Le magnat des médias Rupert Murdoch s'est de nouveau dédouané jeudi dans le retentissant scandale des écoutes téléphoniques au tabloïd britannique News of the World, accusant «une ou deux personnes» au sein de son groupe de lui avoir caché le recours à cette pratique.

M. Murdoch était interrogé à Londres, pour la deuxième et dernière journée, par une commission indépendante sur les médias, mise en place par le gouvernement britannique à la suite de cette affaire des écoutes.

Après avoir été interrogé mercredi pendant quatre heures sur ses liens avec la classe politique -qu'il a minimisés-, M. Murdoch a été auditionné jeudi sur le scandale qui a provoqué la fermeture en juillet 2011 du News of the World, fleuron de son empire de presse au Royaume-Uni.

Le News of the World est soupçonné par la police d'avoir fait écouter dans les années 2000 de nombreuses vedettes, membres de la famille royale et simples citoyens qui faisaient l'actualité, afin de décrocher des scoops.

L'homme d'affaires américain de 81 ans a plaidé non coupable, se présentant comme la victime d'«une ou deux personnes» qui lui ont «dissimulé», à lui et aux autres hauts responsables de son groupe, le recours aux écoutes.

«Il n'y a pas de doute dans mon esprit (...) que quelqu'un a pris la responsabilité d'une dissimulation, dont nous avons été victimes», a affirmé M. Murdoch.

Sans livrer de nom, le magnat a cependant indiqué qu'au nombre des personnes auxquelles il pensait figurait «un ami de journaliste (...) et avocat intelligent (...).

Estimant que Rupert Murdoch "ne pouvait faire référence" qu'à lui, Tom Crone, avocat de formation et ex-directeur des affaires juridiques de News International, la filiale de presse britannique du groupe Murdoch, a fermement démenti ces propos.

"Son assertion selon laquelle j'aurais «pris la responsabilité d'une dissimulation» est un mensonge éhonté", écrit Tom Crone dans un communiqué cinglant.

M. Crone et Colin Myler, ancien rédacteur en chef de News of the World, affirment avoir discuté en juin 2008 avec le fils du magnat, James Murdoch, qui était alors à la tête de News International, d'un courriel crucial prouvant que ces écoutes n'étaient pas le fait d'un journaliste isolé au sein du journal.

James Murdoch a nié à deux reprises devant une commission d'enquête parlementaire avoir été mis au courant de ce courriel. Une position qu'il a maintenue lors de son audition mardi devant la commission sur les médias présidée par le juge Brian Leveson.

Rupert Murdoch est resté jeudi sur la même ligne de défense, niant avoir été mis au courant de l'ampleur des écoutes au sein du tabloïd. La commission parlementaire, distincte de la Commission Leveson, doit rendre son rapport mardi.

Initialement, seuls un journaliste du News of the World et un détective privé avaient été condamnés à la prison en 2007, mais le scandale a éclaté dans toute son ampleur avec l'ouverture d'une nouvelle enquête policière en janvier 2011.

Rupert Murdoch a dit avoir dépensé depuis «des centaines de millions de dollars» dans l'enquête interne lancée au sein du groupe News Corp., dans le cadre de sa coopération à l'enquête de police.

Par ailleurs, le gendarme britannique des médias, qui mène une enquête pour vérifier que News Corp. est toujours un actionnaire «convenable» pour le bouquet satellitaire BSKyB, a élargi son enquête: il a demandé à voir des documents relatifs aux nombreuses procédures engagées par des victimes des écoutes.

La comparution de James Murdoch mardi s'est avérée très embarrassante pour le gouvernement de David Cameron, avec la révélation de courriels suggérant des liens très étroits entre le groupe Murdoch et le bureau du ministre des Médias, Jeremy Hunt, dont un conseiller spécial a démissionné dans la foulée.