Nelson Mandela, l'un des derniers géants du XXe siècle, sera rendu à la terre de ses ancêtres dimanche, dans le village rural de Qunu, dans le sud de l'Afrique du Sud, à l'issue de funérailles alliant honneurs militaires et traditions xhosas.

«Quand un homme a accompli ce qu'il considère comme son devoir envers les siens et son pays, il peut reposer en paix. Je pense que j'ai fait cet effort», estimait dès 1996 le héros de la lutte anti-apartheid.

Dix-sept ans plus tard, l'heure est venue de ce dernier repos. Après une semaine d'hommages internationaux, l'ancien président sera inhumé, comme il l'a souhaité, auprès de ses parents et de trois de ses enfants dans le village de Qunu, où il a passé les meilleurs moments de son enfance.

Près de 4500 personnalités participeront à des funérailles d'État sur la propriété qu'il s'était fait construire à sa libération, en 1990, après 27 ans dans les prisons du régime raciste.

Un représentant de la famille et des dirigeants africains prendront la parole, de même que le président sud-africain Jacob Zuma.

Ses amis et des personnalités, le prince Charles, les anciens ministres français Lionel Jospin et Alain Juppé, ou le militant américain des droits civiques Jesse Jackson seront présents sous la grande tente blanche installée pour l'occasion.

Son camarade de lutte, le Prix Nobel de la Paix Desmond Tutu, sera également présent après avoir un moment créé la stupeur en annonçant qu'il renonçait à ce déplacement faute d'avoir reçu une invitation..

Très critique envers le parti au pouvoir, l'archevêque anglican avait déjà été relégué aux seconds rôles lors de l'hommage international, mardi à Soweto, en présence d'une centaine de chefs d'État et de gouvernement.

Le président américain Barack Obama avait notamment salué en Mandela un «géant de l'Histoire».

L'Afrique du Sud devrait se figer dimanche pendant les deux heures que dureront les funérailles. De nombreux magasins ont annoncé qu'ils resteraient fermés, contrairement à l'usage dans la période qui précède Noël.

L'esprit des ancêtres

La cérémonie sera diffusée en direct à la télévision et retransmise sur de grands écrans installés dans tout le pays. Mais à 10H00, les caméras s'éteindront.

La famille de Nelson Mandela a souhaité pouvoir le mettre en terre à l'écart du public. Privée de son patriarche pendant 27 ans, obligée de le partager avec le monde entier de son vivant, elle pourra enfin se le réapproprier pour un dernier adieu.

Seules 450 personnes, les plus proches donc, assisteront à son inhumation qui sera dirigée par des chefs de la tribu des Thembu, une branche de l'ethnie xhosa.

Les anciens s'adresseront à lui en l'appelant Dalibhunga -- le nom qui lui avait été donné lors de son initiation rituelle à 16 ans.

Un boeuf devrait également être sacrifié pour contenter les esprits des ancêtres et s'assurer qu'ils réservent un bon accueil au père de la Nation arc-en-ciel.

Pendant toute la cérémonie, les journalistes - plus de 3 000 se trouvent sur place - seront tenus à l'écart.

Son enterrement mettra un point final à une semaine de deuil national décrétée après la mort, jeudi 5 décembre à 95 ans, de celui qui a réussi à négocier la fin de l'apartheid sans plonger son pays dans la guerre civile.

Son crédit, déjà immense auprès de la population noire qu'il a libérée, avait encore grandi lors de sa présidence (1994-1999) placée sous le sceau du pardon envers la minorité blanche.

L'amour de son pays s'est manifesté de mercredi à vendredi quand 100 000 personnes sont venues s'incliner sur sa dépouille exposée dans un cercueil semi-ouvert au siège de la présidence, à Pretoria.

Souvent effondrés, les Sud-Africains avaient pu jeter un dernier regard sur le visage de leur icône, les traits figés pour l'éternité. Et peut-être auraient-ils souhaité déceler un mouvement à la commissure des lèvres...

«Je ne doute pas un seul instant que lorsque j'entrerai dans l'éternité, j'aurai le sourire aux lèvres», avait écrit Mandela en 1997.