Les responsables religieux iraniens ont vendredi apporté leur appui à l'accord-cadre conclu avec les grandes puissances sur le dossier nucléaire, une entente saluée également par la communauté internationale, mais dénoncée par Israël.

Au lendemain de l'annonce en Suisse des «paramètres» de cet accord-cadre historique âprement négocié depuis 18 mois, l'Iran et les grandes puissances devront désormais se pencher sur les détails techniques complexes d'un accord définitif qui doit intervenir avant le 30 juin.

Cette entente est une percée majeure dans une crise internationale de 12 ans, mais la confiance est loin d'être établie. Les Occidentaux ont souligné que tout pourrait être remis en cause en cas de non-respect des termes par Téhéran.

Appelant à une pression accrue sur l'Iran pour obtenir un meilleur accord, le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou a réclamé que Téhéran reconnaisse «sans ambiguïté» le droit d'Israël à l'existence dans tout accord nucléaire, une exigence irréalisable alors que les deux pays sont des ennemis jurés.

Après une semaine de discussions marathon, notamment avec les États-Unis avec lesquels l'Iran n'entretient pas de relations diplomatiques, le ministre des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif et son équipe d'experts ont été accueillis en héros par une foule de partisans à leur retour à Téhéran.

Dans un bref commentaire, M. Zarif a remercié le guide suprême Ali Khamenei, ultime décisionnaire dans le dossier nucléaire, pour «son remarquable soutien», qui ne s'est pas encore exprimé publiquement.

Le président iranien Hassan Rohani, qui avait salué l'accord dès jeudi, doit s'exprimer en fin d'après-midi devant la presse.

Dans leurs prêches hebdomadaires dans les mosquées du pays, plusieurs imams ont salué l'accord-cadre devant des milliers de fidèles.

«Cet accord-cadre est très bien et c'est une victoire pour nous», a affirmé à Téhéran l'ayatollah Mohammad Emami-Kashani. «La partie occidentale doit savoir qu'autant l'Iran respectera ses engagements, elle doit tenir ses promesses», a-t-il ajouté dans un sermon retransmis à la radio d'État considéré comme un message indirect du guide Khamenei.

Engager des discussions «immédiates»

L'annonce de l'accord avait été accueillie par des scènes de joie et un concert de klaxons dans les rues de Téhéran dans la nuit.

La plupart des Iraniens interrogés espéraient surtout la levée rapide des sanctions internationales qui asphyxient leur pays depuis des années.

«Le public a prouvé qu'il comprenait la différence entre les traîtres et ceux qui sont au service» de la nation, a dit vendredi Saeidollah Allahbedashti, un proche de M. Rohani, en réponse aux critiques internes.

Celles-ci se sont fait entendre vendredi. Mehdi Mohammadi, un analyste politique cité par plusieurs médias conservateurs, a dénoncé un compromis «pas du tout équilibré» qui restait «vague» sur les sanctions.

Selon l'accord-cadre conclu avec le groupe 5+1 (États-Unis, Chine, Grande-Bretagne, France, Russie et Allemagne), l'Iran doit réduire considérablement le nombre de ses centrifugeuses, les machines servant à transformer l'uranium qui, enrichi à 90 %, sert à la fabrication d'une bombe. Téhéran suspendra aussi l'enrichissement d'uranium pendant au moins 15 ans dans le site souterrain de Fordo.

Sur la délicate question des sanctions, le projet de texte prévoit que les mesures unilatérales américaines et européennes seront suspendues dès que le respect de ses engagements par l'Iran aura été certifié par l'Agence internationale de l'énergie atomique. Elles seront rétablies si l'accord n'est pas appliqué.

Aucune indication n'a été donnée sur la date de la reprise des négociations pour la rédaction de l'accord définitif, mais son écriture «doit commencer immédiatement, pour être terminée d'ici le 30 juin», a dit jeudi M. Rohani.

Prudence 

Tout en se félicitant de cette entente, la communauté internationale reste prudente.

Le chef de la diplomatie française Laurent Fabius a jugé que l'épineuse question de la levée des sanctions n'était «pas encore tout à fait réglée». Celles-ci devraient être annulées «au fur et à mesure» que l'Iran respectera ses engagements, alors que Téhéran veut leur levée dès la signature de l'accord global.

Berlin a averti qu'il était «trop tôt pour fêter» car il n'y avait «aucune garantie» d'un succès final, et la Russie a souligné qu'il restait «encore beaucoup à clarifier». Le premier ministre britannique David Cameron a salué «un accord solide» qui «bloque toutes les voies vers une bombe atomique».

Engagé dans un bras de fer avec les républicains du Congrès qui ont menacé de voter de nouvelles sanctions, le président américain Barack Obama a parlé d'une «entente historique» qui devra toutefois faire l'objet de «vérifications sans précédent» quant à son application. Si l'Iran triche, «le monde le saura».

Au Proche-Orient, l'Arabie saoudite, chef de file des monarchies sunnites du Golfe très méfiante à l'égard de l'Iran chiite, a espéré un «accord final contraignant» pour l'Iran.