Vingt balles de goudron ont été retrouvées par un agent de la faune sur les plages de l'ouest des îles Keys, lundi soir, faisant craindre l'arrivée de la marée noire dans le Gulf Stream.

 Les balles, qui mesurent 10 et 20 centimètres de diamètre, ont été envoyées dans un laboratoire qui tentera d'en déterminer la provenance.

Pour l'heure, la question de l'arrivée du pétrole dans le Gulf Stream divise les spécialistes. Mary Landry, amiral de la Garde côtière américaine, se fait rassurante: la marée noire n'est pas sortie du golfe du Mexique.

«Au moment où l'on se parle, la marée noire n'a pas encore frappé le Gulf Stream. Il y a peut-être des résidus de surface qui sont près du courant», a-t-elle dit, hier, avant d'ajouter que le nettoyage de la marée noire dans le Golfe allait prendre «des années».

Pour William Hogarth, directeur du département des sciences marines de l'Université du Sud de la Floride, les images satellites et les modèles informatiques montrent que l'arrivée du pétrole en Floride serait imminente. Selon lui, des «filaments» de la nappe de pétrole sont déjà poussés vers Key West par le Gulf Stream, un puissant courant d'eau chaude qui contourne la Floride et monte le long de la côte Est.

Son collègue, Igor Kamenkovich, de l'Université de Miami, estime que l'État doit se préparer au pire. «Je pense que la menace pour le sud de la Floride est réelle, et que nous devons nous préparer, a-t-il expliqué en point de presse, hier. C'est difficile de faire des prédictions, mais si ça arrive, ce sera pénible pour nous.»

D'autres experts prévoient que la marée noire pourrait affecter les Keys d'ici une semaine.

Chiffres frappants

Depuis hier, BP affirme pomper 2000 barils de pétrole quotidiennement à l'aide d'un tuyau inséré dans la fuite au fond du golfe du Mexique. La société affirme que l'équivalent de 5000 barils est projeté chaque jour. Des experts indépendants ont calculé que la fuite était de cinq à dix fois plus importante.

L'entreprise compte maintenant essayer de colmater la brèche en employant la méthode «top kill», qui consiste à propulser de la boue et du ciment dans le tuyau brisé. Cette opération délicate sera tentée avant la fin de la semaine, a dit l'entreprise, hier.

Les chiffres de la marée noire sont frappants: 750 bateaux tentent de récupérer et de disperser le pétrole qui flotte, 19 000 personnes travaillent sur la nappe et 15 600 demandes d'indemnisation ont déjà été enregistrées par BP, selon un calcul de l'Associated Press.

Qu'à cela ne tienne, le grand patron de BP, Tony Hayward, a tenté de minimiser les conséquences de la tragédie. «Je pense que l'impact sur l'environnement sera très, très modeste», a-t-il confié hier dans une entrevue à la télévision britannique.

Dispersants controversés

L'utilisation de produits dispersants destinés à empêcher la formation d'une nappe de pétrole à la surface inquiète les pêcheurs de la Louisiane. Ceux-ci rappellent que cette technique est employée pour la première fois à si grande échelle.

«Nous voulons que le président ordonne à BP de cesser d'utiliser des dispersants, a expliqué Acy Cooper, vice-président de l'Association des pêcheurs de crevette de la Louisiane. Les effets à long terme du produit sur les poissons et les crevettes sont inconnus.»

Les équipes de BP ont à ce jour projeté plus de 2 millions de litres de produits dispersants dans le golfe du Mexique depuis l'explosion de la plateforme Deepwater Horizon, le 20 avril.