis sans qu'ils le sachent et sans qu'ils aient de moyens pour se défendre devant des tribunaux américains.

Le G29 «considère qu'il lui appartient d'évaluer l'impact exact du programme Prism sur la protection de la vie privée et des données des citoyens européens» et s'est donc adressé le 13 août à la vice-présidente de la Commission européenne, Viviane Reding, pour «demander des clarifications sur la législation américaine en matière de surveillance des citoyens européens et sur ce programme», a-t-il précisé dans un communiqué.

Selon le groupement, «les législations nationales des États membres doivent également faire l'objet d'un examen plus précis».

Du côté de la Commission européenne, la demande des autorités est l'occasion de rappeler ses efforts pour «construire un ambitieux programme européen de protection des données personnelles» qu'elle compte voir voter «aussi vite que possible et au plus tard au printemps 2014» et qui permettra notamment de «servir à répondre à des situations du type Prism».

«Est-ce vraiment safe»

Mi-juillet, Vivian Reding avait fait part à l'AFP de sa volonté de renforcer la protection des citoyens de l'UE contre l'utilisation de leurs données personnelles aux États-Unis, et émis l'espoir d'obtenir des avancées dès la prochaine réunion formelle des ministres de l'Intérieur et de la Justice de l'UE, les 7 et 8 octobre à Luxembourg.

Elle avait annoncé son intention d'étudier d'ici à cette réunion les dispositions du «Safe Harbor», un ensemble de principes de protection des données personnelles publiées par le Département du Commerce américain, auxquels les entreprises établies aux États-Unis adhèrent pour pouvoir recevoir des données à caractère personnel en provenance de l'UE.

«Je me pose la question: est-ce vraiment safe? Je vais voir si les données des citoyens européens sont vraiment protégées ou s'il faut prendre des mesures», avait-elle expliqué.

«On ne peut pas transférer des données personnelles des citoyens européens à un tiers sans leur accord», avait-elle insisté.

Les révélations d'Edward Snowden ne cessent de créer des remous, tant dans les pays étrangers dont les citoyens ont été espionnés, qu'aux États-Unis où le président Barack Obama a dû promettre début août des réformes dans la surveillance des communications au nom de la «transparence» et de la «confiance» à ses concitoyens, tout en démentant tout abus.

Au Royaume-Uni, les autorités se sont retrouvées sous le feu des critiques lundi après la détention pendant neuf heures la veille du compagnon du journaliste du Guardian à l'origine de la publication de documents secrets obtenus par l'ex-consultant de la NSA.