Pour se rendre à Haïti, tant que l'aéroport de Port-au-Prince ne sera pas ouvert aux vols commerciaux, il faudra passer par Saint-Domingue, en République dominicaine, une destination soleil bien connue. C'est le chemin qu'ont pris nos journalistes cette semaine. Quand leur avion a touché le sol, les vacanciers ont bruyamment applaudi le pilote. Mais une quinzaine de passagers n'avaient pas le coeur à applaudir. Ils se demandaient plutôt comment ils allaient pouvoir rejoindre leurs proches à Haïti. Voici leurs histoires.

Larose Merci Dieu. Avec un nom pareil, Larose ne pouvait qu'avoir de la chance. Il venait tout juste d'embarquer dans un avion pour Montréal lorsque le séisme a frappé. Ce sont les douaniers montréalais qui l'ont informé du drame. L'homme d'affaires d'une cinquantaine d'années, hanté par l'image de sa maison abîmée et de ses proches blessés, a décidé de retourner sans tarder à Port-au-Prince pour prendre soin de sa famille. Dans le vol pour Santo Domingo, c'est lui qui a réuni tous les voyageurs à destination d'Haïti. Aussitôt arrivé dans la capitale haïtienne, il a loué deux minibus pour le groupe. Fin négociateur, il a même trouvé le moyen de faire franchir la frontière en pleine nuit au groupe, malgré le refus borné des autorités dominicaines.

Carole Celius. Cette Montréalaise d'origine haïtienne s'inquiète pour son cousin, qui a été grièvement blessé à Léogâne. L'étudiant en sciences humaines a été touché à la colonne vertébrale. Il est paralysé. L'hôpital où il est soigné n'a même pas de collet cervical pour lui. Carole Celius a appelé la Croix-Rouge, qui n'était pas capable de faire livrer un tel appareil à son cousin. Elle a décidé de venir le porter elle-même.

Marc Arthur. Infirmier à l'hôpital Saint-Charles-Borromée, à Montréal, ce jeune Montréalais d'origine haïtienne se trouvait à Port-au-Prince avec sa famille au moment du séisme. Il est vite revenu au Québec, à bord d'un Hercule militaire, avec sa femme et ses enfants, qui s'en sont tous tirés sans blessure apparente. De retour chez lui, il a réuni ses économies et s'est procuré quelques médicaments et bandages. Aussitôt arrivé à Port-au-Prince, dans la nuit de vendredi, il a offert ses services à l'ambassade canadienne. «J'ai fait des pansements toute la journée. Je suis épuisé», nous a-t-il confié hier après-midi, après une longue journée de labeur. Il continuera de donner un coup de main en Haïti pendant quelques jours.

Meristil Nicolas. Pendant que nous attendions la camionnette qui devait nous conduire vers Haïti, Meristil Nicolas nous a montré la photo de ses trois enfants. Il n'avait pas pu leur parler depuis le tremblement de terre. Un ami lui a dit qu'ils allaient bien. Mais il avait peur qu'il lui ait caché des informations. Meristil Nicolas est donc parti à la recherche de ses enfants.

Jean-Claude Philogène. Gardien de sécurité dans un magasin à grande surface de Saint-Léonard, il allait rejoindre sa femme à Jacmel. Elle doit accoucher d'un jour à l'autre. «Peut-être aujourd'hui, peut-être demain», estime Jean-Claude. Il veut rapidement emmener le bébé et sa femme à l'ambassade du Canada, à Port-au-Prince, et entamer un processus accéléré d'immigration. Arrivé à Jacmel en fin de journée hier, il se demandait s'il devait prendre la route immédiatement, ou encore attendre l'accouchement. «Je vais voir un médecin demain matin. Lui, il pourra me dire si ma femme risque d'accoucher sur la route.»

Myrtho Elien et Jeff Polynice. Ces deux Montréalais dans la trentaine sont partis rejoindre leur épouse en Haïti. L'une des deux femmes est enceinte. Elles n'ont pas encore leurs papiers canadiens. Jeff et Myrtho veulent accélérer le processus d'immigration.