La jeune Pakistanaise Malala a reçu le prix Nobel de la paix hier à Oslo, conjointement avec l'Indien Kailash Satyarthi. La Presse était sur place pour assister à cette grand-messe célébrée en présence du roi de Norvège et de... Steven Tyler, chanteur d'Aerosmith. Compte rendu.

Comme toujours à ce moment de l'année, en Norvège, le prix Nobel de la paix, organisé par le pays depuis plus de 100 ans, était remis hier à l'hôtel de ville d'Oslo. Comme prévu, Malala Yousafzai est officiellement devenue la plus jeune personne à recevoir cet hommage prestigieux.

Son discours n'a pas déçu. L'adolescente de 17 ans, laissée pour morte par les talibans il y a deux ans, a fait forte impression avec son aplomb. Devant ses parents et ses amies d'école, elle s'est engagée à poursuivre sa lutte pour l'éducation des filles, cause dont elle est devenue l'emblème.

«Je parle pour les 66 millions de filles qu'on prive d'éducation et je continuerai la lutte jusqu'à ce que toutes soient scolarisées», a-t-elle déclaré.

Malala partageait son prix avec l'Indien Kailash Satyarthi, 60 ans, fondateur de l'organisme Bachpan Bachao, qui a sauvé des dizaines de milliers d'enfants du travail à l'usine. Mais tous les yeux étaient rivés sur elle.

Vertu et protocole

Que dire, sinon, de cet événement mondialement reconnu?

Franchement, on a assisté à un drôle de mélange. Dans la salle, on pouvait voir des diplomates, des têtes couronnées et des vedettes «people». Il y avait un tapis rouge, mais peu de photographes. De la musique, mais personne ne dansait. Le glamour était absent. Au rendez-vous: la vertu... et le protocole.

On aurait pu entendre une mouche voler avant le début de la cérémonie. Un pianiste en smoking jouait de la musique de chambre inoffensive pendant que le gratin prenait place. Puis les trompettes royales ont retenti à l'arrivée solennelle de la famille royale de Norvège, qui préside chaque année l'événement.

Entre deux discours, on a eu droit à des performances vibrantes de musique indienne et pakistanaise. Mais à part Steven Tyler, vêtu d'une queue de pie, qui hochait ouvertement la tête, personne ne semblait porté à la fête dans cette cérémonie résolument sobre.

Le tout s'est terminé avec quelques airs de Noël interprétés par un chanteur d'opéra, avant que les trompettes ne résonnent de nouveau, pour marquer la sortie du roi Harald et des lauréats.

Et un drapeau du Mexique

Pour un peu, on se serait assoupi dans cette ambiance de messe, n'eût été l'irruption d'un manifestant, qui s'est planté sur l'estrade en brandissant un drapeau mexicain, alors que Malala et Kailash montraient leurs prix.

Tout s'est passé tellement vite que le public est resté sans réaction. Selon la presse locale, il est probable que le geste visait à attirer l'attention sur l'affaire des 43 étudiants disparus qui secoue le Mexique depuis deux mois.

L'inconnu a été conduit vers la sortie de façon pas du tout pacifique, sous le regard interloqué des deux lauréats et de la famille royale. Une fin appropriée pour une cérémonie somme toute assez surréaliste.

Trois jours de festivités

La remise du prix Nobel est plus qu'une cérémonie. Pendant trois jours, Oslo vibre au rythme de la rectitude politique avec diverses activités. Cette année, le concert du Nobel mettra en vedette le rockeur Steven Tyler et la rappeuse Queen Latifah. Une exposition sera aussi présentée, dans laquelle on pourra voir l'uniforme scolaire ensanglanté que Malala portait le jour où les talibans ont tenté de l'assassiner.

Pourquoi à Oslo?

Créé par le Suédois Alfred Nobel en 1901, le prix de la paix est remis à Oslo, alors que les autres le sont à Stockholm. La raison en est simple: au moment de sa création, la Norvège et la Suède ne formaient qu'un seul et même royaume.

Le prix Nobel de la paix consiste en une médaille, un diplôme et un chèque de 1,2 million CAN.

Ironiquement, Alfred Nobel est aussi l'inventeur de la dynamite.