Sur la plage de Waveland, dans le Mississippi, un petit groupe d'enfants jouent au milieu des taches de pétrole héritées de la marée noire. Tammy, une fillette de quatre ans, sort brusquement de l'eau: une bille de goudron s'est collée à sa jambe.

«Dégage!», hurle la petite fille en essayant de se débarrasser de la tache couleur rouille.

Tasha Rogers, une adulte qui s'occupe du groupe d'enfants, tente alors de nettoyer la jambe avec une serviette mais le goudron résiste et Tammy retourne dans l'eau pour se laver -et surveiller la présence d'autres objets indésirables.

Les plages du Mississippi ont été rouvertes au public cette semaine, mais celle de Waveland, comme beaucoup d'autres, est quasi déserte.

Les équipes de nettoyage de la marée noire montées par le groupe BP, armées de râteaux et de sacs en plastique dans lesquels elles ramassent des fragments d'hydrocarbure, semblent même plus nombreuses que les touristes.

«Je n'arrive pas à comprendre comment des gens peuvent laisser leurs enfants aller dans la mer», confie une femme appartenant à une des équipes.

«On voit le pétrole pourtant, c'est pas comme s'il était caché!», ajoute-t-elle sous le couvert de l'anonymat, en précisant qu'elle n'a pas le droit de parler à la presse.

Si les estivants sont autorisés à revenir sur plages, il leur est toutefois recommandé d'«éviter tout contact avec ce qui peut avoir un rapport avec le pétrole». Et pour cause: la plage de Waveland est maculée des souillures noires dues à la marée noire.

Pas de quoi saper le moral en acier de Mme Rogers: «On a de la chance parce qu'ils ont levé l'interdiction il y a juste quelques jours, du coup on peut aller se baigner», dit-elle en souriant. «Mais je suppose qu'on doit être un peu fou!».

Si folie il y a, les professionnels du tourisme aimeraient sans doute qu'elle soit mieux partagée: les plages désertes sont une préoccupation majeure pour les cinq États du golfe du Mexique touchés par la marée noire qui dépendent à des degrés divers des milliards de dollars générés par le tourisme.

À Waveland, l'impact dévastateur de la marée noire se ressent bien au-delà de la plage. «Fermés pour l'été», peut-on ainsi lire sur les devantures de marchands d'appâts, la pêche, comme la restauration ou l'hôtellerie, ayant été frappée de plein fouet par la catastrophe.

Autre signe symptomatique: l'immense parking d'un non moins grand casino n'accueille qu'une petite vingtaine de véhicules, et encore: la moitié a l'air d'appartenir aux équipes qui s'occupent du nettoyage.

Retour sur la plage: Jeremy Cahill, un habitant de Slidelle, en Louisiane, est venu constater de visu les dégâts causés par la marée noire, la pire de l'histoire des États-Unis, et le travail des personnes chargées d'en effacer les traces.

Son jugement est implacable: les nettoyeurs ne seraient guère efficaces, quand ils ne resteraient tout simplement pas «assis» sur la plage. «Je ne vois personne travailler. Mais je vois le pétrole», dit-il avec amertume.