La diplomatie américaine tentait vendredi d'arracher un compromis pour sauver les pourparlers de paix israélo-palestiniens dont l'infatigable secrétaire d'État John Kerry lui-même a ouvertement évoqué la fin.

Le négociateur palestinien Saëb Erakat a rencontré dans l'après-midi le médiateur américain Martin Indyk, a-t-on appris de sources palestiniennes proches des discussions.

M. Kerry a déploré qu'«au cours des derniers jours les deux parties aient pris des initiatives qui n'aident pas» au dialogue, ajoutant qu'il allait se concerter avec le président américain pour «évaluer précisément ce qu'il est possible et n'est pas possible» de faire.

«Il y a des limites au temps et aux efforts que les États-Unis peuvent consacrer si les parties ne sont pas désireuses de faire des progrès», a prévenu le chef de la diplomatie américaine à Rabat, insistant: «Ce n'est pas une démarche sans fin et ça ne l'a jamais été».

Après le refus d'Israël de libérer le 29 mars le dernier contingent de prisonniers prévu lors de la relance des pourparlers sous l'égide de M. Kerry en juillet, le président palestinien Mahmoud Abbas a réagi en signant mardi les demandes d'adhésion à 15 conventions et traités internationaux.

M. Abbas a refusé de revenir sur ces demandes, lors d'une conversation téléphonique avec M. Kerry jeudi soir, a annoncé à l'AFP un responsable palestinien.

«Kerry a ajouté qu'Israël menaçait d'une forte riposte aux actions palestiniennes» et a jugé les exigences du président palestinien pour prolonger les négociations de paix au-delà de l'échéance du 29 avril difficiles à accepter pour Israël, lui demandant d'en rabattre, a indiqué ce responsable.

«Nos exigences ne sont pas nombreuses et les menaces d'Israël ne font plus peur à personne, et ils peuvent faire ce que bon leur semble», a répliqué M. Abbas, selon la même source.

Selon des sources proches des discussions, les Palestiniens exigent notamment la libération d'un millier de prisonniers supplémentaires, dont d'importants dirigeants, alors qu'Israël en proposerait environ 400, en fin de peine.

Riposte palestinienne graduée

Le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou et son ministre de la Défense Moshé Yaalon ont demandé dès mercredi à l'administration militaire dans les Territoires palestiniens de proposer une série de mesures punitives contre les Palestiniens, selon le quotidien Haaretz.

Israël compte geler l'autorisation accordée à l'opérateur de téléphonie mobile palestinien Wataniya de développer son réseau dans la bande de Gaza et accroître les restrictions aux activités des Palestiniens dans les 60% de Cisjordanie occupée sous son contrôle exclusif, selon les médias israéliens.

Israël pourrait également de nouveau bloquer le transfert de taxes collectées pour le compte de l'Autorité palestinienne.

En outre, dans un geste interprété par ses détracteurs comme une mesure de rétorsion, le ministère israélien de l'Intérieur a donné jeudi son feu vert au projet de construction d'un musée archéologique controversé administré par l'organisation juive d'extrême droite Elad dans le quartier palestinien de Silwan, à Jérusalem-Est occupé et annexé.

Quelque 1500 Palestiniens ont manifesté devant la prison israélienne d'Ofer, près de Ramallah (Cisjordanie), à l'appel des familles des prisonniers qui devaient être libérés le 29 mars.

Huit manifestants ont été blessés par des tirs israéliens, dont deux grièvement, selon des sources médicales.

Une porte-parole militaire israélienne a affirmé à l'AFP que quelque 200 Palestiniens avaient jeté des pierres sur les soldats.

Jeudi, la chef de l'équipe de négociateurs israéliens Tzipi Livni a informé M. Erakat que les libérations étaient désormais annulées.

Le Parlement israélien doit débattre lundi de la crise du processus de paix.

Selon le quotidien Yediot Aharonot, les dirigeants israéliens n'excluent cependant pas de parvenir à un compromis avant l'échéance du 29 avril.

Les correspondants de Défense du Yediot et du quotidien Haaretz soulignaient vendredi que la riposte de Mahmoud Abbas à la non-libération des prisonniers avait été mesurée, les demandes d'adhésion concernant essentiellement des textes ne présentant pas de menace sérieuse pour Israël.

Amnesty International a salué les demandes d'adhésion, appelant la direction palestinienne à aller beaucoup plus loin.

«Amnesty réitère son appel à la Palestine pour devenir un État partie au Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI). Cette démarche pourrait ouvrir la voie à la justice pour les victimes de crimes de guerre (...) dans les Territoires palestiniens occupés», selon l'organisation.