Une semaine après le séisme qui a touché Haïti, les chances de retrouver des survivants sous les décombres sont de plus en plus minces. Et pour les rescapés qui ont de graves fractures, le temps presse.

Le Dr Bruno Bernardin, urgentologue au Centre universitaire de santé McGill (CUSM), a pratiqué la médecine au Cambodge et en Éthiopie il y a quelques années. Selon lui, un être humain ne peut survivre beaucoup plus d'une semaine sans eau. «Ça, c'est si la personne est à l'ombre. Si elle est exposée à une chaleur extrême, elle ne peut survivre plus d'une journée», dit-il.

 

Les gens dont une bonne partie du corps est écrasée sous les débris ont encore moins de chances de survivre. «À cause de la pression sur le corps, on peut survivre au maximum de trois à quatre jours sans eau», note le Dr Bernardin.

Les personnes qui sont prises au piège mais dont le corps n'est pas trop écrasé et qui ont accès à une source d'eau peuvent espérer survivre jusqu'à 30 jours sans nourriture.

Amputations

Selon les journalistes qui sont à Haïti, des milliers de blessés qui ont des fractures ouvertes attendent toujours d'être opérés. Dans certaines villes, comme à Jacmel, il n'y a pas d'anesthésiste. L'attente risque d'être longue avant que tous ces gens puissent être soignés.

Mais le temps presse. Orthopédiste à l'Hôpital général de Montréal, le Dr Greg Berry affirme que la norme québécoise veut que toutes fractures ouvertes soient nettoyées et opérées en moins de six heures. «Quand l'os est exposé, il se contamine facilement. L'os se défend très mal contre les bactéries. Et une fois qu'il est infecté, c'est très dur d'enlever l'infection», explique-t-il.

Orthopédiste au Centre hospitalier universitaire de Québec (CHUQ), le Dr Patrice Montminy souligne que la première façon de guérir une fracture ouverte, c'est de nettoyer la plaie. «Si les gens n'ont pas d'eau propre, ils ne peuvent rien faire», dit-il.

Le Dr Montminy estime que la plupart des fractures subies par les rescapés d'Haïti sont majeures. «Ici, au Québec, ce genre de fracture s'infecte dans environ 20% des cas. On peut s'imaginer ce que ce sera là-bas», dit-il.

Les plaies qui s'infectent peuvent causer d'importants problèmes de santé, voire la mort si l'infection gagne le sang.

Selon les deux orthopédistes, il est possible d'opérer de petites fractures ouvertes, comme à un orteil, sans anesthésie. «Mais pour un gros membre, comme un tibia, c'est risqué», commente le Dr Berry.

Plus d'une semaine après le séisme, le Dr Berry estime que plusieurs personnes ayant des fractures ouvertes seront amputées. «Car essayer de sauver un membre demandera plusieurs interventions, un suivi médical étroit et beaucoup d'antibiotiques, explique-t-il. Dans le contexte actuel, Haïti n'a pas les ressources pour tenter cela. Il y aura plus d'amputations que de reconstruction de membres.»