L'enquête policière sur la tentaculaire affaire des écoutes au tabloïd britannique News of the World a débouché mardi sur les premières inculpations dont celles de Rebekah Brooks, ex-protégée du magnat des médias Rupert Murdoch, et de son époux, ami du premier ministre David Cameron.  

Au total, six personnes ont été inculpées pour «entrave au cours de la justice», un délit théoriquement passible d'une peine de prison à vie. Dans la pratique cependant, les peines d'emprisonnement prononcées sont beaucoup moins longues.

Rebekah Brooks, ex-directrice de News International, qui chapeaute les journaux britanniques de l'empire Murdoch, quatre de ses collaborateurs et son mari ont été inculpés pour avoir tenté de dissimuler des preuves à la police, dans l'enquête sur le scandale des écoutes au News of the World (NotW). Ils devraient être présentés à la justice le 13 juin.

Dénonçant un «emballement judiciaire sans précédent», Mme Brooks et son mari Charlie, un entraîneur de chevaux, ont regretté une décision «injuste» et dénoncé «une tentative pour les transformer en boucs émissaires».

«Quand tous les détails de cette affaire seront connus, ce qui s'est passé aujourd'hui sera perçu comme un cirque coûteux», a assuré l'ex-reine des tabloïdes, pâle et visiblement émue, devant la presse.

Ces inculpations sont les premières depuis la réouverture début 2011 de l'enquête sur les écoutes, une affaire aux innombrables ramifications et qui a conduit à l'arrestation d'une cinquantaine de personnes, dont un ex-conseiller de M. Cameron.

NotW, fleuron du groupe Murdoch et premier tirage de la presse britannique, est soupçonné d'avoir fait écouter environ 800 personnes au début des années 2000 afin d'alimenter sa machine à scoops.

Face à ces révélations, Rupert Murdoch a dû fermer le journal l'été dernier et son groupe a indemnisé des dizaines de victimes. Le scandale a aussi obligé Rebekah Brooks à démissionner de son poste à News International.

Son inculpation marque une nouvelle étape dans la chute de cette flamboyante rousse de 43 ans, présentée comme la «cinquième fille de Rupert Murdoch», dont l'ascension avait été fulgurante et qui entretenait des relations étroites avec le pouvoir.

Son inculpation est de nature à embarrasser encore davantage le Premier ministre, déjà éclaboussé par ce scandale.

Les Cameron avaient passé chez les Brooks le réveillon de Noël 2010. Et Rebekah Brooks a révélé la semaine dernière que le Premier ministre lui envoyait des textos signés «lol» pour «lots of love».

Downing Street s'est refusé mardi à tout commentaire «sur une enquête en cours».

M. Cameron est déjà dans une situation extrêmement délicate dans cette affaire, qui a coûté sa place à son conseiller en communication, Andy Coulson, lui-même ex-rédacteur en chef du NotW.

Son ministre de la Culture, Jeremy Hunt, est aussi soupçonné de favoritisme vis-à-vis de l'empire Murdoch, quand ce dernier cherchait à racheter la totalité du bouquet satellitaire BSkyB.

Selon l'acte d'inculpation, Rebekah Brooks a cherché à «enlever sept caisses de documents des archives de News International» en juillet 2011. Elle a aussi tenté, avec la collaboration notamment de son mari, de «dissimuler à la police des documents, des ordinateurs et du matériel électronique».

Arrêtée à deux reprises depuis l'été dernier, elle est en liberté sous caution, comme son époux. Elle est encore passible d'autres inculpations pour corruption et écoutes illégales.