Oublions un instant l'Oussama ben Laden présenté samedi par l'administration Obama, celui qui se regarde à la télévision et qui se teint la barbe avant d'enregistrer ses messages de propagande terroriste.

Imaginons maintenant le chef d'Al-Qaïda assis devant un journal de bord dans lequel il note non pas ses activités quotidiennes ou ses états d'âme, mais ses idées pour de nouvelles opérations terroristes sur tout le territoire des États-Unis, y compris à Los Angeles, Chicago et Washington. Une partie du contenu de ce carnet a été révélée, mercredi, à des journalistes par des responsables américains dont l'identité n'a pas été dévoilée.

Saisi avec de nombreux autres documents dans la maison où ben Laden a été abattu par des commandos américains, dans la nuit du 1er au 2 mai, le journal du chef d'Al-Qaïda contient notamment une suggestion à ses troupes de recruter des non-musulmans «opprimés aux États-Unis», selon lui, tels que les Afro-Américains et les Latino-Américains. L'objectif était de les enrôler pour réaliser un nouvel acte terroriste sur le sol américain le jour du 10e anniversaire des attentats du 11 septembre 2001.

Ailleurs dans son journal de bord, ben Laden se demande combien d'Américains devaient être tués dans de nouvelles attaques pour forcer les États-Unis à abandonner le monde arabe une fois pour toutes. Ailleurs encore, le Saoudien dresse la liste des dirigeants américains à assassiner, sa cible numéro un étant Barack Obama, suivie du chef d'état-major interarmes et le secrétaire à la Défense.

Le chef d'Al-Qaïda exclut cependant de cette liste le vice-président américain, considérant que cette fonction ne pesait pas suffisamment pour mériter un projet d'attentat.

Les responsables américains ont précisé que ben Laden se servait également de l'ordinateur pour communiquer avec ses principaux lieutenants, en l'occurrence le numéro deux d'Al-Qaïda, l'Égyptien Ayman al-Zawahiri, et le numéro trois de l'organisation, le Libyen Atiyah Abd al-Rahman. Il était également en contact avec des dirigeants de la filiale d'Al-Qaïda dans la péninsule arabique.

Les messages du chef d'Al-Qaïda étaient transmis par le truchement de clés USB.

«Une petite bibliothèque universitaire»

Le conseiller de la Maison-Blanche pour la sécurité nationale, Tom Donilon, a comparé, dimanche dernier, le matériel récupéré par les commandos américains dans la dernière résidence de ben Laden à une «petite bibliothèque universitaire». Figurent parmi ce matériel : 110 clés USB, plusieurs ordinateurs, des masses de documents et des notes manuscrites.

Dans un article publié, hier, sur ces documents, le Washington Post a brossé d'Oussama ben Laden le portrait d'un chef terroriste obsédé par les États-Unis, une fixation qui ne faisait pas l'unanimité au sein de son organisation. Certains de ses lieutenants souhaitaient en effet mettre l'accent sur des combats plus locaux, selon les responsables américains cités par le quotidien.

Il faut s'attendre à d'autres révélations au cours des prochains jours et semaines concernant la masse d'informations qui est analysée depuis plus d'une semaine par une équipe interdisciplinaire réunie en Virginie dans un entrepôt secret de la CIA.

En attendant, il semble que plusieurs des suggestions inscrites dans le journal de bord de ben Laden sont restées lettre morte.