L'Iran a exprimé mercredi son exaspération devant la persistance des Etats-Unis à vouloir durcir les sanctions de l'ONU à son encontre malgré son offre d'échanger du combustible nucléaire à l'étranger, accusant les grandes puissances de «se discréditer».

Entre-temps, les deux parrains de la proposition iranienne, le Brésil et la Turquie, membres non permanents du Conseil de sécurité de l'ONU, ont demandé dans une lettre aux 13 autres pays membres de «donner une chance aux négociations» et de ne pas adopter de nouvelles sanctions contre l'Iran.

Dans un entretien téléphonique mercredi avec le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan, le président américain Barack Obama a reconnu les «efforts» d'Ankara, mais lui a exprimé «l'inquiétude persistante» de la communauté internationale dans ce dossier.

Mardi, le Conseil de sécurité a examiné un nouveau projet de résolution, d'inspiration américaine, sanctionnant l'Iran notamment pour sa politique d'enrichissement d'uranium. Il vise les investissements de l'Iran, ainsi que ses activités maritimes et bancaires, de même que les ventes d'armes à l'Iran.

L'examen du projet, qui a selon Washington le soutien de Moscou et Pékin, est survenu au lendemain de l'annonce par l'Iran d'une proposition d'échange de combustible nucléaire en Turquie ainsi que de son intention de continuer à produire de l'uranium enrichi à 20%.

Malgré ses démentis, l'Iran est soupçonné par une partie de la communauté internationale de chercher à se doter de l'arme nucléaire sous couvert d'un programme civil, particulièrement depuis qu'il a entrepris en février de produire de l'uranium hautement enrichi à 20%.

«La question des sanctions est dépassée», a lancé le chef de l'Organisation de l'énergie atomique iranienne, Ali Akbar Salehi. «Les grandes puissances se discréditent dans l'opinion publique» en ignorant l'initiative irano-turco-brésilienne.

«Nous devons être patients parce qu'elles ne parviendront pas à leurs fins», a-t-il dit, espérant que ce nouveau projet de résolution ne serait pas adopté grâce à «des gens rationnels (...)».

M. Salehi a ajouté que Téhéran «prépare la lettre» confirmant sa proposition officiellement à l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), qui sera transmise dans le délai annoncé de sept jours.

Pour le chef de la diplomatie iranienne, Manouchehr Mottaki, «il n'y a aucune chance que la résolution soit adoptée».

«Nous ne prenons pas ces mesures au sérieux, les nations cherchant à imposer des sanctions étant minoritaires», a-t-il dit à la chaîne iranienne Al-Alam.

«Il semble que l'accord de Téhéran est sur la voie de devenir opérationnel», a même dit sur un ton optimiste M. Mottaki, dont le pays est déjà sous le coup de cinq résolutions de l'ONU condamnant sa politique nucléaire, dont trois assorties de sanctions.

La proposition prévoit l'échange en Turquie de 1 200 kilos d'uranium iranien faiblement enrichi (3,5%) contre 120 kilos de combustible enrichi à 20% fourni par les grandes puissances et destiné au réacteur de recherche nucléaire à finalité médicale de Téhéran.

Trois membres permanents du Conseil de sécurité -Chine, Russie, France- ont jugé l'offre iranienne «positive», mais la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton a estimé qu'il ne s'agissait que d'une simple tentative de «faire baisser la pression» contre Téhéran.

Le projet examiné à l'ONU est «la meilleure réponse que nous puissions fournir aux efforts entrepris à Téhéran ces derniers jours», a-t-elle déclaré.

Pour Washington, l'annonce par Téhéran de son intention de poursuivre l'enrichissement a été un élément essentiel pour convaincre les membres du Conseil de sécurité de soutenir de nouvelles sanctions.

Mais le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva a mis en garde contre un «retour en arrière» dans le dossier nucléaire si le Conseil de sécurité ne manifestait pas son «intention» de négocier la dernière offre.