Arborant le précieux passeport bleu des États-Unis ou espérant obtenir un visa, des centaines d'Haïtiens étaient massés mardi devant l'ambassade américaine de Port-au-Prince, gardée par un imposant contingent de GI's. Tous rêvent de la même chose: quitter cet enfer.

Qu'importe le soleil de plomb, Michael Renée tient fermement le reçu pour déposer une demande de passeport. Cet Haïtien de 28 ans qui habite le New Jersey (est des Etats-Unis) fait tout ce qu'il peut pour attirer l'attention d'un des soldats américains qui, lourdement armés, gardent la grille de la délégation.

Il veut déposer au plus vite le dossier, afin que sa petite-amie obtienne le précieux sésame. «Avec tout ce qui s'est passé, elle n'est pas en sécurité ici», dit-il.

Après avoir quitté en catastrophe les Etats-Unis et traversé la République Dominicaine, il est revenu dans son île natale deux jours après le séisme. «J'ai dû rentrer pour vérifier que ma famille allait bien», explique-t-il. «C'était dingue quand je suis arrivé ici. Je ne peux pas croire ce qui est arrivé».

Il a finalement retrouvé sa compagne, sa fille de 4 ans et son bébé de sept mois. Tous traumatisés mais sains et saufs. Comme des milliers d'Haïtiens frappés par le tremblement de terre de magnitude 7, Michael et les siens vivent depuis dans la rue.

Dans son malheur, sa famille a quand même un avantage sur beaucoup d'autres: posséder des papiers américains, ce qui les autorise à joindre la longue file qui serpente autour de l'ambassade. Certains sont endimanchés, transportant le peu qu'ils ont, une petite valise, et parfois un parapluie.

Des rumeurs ont récemment circulé dans la capitale dévastée: les Etats-Unis accorderaient des visas à tous les Haïtiens qui en font la demande.

Et les candidats, mal informés, affluent plus nombreux chaque jour, racontent les soldats en poste devant l'ambassade qui n'a pas été abîmée par le séisme.

«On est arrivé à 04H45 ce matin en pensant qu'on arriverait avant eux, mais ils étaient déjà 300 à attendre», dit un GI. «A 07h00, ils étaient 800».

La priorité, dit-il, est d'évacuer en priorité les ressortissants américains et leurs parents proches.

«Nous souhaitons que quiconque possède un passeport (américain) ou un visa se rende directement à l'aéroport», précise le militaire.

Depuis le tremblement de terre, de nombreux Haïtiens possédant des documents d'identité américains se sont massés à l'aéroport Toussaint Louverture, aux côtés des bénévoles des ONG, des militaires et des journalistes.

L'attente pour un vol vers le pays de l'oncle Sam peut prendre une heure ou une journée.

Devant l'ambassade, les candidats à l'exil continuent d'affluer par centaines. La plupart n'ont aucun papier américain, et donc aucune chance d'embarquer dans l'un des avions du pont aérien entre Haïti et les Etats-Unis.

Mais qu'importe, ils restent sous le soleil de plomb. En sanglots, certains se démènent à expliquer que leurs précieux documents de voyage ont été perdus, ensevelis dans les gravats de leur maison.

Avant qu'un soldat ne les enjoigne de reculer.