Le Conseil de sécurité de l'ONU a approuvé hier un durcissement des sanctions à l'égard de l'Iran. Douze des quinze membres ont voté en faveur de la résolution concoctée par les États-Unis. La Turquie et le Brésil ont voté contre, alors que le Liban s'est abstenu.

Pour la première fois, les investissements iraniens à l'étranger seront limités dans le domaine nucléaire. Les inspections de cargaisons suspectes à destination de l'Iran seront resserrées, alors qu'augmente le nombre d'institutions et d'individus spécialement visés par les sanctions. La résolution prévoit aussi que des États puissent adopter des sanctions plus sévères, que les États-Unis et l'Union européenne se sont gardés de décrire en détail pour ne pas faire dérailler les négociations sur la résolution, selon le New York Times.

«La stratégie d'Obama commence à porter ses fruits», commente Sami Aoun, politologue à l'Université de Sherbrooke. «La facilité avec laquelle la Russie et la Chine ont pu être convaincues de participer aux sanctions montre que la diplomatie iranienne a perdu la bataille. Les sanctions contre l'Iran sont maintenant semblables à celles adoptées contre la Corée du Nord. Selon le New York Times, la Chine a été entre autres convaincue par une présentation confidentielle d'Israël décrivant les conséquences d'une frappe militaire israélienne contre les installations nucléaires iraniennes, notamment l'interruption du transport de pétrole du Moyen-Orient, source de la moitié des importations chinoises.

La Chine et la Russie avaient déjà participé à trois autres résolutions entre 2006 et 2008, mais il avait fallu beaucoup plus de temps pour les convaincre, selon M. Aoun. Quant à la visite cette semaine à Istanbul du premier ministre russe, Valdimir Poutine - où il a rencontré le président iranien - elle signifie simplement que le dialogue n'est pas rompu. «Dans leurs discours à l'ONU, les ambassadeurs britannique et turc ont d'ailleurs confirmé leur engagement envers le dialogue.»

À double tranchant

Les sanctions constituent une épée à double tranchant. «On peut considérer qu'elles ont poussé l'Iran à investir dans le développement technologique interne, notamment pour les missiles, les drones, et évidemment les armes nucléaires», dit M. Aoun.

Selon Gil Troy, historien à l'Université McGill, le vote de la Turquie est un «changement historique». «La Turquie avait toujours été un allié indéfectible des États-Unis, dit M. Troy. Jusqu'à il y a seulement quelques semaines, un tel vote était impensable.»

Selon un récent rapport du Centre européen pour les réformes, de Londres, le ministre turc des Affaires étrangères, Ahmet Davutoglu, est au coeur de ce recentrage du pays. En 2001, alors qu'il était professeur d'université, il avait publié un livre appelant à un retour à une perspective diplomatique «ottomane», tournée à la fois vers l'Est et l'Ouest. Depuis, il s'est fait l'architecte d'une politique de «zéro problème» avec les voisins de la Turquie.

SOURCES: AFP, AP, BBC, The New York Times, The Wall Street Journal