Une cloche de béton destinée à bloquer le déversement de pétrole dans le golfe du Mexique a été terminée hier. Elle devrait être déposée au fond de l'océan le week-end prochain. La marée atteint désormais 200 km de long sur 110 km de large, soit la superficie de la Jamaïque.

Hier matin, Trey Pique, jeune pêcheur de Venice, est sorti en haute mer sur son bateau. Il est revenu au port quelques heures plus tard. Il a déposé sur le quai une bouteille de plastique qui contenait de l'eau. L'eau était aussi noire et opaque que de la boue.

 

«La marée noire est à 20 km», a-t-il dit.

Sur le quai, les vieux pêcheurs regardaient la bouteille, premier signe tangible de la marée noire, invisible de la côte.

«Je n'ai jamais vu une catastrophe semblable», a laissé tomber Peter Young, 65 ans, qui a passé sa vie dans la région.

La marée noire de 200 km de long sur 110 km de large a jusqu'ici épargné la côte américaine. Hier, le chef de l'exploitation de BP, Doug Suttles, a dit que le déversement devrait rester au large au moins durant les trois prochains jours, selon les prévisions. La nappe de pétrole prend de l'expansion au rythme de 800 000 litres de pétrole par jour.

Au large de Venice, des travailleurs postés sur une barge s'affairaient à dérouler des centaines de mètres de manchons destinés à stopper l'avancée de la marée noire. Leur progression était lente.

«Nous travaillons jour et nuit, a lancé un travailleur qui a simplement dit s'appeler Jeff. Si on pouvait protéger les marécages, ce serait une victoire pour nous.»

Les résidants de la Louisiane, du Mississippi, de l'Alabama et de la Floride suivent la progression de la marée noire de jour en jour, impuissants devant l'ampleur du déversement.

«C'est comme un jeu de roulette où personne ne veut être le gagnant», a expliqué Dave Cutler, pilote qui organise des sorties en bateau pour les pêcheurs amateurs. Plusieurs de ses clients ont appelé pour annuler leur séjour, même si la marée noire n'a pas encore touché les bayous riches en poissons du sud de la Louisiane.

«Les gens regardent les nouvelles à la télé et ils ont peur. Je les comprends. Ici, nous attendons de voir la suite. Si le pétrole touche les bayous, c'est la fin de la pêche dans la région pour un bon bout de temps», a-t-il dit.

BP a annoncé qu'une cloche de béton et d'acier de 90 tonnes a été terminée, hier, et qu'elle serait bientôt chargée à bord d'un bateau. Elle devrait être déposée sur la brèche, à 1,5 km de profondeur, samedi ou dimanche au plus tôt.

Groupe de citoyens

Afin de tenter de donner une image plus claire du désastre, le groupe citoyen Louisiana Bucket Brigade recueille des informations envoyées par le public et les affiche sur un site web.

«Les gens nous envoient des photos, des messages textes, même des messages sur Twitter, explique Shannon Dosemagen, responsable du projet. Le public nous aide à monter une carte des répercussions de la marée noire.»

Si les marins et les citoyens sont inquiets pour l'avenir, les gens qui travaillent dans l'industrie du pétrole et du gaz naturel le sont également. Ben Waring, consultant pour plusieurs multinationales du pétrole, dit que l'image de son industrie est sérieusement atteinte.

«Avoir des plateformes de forage dans le golfe du Mexique sera toujours une activité risquée. C'est inévitable que des accidents se produisent. Mais notre société utilise le pétrole. Je crois qu'il faut apprendre de nos erreurs, mais nous allons avoir encore besoin de pétrole demain matin.»

Sur le web: https://oilspill.labucketbrigade.org