Après trois ans de blocage, les pourparlers entre Israéliens et Palestiniens ont repris hier. Ceux qui les mènent sont des négociateurs d'expérience qui devront user de beaucoup de diplomatie pour tenter de trouver une solution à un conflit qui perdure depuis six décennies. Les politiciens qu'ils représentent, quant à eux, défendent des intérêts complexes qu'il n'est pas toujours facile de décoder. Portrait des acteurs en présence.

Martin Indyk, émissaire des États-Unis pour le Proche-Orient

Ce vieux routier jouera le rôle de facilitateur dans les pourparlers. Né à Londres d'une famille juive, il a été ambassadeur des États-Unis en Israël et conseiller spécial de l'ancien président Bill Clinton pour le Proche-Orient.

L'organisation pacifiste Americans for Peace Now le décrit comme un «diplomate d'expérience et un brillant analyste». «Il est associé aux politiques américaines du passé qui ont échoué, ce qui est un désavantage», observe cependant Rex Brynen, professeur de sciences politiques à l'Université McGill.

John Kerry, secrétaire d'État américain

C'est à lui qu'on doit l'exploit d'avoir assis à une même table les dirigeants palestiniens et israéliens. Mais pour John Kerry, le vrai travail commence. «Il est assez familier avec ce dossier et il a décidé de tenter sa chance, dit Sami Aoun, spécialiste du Moyen-Orient à l'Université de Sherbrooke. Mais à mon avis, il ne sera pas l'homme de la situation au moment de conclure une entente. La grande question sera alors de savoir s'il recevra un appui substantiel de Barack Obama.» Selon M. Aoun, les États-Unis veulent actuellement montrer qu'ils conservent un certain droit de regard dans un Moyen-Orient en plein tumulte. Il reste à voir s'ils sont prêts à mettre la pression nécessaire pour obtenir une entente, en particulier sur Israël.

Saëb Erakat, chef de l'équipe palestinienne

Cet ancien proche de Yasser Arafat a été de presque toutes les négociations avec Israël depuis 1991. Natif de Jérusalem, il a étudié à San Francisco et à Londres et s'exprime dans un anglais parfait. Il est connu pour son sarcasme et ses déclarations théâtrales.

«Certains n'aiment pas son style, mais ce n'est pas mon cas, dit Rex Brynen, de McGill. C'est un vif négociateur qui est impliqué dans le dossier depuis le début et en connaît très bien les rouages.»

Mahmoud Abbas, président de l'Autorité palestinienne

«Il a bâti toute sa carrière sur l'idée qu'il est possible d'en venir à une solution à deux États par la négociation», dit Sami Aoun. Décrit comme un modéré opposé à la lutte armée, M. Abbas se montrera sans doute ouvert aux compromis, peut-être trop aux yeux de bien des Palestiniens. «Ce qu'il veut, c'est un État, même si c'est un État anémique, chétif, fictif», dit Sami Aoun. Le hic: alors que le Hamas contrôle la bande de Gaza, M. Abbas ne représente pas l'ensemble des Palestiniens, et son influence interne est limitée. «Même s'il signait une entente, je ne crois pas qu'il pourrait la vendre aux Palestiniens», dit Rex Brynen, de l'Université McGill.

Tzipi Livni, chef de l'équipe israélienne

La ministre de la Justice israélienne est décrite comme la femme politique la plus puissante d'Israël. Avocate et ancienne agente du Mossad, les services de renseignement israéliens, Mme Livni était une protégée de l'ex-premier ministre Ariel Sharon et est associée à la droite. Les observateurs la décrivent comme une femme à la forte personnalité avec laquelle il n'est pas toujours facile de travailler, mais qui est sincèrement engagée envers le processus de paix avec les Palestiniens.

Benyamin Nétanyahou, premier ministre d'Israël

Sera-t-il ouvert aux compromis? Négociera-t-il de bonne foi? Le politicien de droite a déjà irrité bien des observateurs en accélérant le mouvement de colonisation à quelques jours des pourparlers. Selon Sami Aoun, M. Nétanyahou est davantage préoccupé par une éventuelle menace nucléaire iranienne que par le dossier palestinien, et pourrait tenter de se rapprocher des Américains dans cette optique. Il croit toutefois que le premier ministre israélien est favorable à la création d'un État palestinien puisqu'il permettrait de diminuer la pression démographique arabe en Israël. «Pour lui, ce serait un bon débarras», dit-il, affirmant que Nétanyahou pourrait être ouvert à certains compromis afin de parvenir à cette solution.