Un rapport publié samedi révèle que la centrale nucléaire de Fukushima était si mal préparée qu'il a fallu emprunter du matériel à des sous-traitants et aller chercher plus loin le manuel de procédure d'urgence ou l'équipement de protection pour intervenir après le séisme et le tsunami du 11 mars.

Ce document publié par l'opérateur du site, Tokyo Electric Power Co. (TEPCO), est fondé sur les déclarations des employés et les données de la centrale, située dans le nord-est du Japon. Il décrit le chaos et la bataille désespérée qui n'a pas permis d'empêcher la fusion des coeurs des réacteurs. Les employés ne connaissaient pas l'équipement d'intervention et avaient peur d'être irradiés -de fait, certains l'ont été.

Le tsunami a privé la centrale de Fukushima Daiichi d'électricité et de système de refroidissement, entraînant la fusion de trois coeurs et causant plusieurs explosions.

TEPCO a été critiqué pour avoir tardé à relâcher de la vapeur radioactive des enceintes pressurisées des réacteurs et à utiliser l'eau de mer pour le refroidissement, deux mesures cruciales qui, selon les experts, auraient pu limiter les dégâts. Les responsables affirment que le tsunami a engendré une situation impossible à anticiper.

Une enquête indépendante est en cours, mais le rapport révèle un manque de préparation que TEPCO n'avait pas reconnu jusque-là. Pourtant, un exercice avait eu lieu une semaine avant le tsunami et «tout le monde connaissait les sorties de secours», selon ce document.

Quand le refroidissement du réacteur numéro 1 s'est arrêté deux heures après le tremblement de terre, des employés ont découvert que la pompe à eau douce était cassée.

Un camion de pompiers stationné à la centrale n'a pu atteindre le réacteur que plusieurs heures après parce que le tsunami avait déposé un énorme réservoir qui bloquait la voie. Le coeur avait déjà fondu. Finalement, à court d'eau douce, les employés ont recouru à l'eau de mer, corrosive.

Les employés qui devaient relâcher de la pression de l'enceinte de confinement pour éviter une explosion ont d'abord dû trouver le manuel, qui se trouvait, non dans la salle de contrôle, mais dans un autre bureau du complexe, et pendant ce temps la terre continuait à trembler.

Pour activer la ventilation, il a fallu emprunter un compresseur à un sous-traitant et aller chercher des combinaisons de protection au centre de gestion de crise situé à 5 kilomètres de la centrale. Et il a encore fallu une heure pour que les deux premiers employés soient prêts à intervenir sur le réacteur.

Huit des employés intervenus dans la phase initiale de réaction à la catastrophe ont été relevés car ils avaient été exposés à des radiations à haute dose.

Des batteries et câbles ont aussi été empruntés à un sous-traitant sur place pour installer un système de sécurité de surveillance du niveau d'eau et d'autres indicateurs indispensables, précise encore le document.

Des rapports du gouvernement publiés ce mois-ci soulignent que les dégâts et fuites radioactives ont été pires qu'initialement estimés et que la cuve du réacteur N. 1 a été percée par le coeur en fusion. La radioactivité libérée a été deux fois plus forte qu'on ne le pensait au début, soit environ six fois moins importante que celle de Tchernobyl en 1986.

TEPCO et le gouvernement espèrent arriver à stabiliser et amener les réacteurs à un état d'arrêt à froid d'ici janvier, mais certains experts jugent ce calendrier trop optimiste étant donné les radiations, la présence d'eau contaminée et tous les autres obstacles à surmonter.

Dimanche, TEPCO a ouvert une porte du réacteur N. 2 pour permettre à des employés d'installer un système de refroidissement et du matériel de prévention d'explosion. Des manoeuvres similaires ont été réalisées au réacteur N. 1.

Mais l'eau utilisée pour le refroidissement et devenue radioactive continue à s'accumuler dans la centrale, où la mise en marche d'un système de décontamination s'avère difficile. Si rien n'est fait, plus de 100 000 tonnes d'eau contaminée contenues dans la centrale pourraient déborder d'ici deux semaines.