Israël a laissé éclater son amertume dimanche, en particulier envers les États-Unis, qualifiant d'«erreur historique» l'accord sur le nucléaire iranien conclu à Genève, qui rend «le monde plus dangereux» selon le premier ministre Benyamin Nétanyahou.

Israël a de nouveau agité la menace d'une opération militaire contre l'Iran, à laquelle la plupart des commentateurs ne croient néanmoins pas dans l'immédiat, selon les médias.

«Ce qui a été conclu à Genève n'est pas un accord historique, mais une erreur historique», a déclaré M. Nétanyahou à l'ouverture du conseil des ministres hebdomadaire.

«Le monde est devenu plus dangereux, car le régime le plus dangereux au monde a fait un pas significatif vers l'acquisition de l'arme la plus dangereuse au monde», a-t-il affirmé.

M. Nétanyahou a ainsi contredit directement le secrétaire d'État américain John Kerry qui a affirmé à Genève dimanche que «l'accord rendra le monde plus sûr (...) et Israël plus sûr, nos partenaires dans la région plus sûrs».

«Israël n'est pas lié par cet accord», a prévenu le premier ministre, en assurant que le «régime iranien s'était engagé à détruire Israël».

«Israël a le droit et le devoir de se défendre face à toute menace et je proclame au nom du gouvernement qu'Israël ne laissera pas l'Iran se doter de capacités militaires nucléaires», a promis M. Nétanyahou.

«Plus on en apprend sur l'accord conclu à Genève, plus il apparaît, combien il est mauvais pour Israël, pour la région et le monde», a de nouveau insisté le premier ministre lors d'une cérémonie dans la soirée à Jérusalem.

«L'Iran obtient des milliards de dollars sous la forme d'un assouplissement des sanctions sans avoir à payer le moindre prix», a-t-il déploré.

Israël, considéré comme l'unique puissance nucléaire de la région, un statut sur lequel il maintient l'ambiguïté, présente le programme nucléaire iranien comme une menace pour son existence, se référant aux déclarations répétées des dirigeants de la République islamique souhaitant ou prédisant sa disparition.

«Cet accord est la plus grande victoire diplomatique de l'Iran depuis l'avènement de la révolution (islamique), et il en résultera une course aux armements», a déploré le ministre des Affaires étrangères Avigdor Lieberman, précisant que désormais «toutes les options étaient sur la table».

«Choix entre peste et choléra»

Le ministre de l'Économie Naftali Bennett, chef d'un parti d'extrême droite, a adopté un ton encore plus alarmiste, estimant que «l'accord laisse intacte la machine nucléaire iranienne et pourrait permettre à l'Iran de produire une bombe dans une période de six à sept semaines».

Mais le président Shimon Peres, vu comme un modéré, a demandé à juger sur pièces. «Le succès ou l'échec de cet accord sera jugé sur les résultats et non sur les mots», a-t-il affirmé.

Plusieurs ministres et anciens responsables des services de sécurité ont appelé à se rapprocher des États-Unis pour peser sur le prochain accord plutôt que de continuer à se chamailler avec eux.

«C'était un choix entre la peste et le choléra», a résumé le ministre des Finances Yaïr Lapid à la radio militaire, jugeant désormais «nécessaire de s'assurer qu'il s'agit d'une phase intérimaire et que l'accord final sera meilleur».

«Depuis le début, nous aurions dû travailler plus étroitement avec les Américains», a-t-il ajouté, en évoquant «un long chemin pour améliorer les termes d'un futur accord définitif».

La ministre de la Justice Tzipi Livni a également recommandé de «regarder vers l'avenir: Israël doit agir en étroite coopération avec les États-Unis, pour renforcer cette alliance stratégique, et créer un front politique avec d'autres pays, comme les pays arabes, qui considèrent un Iran nucléarisé comme une menace».

M. Nétanyahou avait posé des exigences très strictes à tout arrangement avec l'Iran et ferraillé contre l'administration de Barack Obama, accusée de vouloir trop céder.

Un ancien patron du Mossad (service de renseignements), Ephraïm Halévy, a souligné qu'il était «naïf de penser que l'on pouvait contraindre l'Iran à démanteler toutes ses centrifugeuses». «De plus, l'accord de Genève prévoit un contrôle sans précédent des installations nucléaires iraniennes», a-t-il relevé.

L'ex-chef du renseignement militaire, le général de réserve Amos Yadlin, a également argué que si aucun accord n'avait été signé, «l'Iran aurait continué à développer son programme nucléaire», prônant lui aussi une «coordination avec les États-Unis».

Les réactions dans la rue étaient pourtant acrimonieuses vis-à-vis des alliés d'Israël: «Ils nous ont abandonnés - les Français, les Britanniques et même les Américains», reprochait ainsi une habitante de Jérusalem.

Pour les Palestiniens, en revanche, l'accord de Genève montre à Israël que «la paix est la seule option au Moyen-Orient».