Le dôme de contention a été déposé au fond du golfe du Mexique, hier, et devrait commencer à canaliser la fuite de pétrole ce week-end. Sur la côte du Mississippi, la perspective de l'arrivée de la marée noire inquiète les citoyens, qui se remettent à peine de la dévastation de l'ouragan Katrina.

L'asphalte des rues de Waveland est noir comme de l'encre. La caserne de pompiers brille. Le quai municipal vient d'être inauguré, il y a deux semaines.

Le passé n'est pas complètement effacé, par contre. Là, une grange gît comme un vieux jean sale. Un escalier s'élève vers le ciel, desservant une maison introuvable.

C'est ici que l'ouragan Katrina est entré en contact avec la côte, dans l'après-midi du 28 août 2005. En quelques heures, Waveland été pulvérisée. Cinquante citoyens ont perdu la vie. Plus de 40% des 6000 habitants ne sont jamais revenus.

«Bien des gens n'ont pas reconstruit parce qu'aucune compagnie ne veut les assurer, explique Sunny Bromwell, responsable du quai municipal. Ils sont partis vivre ailleurs.»

Aujourd'hui, une nouvelle menace tient la région en haleine: des millions de litres de pétrole avancent lentement vers la côte du Mississippi. Waveland est directement dans la trajectoire du déversement. De passage dans la région, dimanche dernier, le président Barack Obama a donné au maire de Waveland un numéro spécial pour le joindre en cas d'urgence, ont rapporté les médias locaux.

Résidant de longue date, M. Bromwell n'a jamais connu une situation semblable. «Il y a eu des déversements, mais jamais d'une telle ampleur, dit-il. Tout le monde écoute les nouvelles pour savoir où la marée noire s'en va.»

Il s'inquiète surtout pour les poissons et les oiseaux. «Cette année, pour la première fois depuis Katrina, les pélicans bruns sont revenus. Je me demande ce qu'ils vont devenir si la marée noire arrive jusqu'ici.»

Dôme mis en place

En haute mer, hier, des ingénieurs ont guidé le dôme de contention vers la zone de la fuite de pétrole. L'opération délicate s'est bien déroulée, a signalé BP, l'entreprise responsable du déversement.

«Tout semble se dérouler comme prévu, a dit à l'Associated Press le porte-parole de BP, Bill Salvin, hier après-midi. Nous avons encore bien des défis à relever, mais les progrès accomplis aujourd'hui sont considérables.»

La société pétrolière laisse présentement le dôme devenir plus stable dans le fond de l'océan. Des sous-marins robots tenteront ensuite d'accrocher un tuyau au sommet du dispositif, ce qui va éventuellement canaliser le pétrole à la surface, dans des bateaux conteneurs. Le système doit être opérationnel dimanche.

La marée noire semble s'être déplacée en direction du delta du fleuve Mississippi, hier. Le gouverneur de la Louisiane, Bobby Jindal, a pu survoler la région en hélicoptère. Il a dit avoir aperçu des anneaux orangés flotter sur l'eau. Le gouverneur a rapporté avec lui un morceau de goudron sec de la taille d'une pomme qu'il a ramassé sur une île de l'embouchure du Mississippi.

L'augmentation de la superficie de la marée noire a poussé le gouvernement fédéral à élargir la zone où la pêche est interdite. La date d'une éventuelle réouverture de la pêche a été repoussée au 17 mai, mais peu s'attendent à ce que le moratoire soit levé à cette date.

Les efforts pour retirer le pétrole de l'eau - ou des côtes - devraient s'étaler sur plusieurs mois et coûter des milliards de dollars. Hier, le département d'État a fait savoir que 13 pays avaient offert leur aide, en plus des Nations unies. Le Canada et le Mexique ont offert d'envoyer de l'équipement et des experts. La France, l'Allemagne, l'Espagne, le Royaume-Uni et les Pays-Bas, notamment, ont aussi offert leur soutien. Washington évalue la situation et devrait rendre une décision sur l'aide internationale au cours des prochains jours.